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Ce que va perdre la Turquie atlantiste

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le président turc Recep Tayyip Erdogan. ©Euronews/Archives

Le site d’analyse Al-Monitor a publié une note du journaliste turc Semih Idiz, intitulée « Les éloges pour la médiation d’Erdogan dans l’accord céréalier ukrainien ont leurs limites ». L’auteur estime que l’initiative commune de l’ONU et de la Turquie pour faire la médiation entre la Russie et l’Ukraine pourrait ne pas donner au président turc, Recep Tayyip Erdogan, l’élan diplomatique qu’il attend.

Semih Idiz rappelle que le président turc a reçu de nombreux éloges pour l’accord qu’il a co-négocié avec le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres à Istanbul le 22 juillet pour que les céréales ukrainiennes atteignent les marchés mondiaux.

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L’auteur ajoute que les partisans d’Erdogan le présentent comme le leader qui a sauvé le monde de la famine, et il essaiera d’utiliser cela à son avantage dans la politique intérieure de la Turquie où les doutes augmentent sur la compétence de son gouvernement.

Ses conseillers espèrent que cela renforcera le soutien intérieur, affaibli à l’approche des élections présidentielles de l’année prochaine. Le soutien public à Erdogan a diminué en raison de l’effondrement économique de la Turquie, principalement à cause de ses politiques peu orthodoxes.

Les félicitations exprimées par l’Occident pour son rôle de médiateur auprès du secrétaire général de l’ONU sont le type de réussite qu’il recherche pour améliorer son image internationale aussi.

Reste à savoir s’il peut s’appuyer sur cet accord pour améliorer son image ternie aux États-Unis et en Europe et réussir à jeter les bases d’une amélioration des relations avec l’Occident.

Michael Crowley du New York Times a parlé de l’ambiance à Washington dans le titre de son article du 23 juillet : « Le dirigeant turc reste un casse-tête pour Biden malgré son aide à l’accord avec l’Ukraine ».

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Crowley écrit : « En général, les actions de M. Erdogan –et la capacité limitée de M. Biden à les contenir– soulignent la position unique du dirigeant turc en tant qu’allié militaire souvent en contradiction avec l’agenda de ses alliés occidentaux. »

Les pertes stratégiques que la Turquie a subies en raison des obsessions d’Erdogan comprennent l’expulsion de son pays du programme d’avions de combat F-35, car il a insisté à acheter des systèmes de défense aérienne S-400 de fabrication russe. Ankara n’a eu d’autre choix que d’opter pour le deuxième choix et d’essayer d’acheter des avions de chasse F-16 aux États-Unis, et est actuellement engagé dans un lobbying acharné à Washington.

Le Congrès américain, où les relations américano-turques se sont détériorées ces dernières années, doit encore être convaincu. Le Congrès exige de la Turquie des garanties de sécurité concernant l’espace aérien grec et le nord de la Syrie avant d’approuver la vente des F-16. Or, Erdogan n’est pas en mesure de céder à de telles exigences.

« Les pires ennemis d’une politique étrangère saine sont la témérité et la rhétorique agressive », a souligné l’ambassadeur turc à la retraite Ali Tuygan.

« Le gouvernement l’appelle fièrement une politique étrangère affirmée de la nouvelle Turquie, mais en réalité, Erdogan s’est avéré être un perdant », a écrit Tuygan sur le site « Diplomatic Opinion ».

Il a ajouté : « Nous, les Turcs, devons nous demander pourquoi nous faisons face à un large front contre nous sur presque toutes les questions. Comment se fait-il que nous ayons atteint un point où même nos préoccupations compréhensibles sont accueillies avec hostilité, au mieux avec indifférence ? »

La rhétorique agressive d’Erdogan et sa position apparemment intransigeante sur de nombreuses questions ont créé des coalitions anti-turques auparavant inexistantes. Le soutien solide que les alliés occidentaux traditionnels d’Ankara et ses anciens partenaires régionaux apportent à la Grèce sur les droits d’exploration énergétique en Méditerranée orientale en est un exemple flagrant.

Erdogan devant un dilemme 

Erdogan semble être déterminé à s’accrocher à son approche radicale par rapport aux États-Unis et à l’Europe, mais la Turquie ne peut pas surmonter sa crise économique actuelle sans le soutien de l’Occident. Et si la crise économique ne peut être atténuée, ses chances de réélection en 2023 seront mises en péril.

Ainsi, Erdogan travaille maintenant à améliorer les liens avec les États de la région. Il vise à renforcer l’économie grâce à de meilleures relations avec les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et Israël. Il explore également les moyens de renouer des liens avec l’Égypte.

Il était en désaccord sérieux avec tous ces pays en raison du fort soutien qu’il a apporté aux Frères musulmans, en particulier après le printemps arabe.

Erdogan croyait à l’époque que les manifestants dans les rues arabes, dont beaucoup portaient ses portraits, le considéreraient comme le leader qui déterminerait l’avenir du Moyen-Orient. Mais cela n’a abouti à rien, et à la fin, il a été contraint de modérer sa rhétorique anti-israélienne et fortement pro-Frères musulmans. Son besoin de travailler avec l’ordre régional établi l’a emporté sur ses désirs idéologiques.

Les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et Israël ont répondu positivement à la récente campagne de sensibilisation d’Ankara. Cependant, ils sont maintenant dans une position plus forte, car c’est Erdogan qui n’a eu d’autre choix que de rechercher de meilleurs liens avec eux.

Cependant, la plupart des analystes pensent qu’Erdogan maintiendra sa ligne dure envers l’Occident, car il pense que c’est ce que veulent ses partisans. Pendant ce temps, les Occidentaux se demandent si la Turquie d’Erdogan fait toujours partie du bloc occidental.

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La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a jugé « incompréhensible » la photo d’Erdogan posant avec le président russe Vladimir Poutine et le président iranien Ebrahim Raïssi après leur sommet à Téhéran le 19 juillet.

La photo montre les trois dirigeants souriants, les bras en l’air, se tenant la main dans une pose de victoire. « Le fait que le président turc soit sur cette photo est un défi », a déclaré Baerbock dans une interview à la télévision allemande.

Mark Wallace et Madeleine Joelson, les dirigeants du projet pour la démocratie turque basé à New York, estiment que l’OTAN devrait être prête à suspendre l’adhésion de la Turquie. « Si les règles de l’OTAN étaient modifiées pour permettre la suspension temporaire des États membres jusqu’à ce que leurs dirigeants se réalignent sur les valeurs et les intérêts de l’alliance, alors Erdogan comprendrait la perspective de conséquences économiques et stratégiques réelles pour ses actions », ont-ils écrit dans une note publié par The Financial Times.

Bien que le débat s’intensifie au sein de la communauté internationale, il n’existe aucun mécanisme permettant de suspendre ou d’expulser un État membre de l’alliance et une telle perspective reste peu probable, même dans l’environnement de sécurité en évolution rapide d’aujourd’hui. Les analystes disent que c’est la place stratégique de la Turquie a augmenté avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Erdogan, ajoutent-ils, essaie de l’utiliser au maximum. L’accord sur l’exportation de céréales lui a peut-être valu des points politiques dans son pays et à l’étranger, mais il ne s’est pas encore révélé réalisable et les signes ne sont pas encourageants.

L’auteur conclut : « Pour faire à nouveau de la Turquie un partenaire fiable pour l’Occident, Erdogan devra penser à l’avenir de la Turquie, plutôt que son propre avenir politique. Beaucoup ne le voient pas comme un leader capable de le faire. »

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SOURCE: FRENCH PRESS TV