Les protestations populaires soudaines qui ont duré trois jours ont eu lieu dans la province de Souleimaniyeh où se trouvent les sièges du Parti Goran et de deux autres formations politiques du Kurdistan irakien, l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) et le Parti démocratique du Kurdistan (PDK).
Il s’agissait des manifestations bien organisées et calculées, puisque les protestataires s’en sont pris aux sièges des principaux partis du Kurdistan irakien.
Dans la foulée, le Conseil de la sécurité du Kurdistan irakien a émis un communiqué dans lequel il a demandé aux citoyens de ne pas baliser le terrain à ceux qui cherchaient à exploiter la situation pour accéder à leurs objectifs politiques.
Ces trois jours de contestation ont coûté cher à la population kurde. Les forces de sécurité du gouvernement du Kurdistan irakien ont adopté des mesures d’extrême violence, tuant ou blessant 90 personnes.
Face à cette crise sans précédent, le Parti Goran, qui compte 10 ministres, et celui du Groupe islamique, qui compte, lui, deux ministres ont annoncé leur retrait du gouvernement régional du Kurdistan irakien qui compte 21 membres.
Quelles sont réellement les principales raisons du « Printemps kurde » ?
Le peuple kurde ne peut plus tolérer « la domination injustifiée » de certaines « familles des dirigeants kurdes » sur le sort de la région du Kurdistan irakien. L’échec de la plupart des partis kurdes notamment les principaux partis à réaliser le rêve kurde d’avoir une vie décente et de bénéficier d’un développement économique de bon augure.
Cette colère contre les partis politiques est due également à la tentative ratée des autorités kurdes d’organiser un référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien, après quoi les rapports de force entre Bagdad et Erbil ont été déséquilibrés au profit du gouvernement central irakien. Et ce alors qu’avant le référendum, Erbil croyait qu’il pouvait utiliser cette question comme un nouveau levier de pression contre le gouvernement irakien lors des négociations serrées et compliquées sur plusieurs dossiers importants.
Le succès du gouvernement de Bagdad et ses forces de sécurité et militaires de prendre le contrôle de Kirkouk et les régions qui sont revendiquées à la fois par le gouvernement régional du Kurdistan irakien et Bagdad, a mis dans l’embarras les partis kurdes au pouvoir et révélé au grand jour l’impuissance et la faiblesse de leurs forces militaires et sécuritaires.
L’éclatement des divergences de vues entre les partis kurdes au pouvoir à Erbil notamment entre l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) et le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) qui se sont accusés mutuellement de trahison et de compromis avec Bagdad sur les régions discutées, a amené la population kurde à perdre sa confiance en ces partis.
Le privilège du gouvernement de Bagdad de creuser la fissure dans les rangs des Kurdes de la région du Kurdistan irakien et de créer une coalition avec l’Union patriotique au détriment du gouvernement de Massoud Barzani est une autre raison de la révolte kurde.
L’opiniâtreté du gouvernement de Bagdad pour appliquer les conditions qu’il avait posé à tout dialogue avec Erbil, dont l’annulation du résultat du référendum et la remise des passages frontaliers et des sites pétroliers a mis, le gouvernement d’Erbil et tous les partis kurdes, en position de faiblesse.
Tout porte à croire que les récentes manifestations ont resserré l’étau autour des dirigeants d’Erbil et laissent présager diverses évolutions sur la scène politique du Kurdistan irakien.