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Yémen/Affaire Khashoggi: le "double standard" de l’Occident

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Un Yéménite tire un enfant des débris après un violent raid de la "coalition" à Sanaa (Archives)

L’assassinat de Khashoggi n’est absolument pas comparable avec la tragédie que vivent 25 millions de Yéménites.

L’assassinat du journaliste dissident saoudien Jamal Khashoggi au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul s’avère, certes, différente dans la mesure où il soulève trois points importants: primo, la victime est un journaliste qui devait bénéficier de l’immunité, garantie de la liberté d'expression. Secundo, l’assassinat a eu lieu au sein d’un consulat qui est considéré comme un centre diplomatique, non pas un lieu de règlement de comptes. Tertio, le crime a été commis de façon très barbare. A en croire les médias turcs qui parlent de mutilation de la victime, les Al Saoud auront du mal à se prémunir des conséquences de leurs actes criminels et sauvegarder leur royaume.

Personne ne peut nier l’importance d’un examen précis de cet assassinat, au nom de la défense de la démocratie, de la liberté d’expression et de l’intégrité territoriale. Mais le sujet sur lequel l’analyste Wafiq Ibrahim se focalise dans un article paru dans le journal libanais Al-Binaa est la tragédie que vivent 25 millions de Yéménites, victimes du maximalisme saoudien; un calvaire encore plus barbare que l’assassinat de Khashoggi, mais négligé par les médias internationaux qui ont déjà traité de cas nettement moins importants.

Pour Wafiq Ibrahim, les Américains et les Européens restent aveugles devant les crimes de l'Arabie saoudite et des EAU qui ont coûté la vie à plus de 20 000 femmes et enfants au Yémen. Ironie du sort, ces mêmes pays se débattent pour découvrir la face cachée de l’affaire Khashoggi.

Des milliers de civils innocents ont été tués lors des raids des avions de la coalition Israël/USA/monarchies arabes contre des zones d'habitation, des cérémonies de mariage, de funérailles ou des bus scolaires.

Le monde entier et notamment les pays membres du Conseil de sécurité ont fermé les yeux sur ces crimes. Plus de 15 millions de Yéménites souffrent de la famine et des millions d’autres sont touchés par le choléra, la peste et la typhoïde alors que Riyad et Abu Dhabi empêchent l'acheminement de médicaments vers les centres médicaux au Yémen.

Comment l’Europe peut-elle condamner l’assassinat de Khashoggi et rester silencieuse face aux crimes perpétrés contre le Yémen ? N’est-ce pas la peur de perdre le soutien des États-Unis et les pétrodollars de l’Arabie saoudite qui guide ses actes ?

Il est vrai que la guerre saoudo-émiratie contre le Yémen bénéficie du soutien politique et militaire des États-Unis. Ce qui explique, clairement, le mutisme de l’Europe, l’ONU, le CICR, les organisations des droits de l’homme, voire les grandes institutions religieuses. Par contre, ils imputent à l’armée et à Ansarallah du Yémen la responsabilité des massacres commis dans ce pays.

L’analyste espère que l’implication du royaume saoudien dans l’affaire Khashoggi conduira l’Occident à renoncer à son double standard et à voir la réalité du Yémen. Dans ce cas, les Européens cesseraient de soutenir la coalition dirigée par Riyad et feraient pression sur les Al Saoud pour qu’ils laissent en paix les groupes politiques au Yémen qui conviendraient eux-mêmes d’une solution politique.

L'abandon de l’Arabie saoudite par les États-Unis semble peu probable car l’administration Trump compte sur les trois milliards de dollars venant du fonds d’investissement de la compagnie pétrolière saoudienne Aramco, qui doivent augmenter de 8% les actions à la bourse américaine et créer de nouvelles occasions d’emploi pour plus de trois millions d’Américains.

Réconforté par le soutien américain, Riyad doit dorénavant s'entendre avec l’Europe, la Turquie, la Russie et la Chine. Est-ce qu’il y arrivera ?  

Le cours des évolutions au Yémen montre que les parties politiques sont enclines à des négociations, ce qui n'est pas dans l'intérêt des Saoudiens et des Émiratis.

Riyad prévoit d’annexer les provinces yéménites au territoire saoudien tandis qu’Abu Dhabi regarde avec convoitise Bab el-Mandeb, l’archipel Socotra et Aden.

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV