Le retrait US de Syrie, tel qu'annoncé par Donald Trump, aplanira-t-il le terrain à l'offensive syrienne contre Idlib? En effet depuis l’annonce du retrait américain, les opérations militaires turques dans le nord se sont intensifiées et l’attaque de la Turquie contre l’est de l’Euphrate est donnée pour imminente.
Erdogan avait parlé de la nécessité d’une attaque contre l’est de l’Euphrate avant que Trump n'annonce le départ des forces américaines. Mis à part la capacité de l'armée turque à lancer ou pas cette opération, la menace d'une guerre destinée à chasser lesYPG et les FDS de l'est de l'Euphrate avait terrorisé ces derniers. Mais avec l'annonce du retrait US, la peur semble avoir changé de camp. Aussitôt après les tweets annonciateurs de retrait US de Trump, la Turquie a décidé de reporter ses opérations militaires contre l’est de l’Euphrate. Ankara, doute-t-il des capacités de son armée à franchir le grand fleuve et à se diriger vers l'est de l'Euphrate?
Après tout, ce passage requiert que la première grande armée de l'OTAN en termes numériques traverse Qamishli. Or cette région risque de se transformer en un bourbier pour les soldats turcs. En ce sens et en dépit de l'échange de bons procédés entre Erdogan et Trump, l'annonce du retrait US a plutôt désagréablement surpris le président turc. En effet, Ankara fait désormais face à un défi de taille : une opinion publique qui le pousse à lancer son offensive et les réalités du terrain qui risquent de ne pas être trop favorables à sa cause.
Les propos de Devlet Bahceli, dirigeant du parti d’action nationaliste turc reflètent bien l'attente de l'opinion turque de son président. Commentant le retrait US, Bahceli a déclaré : « Ce n’est pas le moment de nous demander si le départ des militaires US de la Syrie est une tactique ou non. L'important est de prêter l'oreille à l'exigence la nation turque. La nation nous appelle à attaquer l’est de l’Euphrate dès que cela sera possible. »
Mais que risque la Turquie si elle lance son offensive? Elle ne peut lancer son offensive sans avoir au préalable le feu vert des alliés de l'OTAN , surtout, la France qui a fait de la cause séparatiste kurde en Syrie une cause quasi nationale. Son président a appelé samedi tous les pays du monde à leur sens de responsabilité, maintenant que les Américains "ont lâché les Kurdes".
Mais ce n'est pas tout : si la Turquie prenait le risque de lancer ses soldats à l'assaut de l'est de l'Euphrate, qu'en serait-il du sort d'Idlib? Certains analystes affirment que l'armée syrienne et la Russie n'attendent qu'un retrait turc pour reprendre le contrôle de la province d'Idlib et ce serait d'ailleurs en conformité avec l'accord d'Astana. Les propos tenus par l'ambassadeur russe à l'ONU, Guennadi Gatilov, sont d'ailleurs bien significatifs : cité par Sputnik, le haut diplomate a affirmé que l'envoi de renforts et d'équipements par l'armée turque dans le nord de la Syrie est " une mesure provisoire". "Nous croyons que la question kurde est d'une extrême importance dans le paysage politique syrien. L'action de la Turquie est bien provisoire et ne répond qu'au souci sécuritaire de l'État turc. La Turquie n'a cessé de mettre l'accent sur la nécessité du maintien de l'intégrité territoriale de la Syrie et la Russie n'a aucune raison de douter de sa sincérité".
Pour de nombreux analystes, ces propos ont l'air d'une mise en garde.