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«Trump pousse l’Irak dans les bras des Russes et des Chinois»

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Des forces américaines en Irak. ©Yeni Safak/Archives

Il existe des preuves que les violences attribuées par les médias mainstream au gouvernement irakien auraient été l’œuvre des sbires des États-Unis, et cela, au cours des protestations populaires ayant éclaté juste après d’importantes négociations sino-irakiennes, prévoyant une vaste coopération chinoise à la reconstruction de l’Irak. Parallèlement, l’Irak est de plus en plus tenté d’accepter l’offre russe d’équiper la DCA irakienne de missiles S-400. Par son approche ouest-asiatique, l’Amérique de Trump n’est-elle pas en train de céder la place aux Russe et Chinois, en Irak voire dans toute la région ? Un article de Global Research, signé F. William Engdahl étudie le sujet.

« Par une série d’actions au cours de ces derniers mois en Irak et à travers le Moyen-Orient, Washington a poussé cette région à un virage stratégique vers la Chine et la Russie et l’a éloignée des États-Unis.

Si les évolutions se poursuivent telles qu’elles sont actuellement, l’on pourrait dire qu’en essayant de déstabiliser la Syrie et de

Bloquer un projet de gazoduc Iran-Irak-Syrie (dont la réalisation sera désormais certaine), les États-Unis ont appliqué la politique de la terre brûlée. Et c’est ce que nous pouvons appeler des conséquences imprévues.

Si la nature a horreur du vide, la géopolitique aussi. Lorsque le président des États-Unis, Donald Trump, a annoncé il y a quelques mois son intention de retirer les troupes américaines de Syrie et du Moyen-Orient en général, la Russie et en particulier la Chine ont commencé à intensifier, sans faire trop de bruit, les contacts avec d’importants États de la région. Il s’agit de la participation de la Chine aux projets de développement du pétrole irakien et à d’autres projets d’infrastructure de ce pays, après que le groupe terroriste Daech a occupé environ un tiers du territoire irakien.

En septembre 2019, Washington a exigé que l’Irak paie pour l’achèvement d’importants projets d’infrastructure détruits à cause de lutte contre Daech (…), en donnant au gouvernement américain la moitié de ses revenus pétroliers. Une demande scandaleuse élaborée poliment.

Axe sino-irakien

L’Irak a refusé. En revanche, le Premier ministre irakien Adel Abdel Mahdi s’est rendu à Pékin à la tête d’une délégation ayant 55 membres, pour discuter de la contribution de la Chine à la reconstruction de l’Irak. Cette visite n’est pas passée inaperçue à Washington. Même avant cela, les relations irako-chinoises étaient importantes. La Chine était le premier partenaire commercial de l’Irak tandis que l’Irak était la troisième source de pétrole de la Chine après l’Arabie saoudite et la Russie. En avril 2019 à Bagdad, le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Lee Joon, a déclaré que la Chine était prête à contribuer à la reconstruction de l’Irak.

Pour Abdel Mahdi, le voyage à Pékin était un grand succès ; il l’a appelé un “grand essor” dans les relations bilatérales. Cette visite a eu pour résultat la signature de huit protocoles d’accord de grande envergure et un accord-cadre financier, à quoi s’ajoute l’annonce de plusieurs projets permettant à l’Irak de rejoindre l’initiative chinoise dite la nouvelle route de la soie ou la Ceinture et la Route. Cela incluait la participation chinoise à la reconstruction des infrastructures irakiennes ainsi qu’au développement des champs pétroliers irakiens. Il s’agissait, pour les deux pays, d’un accord nettement “gagnant-gagnant”, tout comme les Chinois préfèrent le dire.

Ce n’était que quelques jours après les négociations irako-chinoises que des manifestations contre la corruption et les politiques économiques du gouvernement ont éclaté en Irak, marquées par les appels à la démission du Premier ministre. Reuters dit avoir constaté des tireurs d’élite qui visaient les manifestants, donnant l’impression d’une répression par les forces gouvernementales, tout comme la CIA l’a fait à Maidan, [nom d’une place au centre-ville] à Kiev en février 2014 ou encore au Caire en 2011.

Il existe maintenant des preuves solides que les pourparlers avec la Chine et le calendrier des manifestations soi-disant spontanées d’octobre 2019 contre le gouvernement d’Abdel -Mahdi étaient liés. Et si l’on cherche le maillon perdu de la chaîne, c’est bel et bien l’administration Trump.

Selon un rapport de Federico Pieraccini, [un autre analyste à Global Research], Abdel Mahdi a prononcé un discours au Parlement sur la façon dont les Américains avaient ruiné l’Irak. “Il a ajouté que les Américains refusaient maintenant d’achever les projets d’infrastructure et de réseau électrique qu’ils avaient pris en charge, à moins qu’on leur promette 50 % des revenus pétroliers irakiens ; ce qu’Abdel Mahdi a refusé.”

