TV

Voeux singuliers du président Maduro à l'Iran: du gaz dronesque dans les eaux des Caraïbes?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le destroyer spécialisé dans la guerre électronique qui a traversé l'océan Atlantique pour la première fois en juin 2021. ©Tasnim

Parmi les messages de félicitation qui se sont afflués ce 11 février vers la capitale iranienne à l'occasion du 43ème anniversaire de la victoire de la Révolution de 1979, il y en a eu un particulièrement significatif, celui du président Maduro qui "s'est joint au peuple iranien pour fêter" cet anniversaire en saluant le peuple iranien et son président révolutionnaire pour leur résistance à l'impérialisme et en "s'engageant à aller en avant dans le renforcement des liens bilatéraux". A quoi rime ce message? Ce mois de janvier, les agences pétrolières américaines, OilPrice et Bloomberg, ont rapporté à plusieurs reprises la hausse significative des exportations pétrolières vénézuéliennes.

Elles en ont fait autant pour l'Iran, ce qui a conduit les observateurs à faire un cuisant constat : les deux super Etats pétroliers aidés par la Chine poursuivent de plus belle leurs efforts destinés à parfaire le mécanisme de "bise-sanction". Ils se serrent les coudes, font des trocs avec le Venezuela, important du gaz liquéfié iranien pour en ranimer les puits séchés par des décennies de pillage US, l'Iran important du pétrole lourd vénézuélien pour ses consommations internes. Ce mécanisme est allé si loin que le vendredi 11 février, les Yankee ont annoncé un allègement des sanctions pétrolières contre le Venezuela, voyant de facto la totale castration de leur régime des sanctions. Or cette décision est allée de pair avec l'arrivée d'un superpétrolier battant pavillon iranien transportant plus de 2 millions de barils de condensat qui a accosté dans un port vénézuélien. Le pétrolier Starla est arrivé au large de Barcelone, au Venezuela, fin janvier.

Le Starla représente la première cargaison connue de condensat de 2022 en provenance d'Iran à accoster au Venezuela. TankerTrackers.com, a déclaré que le navire transportait 2,1 millions de barils d'une forme très légère de pétrole à base de gaz naturel que la société d'État vénézuélienne utilise pour diluer son pétrole brut lourd afin de le transformer en un mélange exportable. Le Tankertrakers a déclaré que des navires avaient transporté plus de 8,3 millions de barils de condensat d'Iran au Venezuela quatre fois depuis 2020. 

Lire plus : 1re base navale russe en Atlantique ?

Le Trésor américain a sanctionné l'entreprise du Starla en octobre 2020, prétendant qu'elle avait aidé à financer les institutions militaires iraniennes, mais cette sanction a-t-elle réellement changé quelque chose? Si elle a poussé les deux Etats à liquider plus rapidement le dollar dans leurs échanges mutuels. Mais un président Maduro qui rallie le peuple iranien pour fêter le 43 ème anniversaire de sa libération du joug des Américains veut dire bien plus que des échanges pétroliers florissants et cassant le régime des sanctions US. Vendredi, le général de division Yahya Rahim Safavi, conseiller du Leader iranien pour les affaires internationales est revenu sur la présence iranienne dans l’hémisphère nord. 

Lors d’une intervention le mardi 4 janvier à la tribune de la Conférence internationale sur l'Iran et ses voisins, le général de division Yahya Rahim Safavi, haut conseiller militaire du Leader de la RII, a déclaré que le siècle actuel verrait l'émergence du monde musulman comme un nouveau pôle de pouvoir avec une nature culturelle, civilisationnelle, économique et démographique qui s'opposerait fermement aux puissances occidentales.

« Les relations régionales et internationales et la politique de voisinage sont soumises à des processus macro-géopolitiques. La lecture géopolitique et stratégique de l'Occident dominait au cours de ces deux derniers siècles sur les cercles politiques et scientifiques du monde. Nous devons établir un nouveau plan et élaborer notre "théorie géopolitique résistancielle. Actuellement, un nouveau pôle de pouvoir, baptisé pôle de pouvoir du monde islamique, émerge progressivement. Ce pôle de pouvoir sera constitué comme un bloc géopolitique, géostratégique, géo économique et géoculturelle" pour rivaliser et résister aux puissances de l'Ouest. La nature de ce pouvoir est culturelle, civilisationnelle, économique et démographique, mais aussi militaire. Les régions géostratégiques et géoéconomiques les plus importantes du monde telles que le détroit d'Hormuz, Bab el-Mandeb, Malacca, Gibraltar, Suez, etc., se trouvent dans des pays musulmans où l'idée de la Résistance est bien installée ou tend à remporter. De plus, des pays islamiques possèdent 75 % des ressources pétrolières et 57 % des ressources gazières. »

