Curieux retournement de tendance au palais du Sultan : Outre d’avoir il y a peu accusé les Etats Unis d’être à l’origine de tous « les maux en Irak et en Syrie », et affirmé noir sur blanc qu’il n’a rien contre Assad puis envoyer ses lieutenants négocier avec Damas un possible retour à l’accord d’Adena propre à aplanir le terrain à un rapatriement des réfugiés syriens, le Sultan Erdogan vient de jeter la pavée dans le marre en exigeants à ses chefs terroristes de quitter le territoire syrien. Dans la foulée d'une série d'efforts pour reconsidérer ses relations avec Damas, le gouvernement d'Ankara a appelé la coalition de l'opposition syrienne à quitter la Turquie, selon des sources bien informées qui ont confirmé qu'alors qu'Ankara tentait de reconsidérer ses liens avec Damas, elle avait exigé que « les principales figures de la coalition de l'opposition syrienne » quittent la Turquie.
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Puis le Sultan aurait exigé que les médias affiliés à « l'opposition syrienne » changent de ton à l'égard du gouvernement d'Ankara et qu’ils abandonnent ce langage très dur qu’ils utilisent contre Damas ; à peu près de la même manière qu’envers l’Egypte quand Ankara avait décidé de tenter une reprise avec Sissi. Et qu’est-ce qu’ils ont répondu les « opposants syriens » ? Selon des sources bien informées, ils ont, lors de cette réunion, accepté la demande d'Ankara de quitter la Turquie. Ainsi, le chef de la coalition de l'opposition syrienne, Salim al-Muslat, a proposé qu'ils se réinstallent en Arabie saoudite, mais Abdulrahman Mustafa, le chef du gouvernement intérimaire (l'organe administratif fournissant des services dans les régions placées sous mandat de la Turquie dans le nord de la Syrie) a proposé la Jordanie pour la migration. Cependant, il a admis que leurs activités seront encore limitées en Jordanie.
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Mais que fait au juste Erdogan ? se priver de l’un des leviers les plus magnifiques qu’il s’était offert sur le dos de ses voisins syrien et irakien et au nom de la lutte contre un PKK qui n’existe plus et qui pour le reste l’aide à détourner les richesses pétrolières syro-irakienne au profit d’Israel, levier de pression qui a permis d’exporter son influence au-delà des frontières mêmes du Moyen Orient en Afrique en Europe de l’est car le mercenariat terroriste pro Turquie a eu des bras bien trop long en couvrant des territoires aussi variés que la Libye, le Sahel, l’Ukraine et l’Asie centrale entre autres.
Mais pourquoi agir de la sorte ? Il faut être naïf pour voir en funambulesque Erdogan l’homme à vouloir restaurer réellement une politique « zéro problème avec ses voisins »politique qu’il a lui même mis en miette en 2011 pour cause de son alignement total sur l’OTAN, alignement qui ne s’est jamais démenti même en période préélectorale actuelle maquée par une dépréciation de la livre, une économie en berne et une opposition turque qui arrive bien plus facilement qu’il y a quelques années a bien convaincre le Turc lambda que les années d’Erdogan n’auraient été pour la Turquie qu’une descente dorée dans l’enfer et qu’une fois l’or parti, c’est avec le feu que les Turcs devront être aux prises.
Il y a d’abord le fait que la Syrie a bien gagné contre les agresseurs, et qu’au point où en sont les choses toute obstination de la part d’Ankara risque de placer la Turquie en face de la Résistance celle-ci ayant commencé à engager des attaques directes contre les bases US en Syrie et ce suivant une équation qui fait payer à l’Amérique et à ses troupes d’occupation à Deir ez-Zor et à Hassake les frappes de l’armée de l’air israélienne contre le territoire syrien.
Mais il y a plus : un peu à Téhéran puis à Sotchi, Iraniens et Russes ont fait transmettre à Erdogan des données classifiées comme quoi l’Etat profond travaille non seulement à la création d’un Etat indépendant kurd sunnite dans le nord-est de la Syrie mais encore à un autre Etat sunnite dans le nord syrien juste limitrophe à la Turquie dont la mission serait de provoquer le démembrement turc. Au fait ces deux millions de réfugiés dont le Sultan s’est mis soudain à vouloir se débarrasser allant jusqu’à jeter aux orties sa haine anti Assad lui paraissent désormais comme le noyau de ce second Etat sunnite, ce qui explique entre autre son feu vert au retour des Syriens à domicile.
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Mais ce n’est pas tout : car au train où vont les évènements entre Russie et OTAN, « l’en même temps » du Sultan commence à intriguer. Avec une base nucléaire placée en pleine Turquie et qui offre un front atomique potentiel contre la Russie et ses bases sur la côte ouest syrienne, l’Occident peut-il réellement ne pas penser à une bataille nucléaire anti russe, seule qui lui semble être à même de trancher l’état du conflit actuel, seule à avoir pour le décor non pas l’Europe est ou l’Europe ouest mais bien le flanc sud de la Méditerranée juste en face du Moyen Orient ?
Sauf que trop de mal a été fait pour que le camp d’en face prenne les promesses du Sultan pour l’argent comptant. Alors la Turquie prise au piège de sa propre confiance envers l'axe US/OTAN? A n'en pas douter : l'une des fiertés du Sultan, Bayraktar, ce drone sorti des usines de son gendre, Seljouk et qu'on sait être une compilation des pièces fabriquées dans les pays anglo-saxons de l'OTAN ainsi que 700 autres projets de fabrication d'armement sont désormais, l'économie turque étant l'otage de ses dettes. Clin d'oeil à cette Turquie atlantiste qui disait compter sur l'OTAN pour renforcer ses défenses. Au fait une défense otanienne, cela veut dire faire de la Turquie un terrain direct de guerre nucléaire.