« La diplomatie repose sur la compréhension des rapports de force et des marges de manœuvre. Une diplomatie active est donc celle qui cherche à étendre ces marges de manœuvre dans les rapports de force. » C’est à partir de ces concepts que le journaliste arabe Nasser Kandil essaie d’éclaircir la diplomatie russe en Syrie, dans une note parue dans le journal libanais Al-Binaa.
« Depuis le début de la crise en Syrie, l’objectif de la diplomatie russe consiste à empêcher l’intervention militaire occidentale dans ce pays; les multiples vetos apposés par la Russie aux projets de résolution américains contre Damas au sein du Conseil de sécurité s’inscrivent dans le cadre de cette politique », a-t-il écrit.
À travers cette politique, la Russie était sûre de pouvoir consolider la position du gouvernement de Bachar al-Assad. Ce qui, par la suite, permettait à Moscou de prendre position, sur le plan militaire, aux côtés de Damas qui avait pour alliés l’Iran et la Résistance.
« Alors que Washington était plongé dans l'illusion du pouvoir et menaçait de sanctionner les parties qui outrepasseraient les "lignes rouges", les Russes, grâce à un rôle diplomatique et militaire pendant une période de 30 mois, ont réussi à redéfinir des marges de manœuvres auxquelles contribuaient deux facteurs importants: l’endurance du peuple et de l’armée syriens et le rôle de l’Iran et de l’axe de la Résistance.
Pendant ce temps, Washington tentait d’imposer un scénario à l’israélienne qui consistait à déstabiliser la Syrie, en empêchant de Hezbollah de s’imposer. Or, Moscou a mis les Israéliens devant un dilemme: accepter la souveraineté syrienne sur toute l’étendue géographique de la Syrie et éviter la guerre, ou reprendre par force les frontières communes avec la Syrie, quitte à voir s’installer les forces de l’Iran et du Hezbollah le long des frontières », a expliqué Nasser Kandil.
L’article fait ensuite allusion aux complexités qui caractérisent les débats au sein des milieux politico-diplomatiques au sujet du « rôle régional et international » de l’Iran. Le discours américano-saoudo-israélien tente d’intégrer cette question aux discussions portant sur le Plan global d’action conjoint (PGAC, accord signé en 2015 sur le nucléaire iranien). On pourrait même dire que le retrait unilatéral des États-Unis de l’accord nucléaire était une tentative de revenir vers leur objectif premier, autrement dit le renversement du gouvernement de Bachar al-Assad.
« Mais dans les circonstances actuelles et eu égard à la présence russe en Syrie, la situation dans ce pays ne reviendra pas à ce qu’elle fut dans le passé; car, il est pratiquement impossible de revenir en arrière dans le temps », écrit le journaliste qui ajoute: « Le rapprochement Russie-Europe pour soutenir l’accord nucléaire permettra à Moscou de redynamiser sa diplomatie en faveur de son plan eurasiatique, en insistant sur les intérêts communs avec l’Europe.
La Russie évite intelligemment un amalgame entre deux dossiers bien distincts, l'un sur l'Iran et l'autre sur la Syrie, de la même manière qu’elle essaie de séparer le dossier syrien de la question palestinienne et de la sécurité d’Israël.
Moscou ne doute pas que la sauvegarde de la sécurité d’Israël est vitale pour Washington et Tel-Aviv. Sinon ils devront s'accommoder à la présence renforcée de l’Iran et du Hezbollah, indispensable à la Syrie pour protéger son territoire et ses frontières géographiques. »
« C’est dans de telles circonstances que le ministre russe des Affaires étrangères a effectué une visite en Corée du Nord afin de redéfinir les garanties de sécurité pour ce pays. Mais y a-t-il une garantie pour qu’un accord avec la Corée du Nord ne connaisse pas le même sort que l’accord sur le nucléaire iranien ? », a-t-il conclu.