Le grand éditorialiste du journal panarabe Raï al-Youm, Abdel Bari Atwan, consacre un article aux récentes déclarations des dirigeants des États-Unis et des pays arabes.
Il affirme que Trump reconnaît implicitement les pays arabes du golfe Persique comme des colonies américaines, des régimes suiveurs qui doivent non seulement payer Washington mais aussi se plier à toutes ses demandes, en envoyant leurs troupes sur des fronts de combat déterminés, au risque d’éclater en morceaux.
Selon Atwan, le fait que Trump affirment que les pays arabes du golfe Persique ne se sont enrichis qu’avec l’aide d’une Amérique qui ne peut plus dépenser un sou en Syrie signifie qu’il veut encore leur soutirer de l’argent d’une façon ou d’une autre.
Deuxièmement, lorsque Trump et al-Joubeir annoncent que certains pays ne tiendraient pas plus d’une semaine si jamais les États-Unis ne les soutenaient pas, ils font en fait référence d’après Atwan non seulement au Qatar mais aussi aux Émirats arabes unis.
Troisièmement, l’éditorialiste de Raï al-Youm précise que lorsque Trump dit qu’il ne laisser pas l’Iran rester en Syrie et accéder à la méditerranée, cela signifie en réalité qu’il ne retirera pas les troupes américaines de Syrie.
Atwan écrit : « Les paroles de Trump sonnent en réalité comme un avertissement adressé à ces pays pour qu’ils ne refusent pas d’envoyer leurs troupes à l’est de l’Euphrate en Syrie et pour qu’ils veuillent bien payer les frais de la présence des forces américaines et des chasseurs américains dans le cadre de la coalition internationale dite anti-Daech.
Seulement, il ne s’agit pas seulement du Qatar mais aussi des Émirats et de l’Arabie saoudite. Mais la base militaire américaine au Qatar est une carte gagnante pour Washington afin de faire pression sur Doha, notamment eu égard à la crise actuelle du Qatar. Les Russes sont au courant de ce projet américain. Le fait que les Russes et les Iraniens se soient fermement opposés à cet envoi des troupes arabes montre bien que ces derniers savent que Doha a déjà pris sa décision [et qu’il enverra des troupes qataries en Syrie]. Quant au fait de savoir si ces forces vont aller à Raqqa ou à Hassaké, tout est une question de timing ; le gouvernement qatari ne s’est pas opposé à l’envoi de ses troupes et al-Joubeïr a également accepté d’envoyer des troupes saoudiennes.
L’arrivée des forces arabes à l’est de l’Euphrate a pour objectif de permettre la reconnaissance d’un État kurde au nord-est de la Syrie, qui aurait pour armée officielle les FDS, et de jeter ainsi ces forces dans la bataille contre les forces syriennes, turques, iraniennes, russes et le Hezbollah.
L’arrivée du premier militaire qatari à l’est de l’Euphrate marquera un changement profond au sein des coalitions dont fait actuellement partie le Qatar, et plus particulièrement dans ses relations avec l’Iran et la Turquie. Le conseiller du ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Cheikhol-Eslam, a déclaré que l’envoi de troupes qataries était une erreur et que Téhéran s’y opposait fermement. Erdogan, quant à lui, est pour l’instant silencieux sur le sujet, car trop préoccupé par la présidentielle et les législatives, mais son silence ne devrait pas durer trop longtemps. Ces ordres donnés par Washington à ces régimes arabes engendreront une perte de richesses pour ces derniers, les mettant face à leurs peuples en colère et aboutissant à terme à leurs fins. Ce soutien américain que Trump dit offrir à ces pays ne profitera au final qu’aux États-Unis et à ses caisses. »