Le secrétaire américain à l’Énergie s’est rendu récemment en Russie et en Arabie saoudite pour convaincre ces deux grands producteurs mondiaux de pétrole de respecter le plan des sanctions pétrolières que la Maison-Blanche veut imposer à l’Iran. Cependant, les experts estiment que les États-Unis auront beaucoup de mal à rendre ce plan aussi efficace qu’ils le souhaitent.
Jeudi dernier, le secrétaire américain à l’Énergie, Rick Perry, a rencontré à Moscou son homologue russe, Alexandre Novak. Avant son voyage en Russie, Rick Perry s’était rendu également à Riyad pour s’entretenir avec le ministre saoudien du Pétrole, Khalid al-Falih.
Au menu des discussions à Moscou et à Riyad figurait le plan des sanctions que la Maison-Blanche veut imposer à la République islamique d’Iran à partir du 4 novembre.
Selon les observateurs, la première demande de Rick Perry aux autorités russes et saoudiennes, c’est qu’elles agissent de sorte que le marché du pétrole ne soit pas secoué par l’arrêt des exportations iraniennes que Washington souhaite ramener à zéro à partir du 4 novembre prochain.
Ce qui rend très difficile la réalisation du plan de sanctions des Américains, c’est que certains gros clients de pétrole iranien, comme la Chine, l’Inde et la Turquie, ont déjà annoncé qu’ils continueraient à acheter du pétrole à l’Iran.
Dans un tel contexte, l’augmentation de l’offre de la part de Riyad ou de Moscou n’aura pas en soi un grand effet sur l’arrêt ou la poursuite de la vente du pétrole iranien.
Mais il paraît que l’inquiétude des États-Unis de Donald Trump va au-delà des considérations techniques ou économiques. La Maison-Blanche est consciente que le régime des sanctions qui touchera le pétrole iranien créerait insécurité et incertitude sur le marché mondial de l’énergie, d’où la hausse de la demande et des prix du brut et de l’essence dans le monde, surtout aux États-Unis. Les observateurs estiment que la hausse des prix à l’approche des élections de mi-mandat du Congrès des États-Unis pourrait devenir un désastre pour les républicains. Cela dit, cette décision de la politique étrangère de Donald Trump risquerait d’avoir de graves retombées intérieures et de laisser un mauvais effet sur la décision des électeurs américains.
La visite du secrétaire américain à l’Énergie à Moscou intervient quelques jours après l’annonce faite par Donald Trump de prolonger les sanctions anti-russes. La tension monte également dans les relations Washington/Moscou autour de l’imminente opération de l’armée syrienne contre les terroristes à Idlib dans le nord de la Syrie. Dans cette situation, il est difficile de croire que les Russes coopéreraient pleinement avec le projet des sanctions anti-iraniennes de la Maison-Blanche, d’autant plus que le Kemlin a déjà rejeté la demande des Américains concernant l’augmentation de l’offre du pétrole russe sur le marché. Contrairement à la Russie, l’Arabie saoudite a annoncé d’avance qu’elle coopérera avec le projet pétrolier de Donald Trump et augmentera le niveau de ses ventes.
Bien que la Maison-Blanche ait menacé de sanctions tous les pays qui achèteraient du pétrole à l’Iran à partir du 4 novembre, il est fort possible que les Américains observent certaines exceptions pour les grands clients du brut iranien.
Selon une analyse du quotidien Washington Post, malgré l’intensification des sanctions américaines, la Chine continuera à acheter du pétrole à l’Iran. Selon les experts, parallèlement à la vente du pétrole, Téhéran pourrait développer son commerce avec la Chine dans plusieurs autres domaines, ce qui serait une bonne occasion pour les Iraniens pour contourner les sanctions américaines.
Le journal indien The Asian Age a fait état de la décision de New Delhi de maintenir ses achats de pétrole iranien. Le journal a rappelé que les raffineries indiennes achètent 23 % du brut dont elles ont besoin à la République islamique d’Iran. Les deux pays mènent également d’autres projets économiques communs, dont le développement des installations portuaires de Tchabahar (sud-est de l’Iran), pièce maîtresse des ambitions de l’Inde pour développer ses échanges avec l’Afghanistan et l’Asie centrale en contournant le territoire pakistanais.
Étant donné la position de pays tels que la Russie, la Chine, l’Inde ou la Turquie (un autre grand client traditionnel de pétrole iranien), les analystes croient que le contexte des relations internationales ne permettra pas à la Maison-Blanche de réduire « à zéro » les exportations pétrolières de l’Iran. Tout au plus, les sanctions d’après le 4 novembre pourraient baisser le niveau de l’exportation du brut iranien à 1,5 million de barils par jour, ce qui ne permettrait pas aux États-Unis de ramener les choses au régime des sanctions d’avant la signature en 2015 du Plan global d’action conjoint portant sur le nucléaire iranien.