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Syrie : et si Erdogan refuse de jouer le jeu après le vibrant avertissement iranien?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Erdogan (Archives)

Et Erdogan, 24 heures après le Sommet de Téhéran qui accueille en ce moment même le ministre syrien des A.E, va-t-il finir par dire oui à l'offre iranienne de paix avec Damas? Il est vrai que la mise en garde trop directe de la plus haute instance décisionnelle de l'Iran à un président turc qui tend trop à se jouer de la sécurité de ses voisins, souvent au détriment de la sécurité même de la Turquie a été sans précédent et que le Sultan a tout intérêt à prendre cette offre avant que son suivisme envers l'axe US/OTAN ne le conduise à un clash direct avec la Résistance, clash qui n'est d'ailleurs pas sans précédent puisqu'en 2020, alors même que le Sultan projetait là encore à l'instigation de Trump de s'emparer de Saraqeeb, localité ultra stratégique située au confluent de M4/M5, il a été littéralement mis KO par les unités Radwan du Hezbollah, et ce, en trois heures. Aussi, quand le Leader iranien lui rappelle que toute offensive turque contre le nord de la Syrie va au détriment d'abord de la Turquie, puis de la Syrie et de la région et qu'elle ne servira que les intérêts des terroristes, le président devra s'en faire une raison. Va-t-il lâcher le camp US/OTAN/Israël? Le quotidien Al Akhbar pèse le pour et le contre. 

« Contrairement aux initiatives précédentes, qu'elles soient russes ou iraniennes, Téhéran avance, cette fois, avec le soutien de Moscou, à grands pas pour ouvrir le huis clos entre Damas et Ankara, à travers une voie claire et équilibrée qui semble préserver leurs intérêts pour toutes les parties », a écrit le journal libanais Al-Akhbar : " le chemin qui a mené à la rencontre du Leader de la Révolution islamique, l'Ayatollah Ali Khamenei avec le président Recep Tayyip Erdogan a été pour ce dernier un tournant, dans la mesure où il s'agit d'une médiation iranienne entre Ankara et Damas et qui s'inscrit dans un cycle de diplomatie iranienne  commencé avec la visite du président Bachar Assad à Téhéran et sa rencontre avec l’Ayatollah Khamenei en mai dernier, cycle suivi par des actions ultérieures toutes venues de la part de l'Iran et destinées à désamorcer la tension suscitée par la menace d'Ankara de lancer une nouvelle opération armée dans le nord de la Syrie.

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Or ces actions semblent bloquer l'intention turque de se jeter dans l'aventure et cette tendance vient de toucher son apogée après l'avertissement de l’Ayatollah Khamenei à Erdogan comme quoi « la sécurité de la Turquie est inhérente à la sécurité de la Syrie » ou ce qui revient au même toute agression turque contre la Syrie serait ripostée par Damas.

Et le journal d'ajouter : " Lundi, la Russie a envoyé le commandant en chef de ses forces en Syrie pour rencontrer les dirigeants des FDS qui ont accepté en principe de se retirer de l'ensemble de la route M4 et de la remettre à l'armée syrienne, ce qui établirait une nouvelle réalité de terrain, à la lumière de quoi elle ne restera aucune excuse à Ankara pour lancer son offensive. Il va sans dire que les résultats du sommet tripartite de Téhéran entre les présidents russe, iranien et turc sont décisifs quant au sort de l'opération militaire turque attendue dans le nord de la Syrie, ainsi qu'en termes de possibilité de son lancement ou de son report, bref que c'est ce même sommet qui fournira l'ultime occasion à Erdogan de cesser ses folies ou d'aller à la guerre.