Le rapport cite ensuite des extraits du discours d’Adel Abdel Mahdi traduit de l’arabe :

“C’est pourquoi j’ai effectué une visite en Chine et signé un accord important, afin qu’ils [les Chinois] remplacent les Américains dans les projets de construction [en Irak]. À mon retour, Trump m’a appelé pour me demander de rejeter cet accord. Quand j’ai refusé, il a menacé de déclencher d’énormes manifestations contre moi qui mettraient fin à mon poste de Premier ministre. D’énormes manifestations contre moi se sont dûment concrétisées ; tandis que Trump m’a de nouveau appelé, pour menacer que si je ne donnais pas suite à ses demandes, il ferait en sorte que des tireurs d’élite de la marine [américaine] visent les manifestants et le personnel de sécurité depuis de hauts bâtiments, pour me mettre sous pression. J’ai de nouveau refusé et remis ma démission. À ce jour, les Américains insistent toujours pour que nous annulions notre accord avec les Chinois.”

Des incursions silencieuses en “soie”

Une chose est claire. Pékin étudie ses perspectives, avec la Russie, pour remplacer la domination de la politique irakienne dont profite Washington depuis sa guerre d’occupation de 2003. Le site web OilPrice.com rapporte qu’à partir du mois d’octobre 2019, juste après les pourparlers réussis d’Abdel Mahdi à Pékin, l’Irak a commencé à exporter 100 000 barils par jour de pétrole brut vers la Chine dans le cadre d’un accord “pétrole contre infrastructure” de 20 ans conclu entre les deux pays. Selon des sources du ministère irakien du Pétrole, la Chine renforcera son influence en Irak en commençant par des investissements dans les secteurs pétrolier et gazier et à partir de là, en construisant des infrastructures, notamment des usines et des chemins de fer, en utilisant des sociétés et du personnel chinois à côté de la main-d’œuvre irakienne. Les usines construites par les Chinois utiliseront les mêmes chaînes de montage et la même structure que des usines similaires en Chine.

Le vice-président iranien, Eshaq Jahanguiri, a annoncé que l’Iran avait signé un contrat avec la Chine pour mettre en œuvre un projet d’électrification du principal chemin de fer, long de 900 kilomètres, reliant Téhéran à Machhad au nord-est, près de la frontière avec le Turkménistan et l’Afghanistan. Jahanguiri a ajouté qu’il était également prévu d’établir une ligne de trains à grande vitesse Téhéran-Qom-Ispahan et de l’étendre au nord-ouest via Tabriz.

OilPrice note :

“Tabriz, qui abrite un certain nombre de sites clés liés au pétrole, au gaz et à la pétrochimie et qui est le point de départ du gazoduc Tabriz-Ankara, sera aussi un point clé de la nouvelle route de la soie de 2300 kilomètres qui devrait relier Urumqi (la capitale de la province chinoise du Xinjiang à l’ouest) à Téhéran, reliant par la suite le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Turkménistan en cours de route, puis via la Turquie en Europe. Une fois que les plans à cet égard feront des progrès substantiels, la Chine étendra les liaisons de transport vers l’Irak ; c’est à dire vers l’ouest.”

(…) De même, une autre source au sein de l’industrie pétrolière irakienne indique que la Russie et la Chine préparent tranquillement le terrain pour relancer le gazoduc Iran-Irak-Syrie à partir du vaste champ gazier du golfe Persique du sud de l’Iran partagé avec le Qatar.

Une guerre par procuration soutenue par les États-Unis a commencé contre Bachar al-Assad en Syrie en 2011 juste après qu’il a signé un accord avec l’Iran et l’Irak pour construire le pipeline, rejetant une proposition antérieure du Qatar pour un itinéraire alternatif.

La Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar ont versé des milliards de fonds secrets pour financer des groupes terroristes tels qu’Al-Qaïda et, puis, Daech, dans un vain effort pour renverser Assad.

La Chine n’est pas seule dans ses efforts en Irak et dans tout le Moyen-Orient, car la politique étrangère et imprévisible américaine éloigne à son tour les anciens alliés américains de Washington.

La Russie, qui vient de conclure un cessez-le-feu en Libye avec Erdogan, vient de proposer de vendre son système avancé de défense aérienne S-400 Triumf à l’Irak, une offre qui aurait été impensable il y a quelques semaines encore.

Avec le vote du Parlement irakien pour le retrait des forces étrangères après l’assassinat “effronté” du général Soleimani par les forces américaines à Bagdad, il serait normal que l’Irak accepte l’offre de la Russie malgré les protestations de Washington. Par ailleurs, l’Arabie saoudite, le Qatar, l’Algérie, le Maroc et l’Égypte ont tous établi des pourparlers avec la Russie ces derniers mois pour acheter le système de défense russe qui serait le plus efficace au monde. La Turquie, elle, l’a déjà acheté. (…) ».

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV