Un grand mouvement de troupe se constate tout autour d'Idlib dans un contexte d'extrême tension sur le terrain. Les sources proches des terroristes à Idlib, lesquels sont soutenus par la Turquie, affirment que « les forces russes se sont retirées le 9 janvier dans l’après-midi de leur poste d'observation à Abu Dali, ville située dans la partie nord de la province de Hama où les forces de l’armée syrienne les ont remplacés ». Les forces russes ont été déployées dans le village d’al-Tulaysiyah situé à Hama. Dans le camp d'en face, les terroristes pro-Ankara cèdent la place à Al Nosra qui n'est pas combattu par Ankara bien que celui-ci l'ait promis dans le cadre de l'accord d'Astana. C'est dans un tel contexte qu'Ankara vient de demander à l'Iran et à la Russie de "superviser le retrait US de Syrie". Or cet appel ne semble pas avoir trouvé l'écho souhaité ni à Téhéran ni à Moscou.
Il y a deux jours, ajoutent les sites proches des terroristes, les forces russes ont lancé une nouvelle base militaire sur la colline de Salba, au sud de la ville de Hayalin, dans le gouvernorat de Hama, en y déployant des véhicules militaires et techniques. Ces mouvements inhabituels russes ont provoqué la panique chez les groupes terroristes et leurs chefs de guerre.
Les terroristes qaïdistes de Hayat Tahrir al-Cham se sont emparés de la majeure partie de l'ouest d'Alep et du nord-ouest de Hama que contrôlaient auparavant les pro-turc de Harakat Nour al-Din al-Zenki. Al Nosra se préparerait d'ailleurs à lancer une nouvelle attaque sur les derniers terroristes soutenus par la Turquie dans la campagne du sud d'Idlib.
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Ces évolutions interviennent alors que le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a présenté hier mercredi 9 janvier une proposition visant à "superviser le retrait des troupes américaines de Syrie" et ce, "conjointement avec la Russie et l'Iran".
« Les États-Unis se sont confrontés à des difficultés dans le cadre du processus de retrait de leurs troupes de Syrie. Nous souhaitons coordonner ce processus conjointement avec la Russie et l'Iran, avec lesquels nous coopérons dans le cadre du processus d'Astana », a-t-il expliqué.
Selon cette demande d’Ankara, la supervision des zones où opèrent des troupes américaines, devra être confié à l’Iran, à la Turquie et à la Russie, une fois que les troupes US seront parties. Cette demande n'a pourtant pas trouvé l'écho souhaité ni à Moscou ni à Téhéran.
A vrai dire, cet appel fait partie d'un ingénieux scénario signé président turc, lequel appel succède à un coup particulièrement audacieux du président turc. Le président Tayyip Erdogan a refusé la veille d'accueillir délibérément le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton. Erdogan compte d'ailleurs se rendre prochainement à Moscou pour discuter de cet effort conjoint avec le président son homologue russe, Vladimir Poutine, visite qui n'a pas été confirmé par le Kremlin.
Mais pourquoi la Turquie a-t-elle lancé un tel appel?
Le dirigeant turc aurait adopté une position anti-américaine dans l’espoir de se faire rallier par la Russie et l'Iran et de préparer le terrain à une offensive turque contre les Kurdes dans le nord-est de la Syrie. Or il est peu probable que cette manœuvre atteigne son objectif. A en croire des sources proches des Kurdes, le plan de Poutine consisterait à ce que les forces russes et syriennes reprennent le contrôle des zones contrôlées par les Américains une fois que ces derniers auront quitté la Syrie. Selon ces sources Moscou n'aurait aucune intention de laisser la Turquie prendre le contrôle du nord-est de la Syrie et chercherait à empêcher l'armée turque de s'installer à la frontière syro-irakienne.
Erdogan s'efforcerait de peser sur les plans russes. Il y a deux semaines, il a envoyé à Moscou une délégation de haut rang, dirigée par son ministre de la Défense et des renseignements, dans le but d’obtenir l’accord du Kremlin pour que les forces turques puissent pénétrer dans le nord-est de la Syrie sous le couvert de la force aérienne turque. La délégation s’est heurtée à un refus catégorique de la part de la Russie. Les responsables turcs auraient en outre été avertis que si leurs forces aériennes attaquaient les Kurdes, leurs avions seraient abattus par des batteries de la défense aérienne russe. Le nouveau plan d'Ankara risque ainsi de faire long feu.