La géopolitique de la Résistance signifie « changer les structures et les processus sociaux, culturels (religieux), économiques et militaires de oumma musulmane afin d’accéder à la liberté et à l'indépendance d'action face à l'impérialisme et de s'imposer de tout poids sur les rapports de forces. En fait, ce qui a mis les États-Unis en colère contre l'Iran, une colère aveugle qui dure depuis plus de 40 ans, c'est ce même processus de genèse de puissance, une puissance qui défie les leurs, qui les bat et même les met au pas. Cette puissance  a été créée au Moyen-Orient avec la direction sage et courageuse du Leader et à la faveur de l'action de la force Qods sur le champ de bataille que diligentait pendant longtemps le général martyr Qassem Soleimani. Or cette genèse de puissance, de souveraineté trouve de plus en plus d'audience à travers le monde. Au Moyen-Orient, mais aussi aux portes des Etats Unis aux Caraïbes où le fait de  contrer l'hégémonie américaine nous rallie aux pays d'Amérique latine, dont le Venezuela, Cuba et le Pérou. C'est le front de la Résistance latine qui se crée tout naturellement".

Cette lecture bien singulière des liens Résistance-Amérique Latine apparaît dans un sens inversé à travers l'un des récents textes de l'institut de recherche israélienne ALMA, un Israël qui a niché depuis longtemps en Amérique Latine afin de servir l'impérialisme. L'étude datée de 3 février écrit : 

"L'Iran a commencé à accroître sa présence au Venezuela, selon un rapport du régulateur de la défense israélienne Alma Center. Le stationnement de véhicules aériens sans pilote (UAV) à longue portée de l'Amérique du Nord en est une manifestation? C'est une initiative bien accueille par les Etats de la région assoiffés de dissuader les États-Unis. L'Iran aurait commencé à envoyer des drones et à les produire au Venezuela. Selon le rapport de sécurité, les premiers véhicules aériens sans pilote (UAV) ont déjà été stationnés à l'intérieur des frontières du Venezuela. Il s'agit des drones à 2000 km de portée, capable d'atteindre  la ville américaine de Miami."

Et d'ajouter : " Alors que Biden se bat pour négocier directement avec l'Iran, les drones iraniens au Venezuela opèrent par centaines pour recueillir des renseignements à partir du territoire américain et attaquer, le cas échéant, des cibles terrestres ou aériennes, soit en larguant des missiles et des bombes, soit en utilisant une attaque suicidaire ou explosive. En fin de compte, et sans le crier sur les toits comme les Russes, les Iraniens et leurs alliés viennent d'être accueillis par le Venezuela qui leur procure une base potentielle pour de futures activités anti-américaines.

 Même s'ils n'opèrent pas à partir de là, la simple présence au Venezuela dans la stratégie de l'Iran constitue une menace pour les États-Unis. L'Iran estime  qu'une telle présence contribuera à dissuader Washington et incitera les États-Unis à "réfléchir à deux fois" avant d'entreprendre une action militaire contre l'Iran. Par certains côtés les objectifs de l'axe Téhéran Caracas s'entrent croisent. La présence d'une puissance militaire comme l'Iran aux Caraïbes, une puissance qui au contraire de la Russie et de la Chine a déjà frappé les bases US et pas une, mais des dizaines de fois est à caractère dissuasif. 

Et de poursuivre : "Ces dernières années, l'Iran a dévoilé plusieurs véhicules aériens sans pilote d'une autonomie d'environ 2 000 kilomètres qui peuvent facilement atteindre l'État américain de Floride depuis le Venezuela. Il est raisonnable de supposer que le CGRI maintient du personnel au Venezuela qui peut être des conseillers militaires ou techniques. Il y a peu une vidéo a été publiée mettant en scène l'ex-président US, Trump en train de jouer sur son terrain de golf alors qu'un UAV en forme Delta, identique à RQ-170 s'en approchait. Et on lisait dessus "le moment de vengeance s'approche". Beaucoup y ont vu un plan de préparation de liquidation des personnes impliquées dans l'assassinant du général iranien Soleimani. Même Pompeo, ex-secrétaire d'État s'en est inquiétait... Les vœux particulièrement sincères de Maduro aux Iraniens ne devraient pas être trop rassurants ni pour la CIA, ni pour le Pentagone, ni pour le département d'État. C'est peut-être par crainte de voir une base aérienne US frappée en plein territoire US que Biden veut un accord et au plus vite et à n'importe quel prix avec l'Iran".

Partager Cet Article
SOURCE: FRENCH PRESS TV