A la veille du sommet, les parties russe et iranienne avaient fait preuve en effet d'un haut niveau de coordination pour lever toutes les divergences et établir une nouvelle réalité sur le terrain dans le nord de la Syrie. Il est probable que les Russes et les Iraniens aient informé les Turcs, lors de la réunion, des mouvements récents dans le nord, et de la nouvelle carte du déploiement de l'armée syrienne et de ses alliés dans la zone s'étendant de Tal Rifaat, en passant par Manbij et Ain al-Arab, jusqu'à Ain Issa, dans le but de pousser Ankara d'abandonner son opération, les forces pro Résistant ayant pris position dans ces zones à renfort des unités blindées, des drones, tous près à passer à l'acte. 

Lors des réunions de Téhéran, l’Iran a affiché son intérêt quant à la nécessité d'établir une réconciliation entre Damas et Ankara, basée sur l'idée de renforcer la coopération sécuritaire, et de trouver des points communs qui aplanissent progressivement les différences, et rétablissement les relations entre les deux pays, notamment à la lumière des indications selon lesquelles l'Iran a obtenu déjà le feu vert de la Syrie pour mener à bien ses efforts, comme en témoigne également la rencontre de ce mardi du ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian avec son homologue syrien Fayçal Miqdad. 

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« Autre évolution c'est que parallèlement au sommet de Téhéran, la Russie a dépêché son plus haut commandant  en Syrie à Qamichli pour rencontrer les dirigeants des FDS, et ce, dans le but de s'assurer qu'il y ait une communication avec toutes les parties concernées qui permettrait des compréhensions souhaitées. Les Russes, avec leurs alliés syriens et iraniens, avaient pris une série de mesures sur le terrain, dans le but de dissuader la Turquie de mettre à exécution ses menaces et surtout de lui ôter tout prétexte, en envoyant des renforts sur les lignes de contact dans la campagne de Raqqa et d'Alep, tandis que Moscou poussait dans le sens d'un accord préliminaire entre l'armée syrienne et les FDS pour achever le déploiement de plus de forces aux frontières, le but étant d'éloigner les Kurdes des frontières turques », précise le journal.

Puis la Russie n'en est pas restée là, et elle travaille plutôt à achever le processus de déploiement de l'armée syrienne sur la route M4, en vue de rassurer les Turcs quant à l’évacuation des FDS en application de l'accord de Sotchi, leur demandant en retour de mettre en œuvre leurs engagements pris à Idlib, à défaut de quoi une nouvelle opération militaire sera lancée à Idlib. Les Russes estiment que le contrôle de l’armée syrienne sur le tronçon de la route internationale s'étendant de la campagne d'Alep à Raqqa, est un facteur susceptible d'empêcher l'opération militaire turque et une carte importante pour exiger qu'Ankara mette en œuvre ses promesses d'expulser les terroristes et de les désarmer dans la campagne d'Idlib, et d'ouvrir les routes Alep-Lattaquié et Alep-Hama aux civils et aux convois commerciaux. Et elle n'a pas tort. 

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Ceci étant dit, lors de la rencontre entre le Leader iranien et le président turc, mardi 19 juillet à Téhéran, l’Ayatollah Khamenei a adressé un vibrant avertissement très important à Erdogan :  l'opération contre le nord de la Syrie va à l'encontre des intérêts de la Turquie et sera à son détriment. De l’avis des analystes politiques, cette franchise est  sans précédent, et indique la détermination de l'Iran à empêcher la Turquie de déstabiliser les frontières de ses voisins et alliés.

La mauvaise foi d'Erdogan est une longue histoire ; d'ailleurs, en 2012, l'Ayatollah Khamenei avait prévenu les Turcs que l'Iran ne laisserait pas que le gouvernement de Bachar Assad soit renversé et qu'il valait mieux qu'Ankara reconsidère sa politique, mais ils n’y ont fait aucun cas. Les propos de ce mardi de l'Ayatollah Khamenei à l’adresse d’Erdogan, parallèlement au renforcement des forces affiliées à l'Iran dans le nord de la Syrie, peuvent être considérés comme un ultimatum iranien à Ankara. Erdogan en fera-t-il une raison? C'est ce qu'on saura dans les jours à venir. "

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SOURCE: FRENCH PRESS TV