Alors qu'on s'approche des pourparlers d'Astana où une solution politique a toutes les chances de se pointer à l'horizon au bout de plus de cinq ans de guerre en Syrie aux conséquences désastreuses pour l'ensemble des pays de la région, Ankara multiplie les sautes d'humeur.
Dans un geste ironique et insensé, une autorité au sein du ministère turc des Affaires étrangères s’attaque à l’Iran et l’accuse d’être « en colère » contre les relations Moscou-Ankara (!). La trêve qui est entrée en vigueur en Syrie et dont Ankara réclame en partie la paternité a été toutefois conclue en concertation étroite avec l'Iran et le pays n'a cessé de soutenir l'émergence d'un axe Téhéran-Moscou-Ankara dans le sens d'un règlement de la crise syrienne.
Cette source anonyme appelle Téhéran à « exercer plutôt son influence dans la région pour une paix durable.». La paix durable dont le diplomate turc parle, a été profondément secouée depuis l'éclatement de la guerre contre l'Etat syrien, guerre soutenue durablement et efficacement par Ankara.
Cité par le quotidien Rai al-Youm, ce responsable du ministère turc des Affaires étrangères prétend aussi que « l’Iran a des relations avec le PKK (le Parti des travailleurs du Kurdistan) bien que Téhéran ait démenti tout lien avec ce groupe terroriste". Là aussi, le diplomate turc fait sans doute l'écho de certaines voix au sein de la Diplomatie turque qui oublient que le groupe terroriste Pejak, une branche du PKK, a déclaré la guerre à l'Iran et qu'il est bien actif dans des régions irakiennes limitrophes de l'ouest iranien.
Ce diplomate turc, en essayant d'exonérer le gouvernement turc de toute responsabilité dans la crise régionale, accuse l’Iran d’être « à l’origine de la tension entre la Turquie et l’Irak.". "La position de l’Iran a fortement changé depuis ces deux dernières années envers la Turquie " ,a insisté ce diplomate turc.
En prenant aveuglément faits et causes des intérêts de l'Otan et des Etats-Unis, le gouvernement du président Erdogan a envahi le nord de Mossoul comme il l'a fait avec plusieurs localités dans le nord de la Syrie. Ankara s'est ainsi ligué sur les approches communautaristes des régimes arabes du golfe Persique qui en jouant le jeu des grandes puissances, ne cessent de diviser les rangs des musulmans, d'attiser des conflits fratricides qui n'ont pas lieu d'être.
Les prises de position d'Ankara dans le dossier syrien ont provoqué de profondes fissures au sein de la société turque composée d'alaouites, de kurdes et de sunnites et les attentats qui frappent quotidiennement la Turquie en sont l'émanation.
La reprise des relations avec la Russie constitue pourtant un tournant dans la politique syrienne si elle est mise à profit à sa juste mesure. L'Iran a affirmé à maintes reprises que la poursuite de la guerre contre la Syrie avec en perspective un démembrement de cet Etat, comme le souhaitent les grandes puissances, n'est dans l'intérêt d'aucun pays de la région à commencer par l'Iran et la Turquie. Reste à savoir si oui ou non, l'Etat turc, empêtré qu'il est dans ses propres erreurs, aura le courage nécessaire pour cesser son double jeu et agir une bonne fois pour toutes dans le sens des intérêts du peuple turc.