Recep Tayyip Erdogan souhaite, depuis longtemps, mettre en place une zone tampon dans le nord de la Syrie, un souhait renforcé par les propos du nouveau président des États-Unis Donald Trump qui semble vouloir la même chose.
L’idée de créer une zone tampon dans le nord de la Syrie est évoquée, depuis des mois, par la Turquie et le président Recep Tayyip Erdogan parle d’une superficie entre 4 000 et 5 000 kilomètres carrés.
Dans la foulée, le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu a précisé, mercredi 15 février, que l’idée de la création d’une zone tampon devrait se concrétiser dans les plus brefs délais afin d’accueillir des milliers de déplacés syriens. Mais est-ce vraiment dans le sens de cet objectif que la Turquie fait tout pour réaliser ce projet controversé ? Un plan parrainé aussi par les États-Unis, Israël, le Qatar et l’Arabie saoudite.
Le projet du président Erdogan prévoit la mise en place d’une zone sécurisée dans le nord de la Syrie où seront hébergés des réfugiés syriens parmi lesquels les hommes ayant entre 18 et 42 ans seront soumis à un service militaire obligatoire. Ils seront familiarisés avec des armes de tout type, voire des armes lourdes et recevront des formations militaires en Turquie auprès des officiers américains et européens et auront pour mission de combattre les terroristes de Daech et les miliciens kurdes.
Ce dangereux scénario permettrait la formation d’une troupe composée de 819 000 combattants, sous le commandement de la Turquie. Pire encore, le gouvernement syrien n’aura pas le droit de protester contre la présence d’une telle armée sur son territoire en raison de sa mission affichée: la « lutte antiterroriste ». Par ailleurs, le président Erdogan promet la nationalité turque aux réfugiés syriens qui rejoindront cette armée.
La Turquie a acheminé, en novembre dernier, ses militaires en Syrie afin de reprendre aux terroristes de Daech la ville d’al-Bab alors que le gouvernement turc comptait parmi les principaux alliés de ce groupe terroriste depuis le début de la crise en Syrie.
Ankara connaît bel et bien l’importance toute particulière que revêt al-Bab pour les Kurdes syriens. Ces derniers pourront unifier leurs territoires dans le Nord syrien, une fois qu’ils s’empareront d’al-Bab. La ville se trouve à 30 kilomètres des frontières turques et elle est près des routes reliant l’ouest de la Syrie à l’est.
Le Premier ministre turc Binali Yildirim a fait part, mardi 14 février, de la reprise d’une grande partie d’al-Bab par les militaires turcs et les forces du Bouclier de l’Euphrate mais ses déclarations ont été rejetées par les sources syriennes et kurdes.
Dans la foulée, les sites web proches des groupes terroristes ont rejeté les propos de Recep Tayyip Erdogan qui a prétendu, lundi 13 février, la fin imminente de l’opération des Turcs à al-Bab.
D’autre part, alors que les responsables turcs tentent de suggérer que l’opération Bouclier de l’Euphrate a pour objectif de combattre Daech et les kurdes, des centaines d’habitants d’al-Bab ont été récemment tués par les attaques militaires de l’armée turque. 24 civils dont 11 enfants ont été tués, en la seule journée du jeudi 16 février, par une attaque à l’artillerie de l’armée turque contre un quartier de la ville.
Au lendemain de ce massacre, l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), un organisme d'information associé à l'opposition syrienne, a fait part du massacre « intentionnel » des centaines de civils à al-Bab par l’armée turque.
Selon le même rapport, au moins 419 et 328 civils ont été tués respectivement à l’intérieur et à l’extérieur d’al-Bab par les militaires turcs. Aucune des victimes n’était liée à Daech.
Reste à savoir si l’élimination des civils d’al-Bab serait en lien avec l’idée de créer une zone tampon dans le nord syrien, une zone qui abriterait, comme Erdogan le désire, une armée de 800 000 effectifs sous le commandement de la Turquie.