Les États-Unis ont décidé d'imposer des sanctions au chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif, l'homme dont les entretiens avec les médias américains ont totalement désarmé l'administration US, alors que Mike Pompeo avait déjà largement restreint ses déplacements sur le sol américain. Pour de nombreux observateurs, la décision du Trésor US réduit à néant les chances de l'amorce d'un dialogue de part et d'autre, si tant est qu'un tel dialogue soit réellement possible, dans un contexte où les États-Unis continuent à rameuter ses troupes pour faire la guerre à l'Iran.
La réaction du ministre Zarif à cet aveu d'impuissance américain ne s'est pas tardé. Il ne s'est pas montré impressionné: lui et sa famille n'ayant aucune propriété ou intérêt en dehors de l'Iran:
« La raison pour laquelle les États-Unis s'en prennent à moi est que je suis le principal porte-parole de l'Iran à travers le monde. Cela n'aura aucun effet sur moi et ma famille. Parce que je n'ai aucun bien et intérêt en dehors de l'Iran. merci de me voir comme une aussi grande menace à votre agenda. »
Cette décision a été prise un peu après des interviews que M. Zarif a accordées à des médias américains, malgré des contraintes infligées par l’administration américaine aux diplomates iraniens sur le territoire américain. Le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, n'avait pas pu se garder de laisser éclater sa colère contre son homologue iranien et ses talents reconnus à véhiculer le message de son peuple.
« Les États-Unis ont décidé d’imposer des sanctions au chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif, visage du régime qui répand à l’étranger la propagande et les campagnes de désinformation favorables au programme nucléaire de Téhéran, à ses missiles balistiques et à ses réseaux terroristes », a déclaré un haut responsable de l'administration ayant requis l'anonymat.
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abbas Moussavi, a de son côté dénoncé une décision qui reflète « la peur des Américains d'un discours diplomatique logique et convaincant » :
« Les autorités américaines ont peur de la logique et de la force de conviction qui émanent du discours de M. Zarif et de ses stratégies de négociations. »
Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a tenté de justifier sa décision par le fait que Zarif a aidé à mettre en œuvre « la politique imprudente du Leader religieux de la révolution iranienne l’ayatollah Ali Khamenei ».
« Le grand paradoxe est que les Américains prétendent que Zarif n'a aucun poids sur la scène de la politique intérieure iranienne et qu'il n'est qu'un simple porte-parole tout en le sanctionnant. Et bien, on ne sanctionne pas un haut diplomate qui ne pèse pas ! », a signalé le porte-parole de la diplomatie iranienne.
L'ex-conseiller du département d'État et ex-ambassadeur US à l'OTAN, Robert E. Hunter, a réagi à la décision du Trésor américain en y voyant un acte qui vise à « faire entrer dans le domaine du privé de grosses divergences politiques qui opposent l'Iran et les États-Unis ».
Interrogé par l'IRNA, il a affirmé: « Si Zarif est un personnage sans autorité ni poids, pourquoi alors le sanctionner ? C'est là un acte totalement absurde et insensé. »
Hunter renvoyait aux propos d'un responsable US cité un peu plus tôt par Reuters qui a dit : « Trump veut dialoguer avec l'Iran mais il veut que son interlocuteur soit un responsable de l'exécutif. Ce qui n'est pas le cas de Zarif. »
« Je ne sais vraiment pas à quoi mène ce genre de décisions. Tout ce que je sais c'est que tout le monde tente d'ouvrir le dialogue entre Téhéran et Washington mais que paradoxalement, les portes du dialogue se ferment les unes après les autres.Ce qui est loin d'être une approche raisonnable », a estimé M. Hunter.
La décision du Trésor US intervient au plus fort des tensions entre les États-Unis et l'Iran dans la région du golfe Persique où Washington cherche à créer une coalition militaire contre l'Iran. « Sur le plan militaire, les USA sont tombés dans le piège de l'Iran et il semble que sur le plan de la diplomatie, M. Zarif a réussi aussi à les piéger », note un observateur.