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La loi anti-inflation américaine et la fin de « Made in Europe » 

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le four de l'usine Duralex près d'Orléans, en France, est en mode "hibernation" jusqu'en avril . ©Politico

Le coût de l’énergie -porté à des niveaux records en 2022 à la suite de l’opération spéciale russe en Ukraine et la fermeture de gazoducs vitaux- est devenu trop élevé pour que de nombreuses entreprises manufacturières restent compétitives, si elles restent en Europe. Dans le même temps, un vaste ensemble de subventions américaines pour l'industrie verte a choqué et irrité les responsables de l'UE, qui voient les États-Unis - un allié supposé - inciter les entreprises à se délocaliser outre-Atlantique.

Selon la revue Politico, dans un tel contexte déjà critique, les alliés européens de Washington sont en colère et désagréablement surpris par une loi américaine, la soi-disant loi anti-inflation, IRA, qui, sur le papier, vise à soutenir les industries vertes.

En effet, ce paquet de mesures de près de 400 milliards de dollars pour le climat et la santé, comme le définit l’administration Biden, met en danger les industriels européens. Les subventions ne seront versées que pour des produits fabriqués aux Etats-Unis. Les Européens craignent surtout des délocalisations massives d’entreprises européennes ou américaines ayant investi en Europe et qui préféreront fabriquer sur le sol américain pour pouvoir bénéficier de ces aides.

D’après Politico, la crise énergétique pèse lourdement sur les secteurs comme le verre, les produits chimiques, les métaux, les engrais, le papier, la céramique et le ciment, qui sont gourmands en énergie afin de pouvoir maintenir leur production à niveau industriel -et emploient à eux deux 8 millions de personnes.

Face à la concurrence économique toujours croissante entre la Chine et les États-Unis, désormais de plus en plus protectionnistes, les dirigeants européens mettent ouvertement en garde contre une contagion de la « désindustrialisation » affectant l’ensemble de la fabrication à travers le continent, ajoute Politico.

« Compte tenu des actions des États-Unis et de la Chine, nous voyons le danger réel de la désindustrialisation et du désinvestissement », a déclaré un haut responsable de la Commission européenne, cité par Politico.

« Perdre de la capacité de fabrication signifie perdre des emplois, et cela a des "conséquences politiques », affirme Luc Triangle, secrétaire général du syndicat européen IndustriALL, qui représente des dizaines de millions de travailleurs dans au moins 140 pays, travaillant dans différents secteurs.

« Nous n'exagérons pas lorsque nous disons que l’industrie européenne - à commencer par les industries énergivores en première ligne - est confrontée à une crise existentielle », a déclaré Triangle. La même menace « existentielle » s’applique aux 8 millions de travailleurs du secteur à forte intensité énergétique, a averti IndustriALL.

Dans un e-mail adressé au personnel à l’occasion du Nouvel An, dont Politico affirme avoir vu une copie, le commissaire européen en charge du marché intérieur, Thierry Breton, a désigné les efforts visant à stimuler la compétitivité mondiale de l’Europe comme « une priorité absolue » pour l’année 2023.

« Les prix élevés de l’énergie en Europe continueront d’affecter nos concitoyens, mais aussi des chaînes d’approvisionnement industrielles entières et les MAE [les petites et moyennes entreprises] », a écrit Breton. « Dans le même temps, la Chine, les États-Unis et d’autres pays tentent, non sans succès, d’attirer nos capacités industrielles », ajoute-t-il.

« Sans une base manufacturière solide », précise clairement le courrier électronique de Breton, « la sécurité d’approvisionnement, la capacité d’exportation et la création d’emplois de l’Europe sont menacées ».

En décembre, l’industrie manufacturière européenne en général et la puissance industrielle du continent en particulier d’Allemagne avait résisté à la pire crise énergétique hivernale, réduisant la consommation de gaz d’environ 15 % sans baisse correspondante de la production globale.

Mais avec des prix du gaz - malgré les chutes récentes- toujours environ six fois plus élevés que le prix moyen des 10 dernières années, et plus de quatre fois plus élevés que dans des pays concurrents comme les États-Unis, beaucoup craignent encore que les grandes entreprises ne se contentent que de délocaliser leurs opérations en dehors de l'Europe, tandis que les petites entreprises pourraient se replier entièrement, écrit Politico.

Les avertissements s’enchaînent sur le risque de l’anéantissement de l’industrie européenne et on entend beaucoup parler des appels à prendre les mesures coordonnées et immédiates au niveau de l’UE. Certains pays d’Europe tels que l’Allemagne et la France ont même alloué des subventions pour sauver leurs industries, or le secteur manufacturier y reste toujours aux prises avec une crise existentielle. Pire encore, la crise pourrait s’aggraver davantage en hiver, conclut la revue Politico.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV