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"Que Riyad se détrompe, c'est l'Iran qui devra imposer des conditions"

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Exercice naval conjoint sino-russo-iranien. ©IRNA/Archives

Dans son éditorial de dimanche 4 avril pour le journal Rai al-Youm, Abdel Bari Atwan s’attarde sur une « mauvaise interprétation » qu’il constate dans l’approche d’hommes politiques saoudiens, envers la « proposition iranienne d’établir des relations avec Riyad ». Le journaliste arabe évoque « les quatre raisons qui garantissent la suprématie régionale de l’Iran face à l’Arabie saoudite ».

« Le ministre des Affaires étrangères, le prince Ben Farhan a déclaré dans une déclaration à l’antenne de CNN qu’il y aurait opportunité non seulement pour un rapprochement avec l’Iran, mais aussi pour un partenariat avec ce pays, au cas où les Iraniens changeaient de comportement et arrêtaient de soutenir les combattants yéménites.

Si le prince Fayçal ben Farhan croit que l’Iran a besoin d’établir des liens avec Riyad, ou qu’il est enthousiaste à l'idée de bâtir un partenariat avec les Saoudiens, il se trompe sérieusement, estime l’éditorialiste de Rai al-Youm qui évoque par la suite les quatre raisons pour lesquelles l’Iran a la main haute par rapport à l’Arabie saoudite dans les équations régionales.

« Premièrement, l’Iran a signé un traité stratégique économique, sécuritaire et militaire avec la Chine pour une période de 25 ans, traité qui prévoit l’investissement de 450 milliards de dollars dans les infrastructures iraniennes. De même, la Chine pourra importer 2 millions de barils de pétrole en provenance d’Iran par jour, et les importations chinoises du pétrole iranien pourront accroître progressivement.

Deuxièmement, l’actuelle administration américaine supplie l’Iran de revenir à l’accord nucléaire sans aucune condition préalable, sans exiger comme préalable l’acceptation de concessions réciproques. De son côté, l’Iran insiste pour la levée immédiate et complète des sanctions avant toute négociation avec les États-Unis, parce que la situation actuelle lui convient, et parce qu’il n’est pas pressé de faire revenir les Américains à la table des négociations.

Troisièmement : l’Iran s’est impliquée dans un nouveau pacte qui comprend deux grandes puissances, à savoir, la Chine et la Russie, et une troisième puissance, nucléaire, qu’est la Corée du Nord, et il n’est pas exclu que d’autres puissances régionales telles que le Venezuela, l’Inde, le Pakistan et peut-être la Turquie et l’Égypte s'y rejoignent. Cela alors qu’Israël, allié de certains États du Golfe [Persique], est aux prises avec une sérieuse crise interne, étant au bord de la guerre civile et de vives divisions.

Quatrièmement, l’Iran s’est investi dans la question axiale du monde arabe, ayant fourni son appui aux groupes de résistance islamique en Irak, au Yémen, au Liban et dans la bande de Gaza, alors que l’Arabie saoudite et certains de ses alliés s’investissent directement ou indirectement dans le processus de normalisation avec le régime occupant israélien. En effet, l’Arabie saoudite et ses alliés régionaux ou internationaux ont largement perdu de leur supériorité, tout comme leur pouvoir d’antan de conduire rapidement les conflits régionaux vers des aboutissements qui leur plaisent. De même, le “pétrodollar”, arme financière traditionnelle des pays arabes du golfe Persique, perd rapidement sa magie et pourrait même définitivement disparaître tout au plus dans les dix prochaines années. »

D’après Abdel Bari Atwan, les Saoudiens semblent avoir oublié que c’était eux-mêmes qui, simultanément à la guerre qu’ils ont déclenchée il y a six ans au Yémen, ont pompé des milliards de tonnes de munitions et de matériel lourd vers des mouvements armés pour déstabiliser la Syrie, soutenir l’occupation américaine de l’Irak et utiliser la Ligue arabe pour fournir une couverture juridique afin de justifier l’action de l’OTAN en Libye.

Le journaliste chevronné arabe trouve « légitime » l’effort de l’Iran pour assurer ses intérêts nationaux et ajoute : « À la différence des autres pays, l’Iran s’est appuyé sur ses capacités indigènes en ce qui concerne l’industrie militaire, ce qui lui a permis de parvenir à un énorme progrès en matière de défense, malgré les sanctions imposées par les États-Unis ; alors que des pays arabes, avec à leur tête l’Arabie saoudite, se sont impliqués dans des projets américains et ont perdu leurs capacités de défense. Ils ont d’ailleurs abandonné leurs valeurs nationales et arabo-islamiques y compris la cause palestinienne, et ouvert leur espace terrestre et aérien et leurs marchés au régime israélien et ses marchandises, alors même qu’ils faisaient face au mouvement de résistance et s’enfonçaient chaque jour un peu plus dans l’abysse de sectarisme.

Au lieu de mobiliser les potentialités du monde arabe pour en assurer le progrès et la grandeur, l’Arabie saoudite et ses alliés ont préféré « se blottir -selon Abdel Bari Atwan- dans l’étreinte de l’Amérique et d’Israël », et c’était ainsi qu’ils ont perdu « leur identité islamique et leur place au sein du monde musulman ».

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SOURCE: FRENCH PRESS TV