En pleine épreuve de force en mer de Chine face à la puissante marine chinoise, les USA qui ont massé un quart de leur flotte de guerre aux portes de la Chine et vont de manœuvres hybrides en exercices conjugués, devraient être bien surpris: en effet, pour avoir depuis toujours affiché un soutien clair à l'Iran, la Chine n'a jamais été aussi pro-Iran que ces temps-ci : non seulement à l'AIEA où elle a condamné sans aucune forme de procès le dernier texte du trio de vassaux européens de Washington contre l'Iran parfaitement basé sur les rapports du Mossad, mais encore au sein du Conseil de sécurité où avec la Russie, Pékin affirme très clairement ne veut pas entendre parler d'une prolongation de l'embargo sur la vente d'armes à l'Iran.
Pour l'Iran, la Chine a définitivement rompu avec sa réserve habituelle. Pour les analystes, il y a des raisons géopolitiques à cet état de . Du 27 décembre 2019 où l'Empire du Milieu a tenu un exercice naval conjoint de trois jours avec l'Iran et la Russie, au 25 mai 2020 où l'Iran a commencé à explorer le corridor maritime anti-sanctions Est-Ouest en envoyant ses cinq navires-citernes aux Caraïbes, auxquels vient de s'ajouter un sixième, beaucoup d'eau ont coulé sous les ponts irano-chinois, tous convergents vers ce qui semble à deux parties une nécessité, celle de cerner puis de délimiter l'aventurisme politique, militaire US avec en toile de fond des démonstrations de force sporadiques : dans le golfe Persique, le CGRI a agi dans ce sens. En mer de Chine, la marine chinoise en fait de même.
Sur le plan diplomatique, jamais la littérature chinoise n'a été aussi iranophile. Évoquant le retrait américain du Plan global d’action conjointe (PGAC), le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a ainsi souligné que les États-Unis "n’avaient pas le droit de demander au Conseil de sécurité de l'ONU de rétablir les sanctions contre l'Iran". Un quasi-avertissement qui en dit long sur la dynamique de rapprochement Téhéran-Pékin qui tourne à plein régime et qui vient de faire dire à l'ambassadeur iranien à Pékin que " l'Iran n'oubliera jamais l'appui ferme de la Chine" à sa cause au sein du Conseil des gouverneurs.
Ce fut lors d'un point de presse, lundi, que Zhao Lijian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a réitéré "l'opposition radicale" de Pékin, à "l'interprétation américaine de l'accord nucléaire de Vienne (PGAC) : « Washington n'a pas le droit de se référer au "mécanisme de règlement des différends (MRD) " pour rétablir les sanctions du Conseil de sécurité contre l'Iran puisqu'il ne fait plus partie de l'accord », a affirmé Zhao Lijian en suscitant la grande surprise des Américains et des Européens, rien que par la violence de sa verve.
« Nous nous opposons aux sanctions unilatérales et aux interventions judiciaires. Nous demandons aux États-Unis de retourner au PGAC et à la résolution du Conseil de sécurité », a-t-il ajouté. Cette sortie, parfaitement pro-Iran et anti-US, intervient alors que les États-Unis tentent de prolonger l'embargo sur la vente d'armes à l'Iran, et qu'ils viennent de distribuer l'avant-texte d'une résolution en ce sens, ce lundi au Conseil de sécurité. Évidemment le texte se réfère comme celui du trio européen voté début de la semaine à un tissu de contre-vérités dont les allégations concernant l'implication dans des attaques de 2019 d'Ansarallah contre l'Arabie saoudite. Soutenus depuis vendredi par la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, les États-Unis devraient utiliser une réunion semestrielle du Conseil de sécurité prévue le 30 juin pour "défendre" leur projet, auquel s’opposeront évidemment la Russie et la Chine.
Pour les experts, cette synergie sino-iranienne renvoie évidemment à un vaste projet géostratégique avec en toile de fond la présence économique et militaire grandissante de la Chine dans le golfe Persqiue, présence que le chef de CentCom a qualifiée de "plus dangereuse que celle de la Russie". Ceci étant, cette présence chinoise au cœur de l'Asie centrale aura une contrepartie iranienne : le renforcement de la présence iranienne dans les océans. Depuis que l'Iran a créé avec la Chine le vaste corridor maritime Est-Ouest en envoyant ses navires au Venezuela, plus rien ne semble pouvoir l'arrêter. Certains milieux évoquent déjà l'idée d'une coopération plus large de la Chine avec l'axe de la Résistance en mer Rouge où Ansarallah du Yémen mène la vie dure aux Américains et à leurs alliés et où l'Amérique vient de créer plusieurs bases".