TV
Infos   /   A La Une   /   Iran   /   Moyen-Orient   /   Amériques   /   L’INFO EN CONTINU   /   Point de Vue

Pourquoi la République islamique est la cible favorite de l'élite libérale?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le drapeau de la République islamique d'Iran (Photo d'archives)

Par Xavier Villar

Il est impossible de comprendre l'approche occidentale sur la République islamique d'Iran sans jeter un regard analytique sur l'opinion que les Occidentaux se font de ce pays.

Les Occidentaux, mais aussi l'élite libérale orientée vers l'Occident qui vit en Iran, peuvent considérer l'ordre politique de la République islamique comme une sorte d'aberration. Pour eux, un système politique fondé sur l'Islam ne saurait se concilier avec les valeurs libérales de la soi-disant communauté internationale. Plus de détails dans les lignes qui suivent écrites par Xavier Villar, retraduites en français.

Selon le point de vue occidental, la fondation de la République islamique en 1979 a été un "scandale" qui a donné vie à une vision du monde différente des autres langues et horizons politiques.

Pour ces soi-disant libéraux vivant en Iran, la République islamique, depuis sa fondation, est un "régime illégitime" qui s'écarte des valeurs libérales, car elle représente une alternative à cette tendance occidentale.

Concentrons-nous sur le terme "libéral". Nous pouvons dire qu'ils veulent transformer la République islamique en un État "normal". Et ils pensent qu'ils atteindront cet objectif grâce à un "dialogue sincère" avec l'Occident. Toutefois, le problème de la "sincérité" est qu'elle ne tient pas compte de la répartition grossièrement inégale du pouvoir et de la question raciale.

Un tel dialogue a un objectif clair : empêcher la possibilité de configurations alternatives du pouvoir. Ainsi, pour les libéraux, ce dialogue ne peut avoir lieu qu'en suivant le langage hégémonique de l'Occident. Si un groupe de personnes décide de dialoguer en dehors de ce cadre normatif, l'élite "libérale" le qualifie d'"irrationnel".

Seuls les êtres humains sont capables de pensée rationnelle, et la rationalité est l'une des caractéristiques du libéralisme, donc seuls les libéraux peuvent être humains. En dehors du consensus normatif, c'est là que l'on trouve ceux qui sont considérés comme irrationnels et, par extension, "non-humains".

Ces "non-humains" sont dépeints comme une menace ou comme des indisciplinés, ce qui constitue clairement un processus d'exclusion et de racialisation. C'est dans cet espace d'exclusion que se trouve la République islamique.

Les libéraux, à l'intérieur et à l'extérieur du pays, sont aveugles aux fondements raciaux du libéralisme. Ils parlent des avantages du libéralisme mais ne prennent jamais la peine d'expliquer qui en bénéficie et pourquoi. En d'autres termes, ils choisissent de ne pas prêter attention au processus d'exclusion qui sous-tend la théorie libérale. Mais cette exclusion est très claire. Il leur suffit de prêter attention à la théorie libérale elle-même.

Dans ce sens, Stuart Mill, l'un des fondateurs de la théorie libérale, présente les avantages du libéralisme sous une forme résolument raciale. Selon Mill, la démocratie n'est un avantage que pour les Occidentaux, tandis que pour ceux qui ne sont pas occidentaux, la seule option disponible est le despotisme.

Il est clair que le despotisme est une forme légitime de gouvernement contre les "barbares".

L'un des pères fondateurs du libéralisme et une personne citée par Mohammad Khatami dans une interview sur CNN en 1998, Alexis de Tocqueville, suit la même exclusion raciale. 

L'auteur de "La démocratie en Amérique" parle de la démocratie en termes exclusifs. Il défend une démocratie raciale en Occident et soutient la tyrannie à l'étranger. Le livre de de Tocqueville n'est qu'une facette de sa vision libérale, la facette la plus sombre de sa vision impériale est celle que Khatami a choisi d'ignorer.

On peut dire que Khatami a décidé d'ignorer la principale question à la base du libéralisme : qui est un être humain ? En ignorant cette question vitale, il s'est rangé du côté du langage hégémonique du libéralisme.

L'oubli libéral fait en effet partie de son récit. Un autre exemple peut être présenté dans la catégorie de la "tolérance", un autre prétendu fondement du libéralisme. La tolérance n'est pas l'un de ces avantages "universels" dont tout le monde peut bénéficier, mais elle est aussi une construction raciale. Seuls ceux qui font déjà partie du courant dominant libéral peuvent en profiter. Les non-libéraux doivent endurer une violence brutale au nom de la tolérance.

La République islamique, bien sûr, est considérée comme un régime politique non tolérant. La tolérance contre l'intolérance, le pathologique et le non pathologique sont autant d'itérations de la différence raciale sur laquelle le libéralisme est construit.

Hamid Dabashi, libéral convaincu et partisan de la tentative de changement de régime en Iran en 2009, appartient également à ce groupe de personnes qui détournent le regard de l'exclusion raciale du libéralisme.

Dabashi est un personnage important car il a une aura de progressisme qui masque ses opinions libérales. Mais si nous regardons un peu plus profondément dans ses œuvres, nous pouvons trouver un discours libéral partout.

Il ne prête jamais attention à la fracture raciale, ni à la façon dont le pouvoir fonctionne selon la même théorie de l'exclusion raciale. Pour Dabashi, l'opposition entre l'Islam et l'Occident est une erreur qui pourrait être résolue par un dialogue global mené dans le langage du libéralisme et destiné à empêcher l'émergence d'alternatives politiques dans l'état actuel.

Le libéralisme n'est pas une langue parmi d'autres. C'est un langage qui se veut universel, mais cette universalité a des limites raciales. Respect et tolérance pour l'Occident, brutalité et terreur pour tous les autres.

La "guerre contre le terrorisme" n'est pas une déviation de la vision libérale. L'absence d'alternatives politiques dans le libéralisme est essentiellement ce qui le rend possible.

Toute tentative de confrontation avec le libéralisme signifie violence et mort lente pour ceux qui résistent aux impulsions homogénéisantes du libéralisme.

La République islamique, en raison de ses configurations politiques, est ainsi devenue une cible idéale. En tant qu'entité politique islamique, la République islamique est construite comme " le contraire " du libéralisme, ce qui mérite soit une destruction politique totale, soit une conversion.

Xavier Villar est chercheur et docteur en études islamiques.

(Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)

Partager Cet Article
SOURCE: FRENCH PRESS TV