Ce qui se passe au port hautement stratégique de Chabahar au sud de l’Iran, port qui a toutes les chances de s’ériger en symbole de l’alliance victorieuse de l’Est est absolument inouï et devrait bien alerter non seulement le clan « normalisant avec Israël » qui travaille à planter une base arrière en mer d’Oman à travers l’île yéménite occupée de Socotra, mais encore la flotte de guerre US qui siège, en ce moment même bien craintif, à Bahreïn. Cette semaine, l’Iran a dévoilé un puissant site radar au centre du pays à Yazd, radar baptisé Qadir d’une portée d’interception de 1000 kilomètres. Doté de capacités de guerre électronique et d’interception des avions furtifs, le dispositif est un plus dans le système A2/AD iranien et il l’est d’autant plus que selon le commandant en chef du CGRI pour le département aérospatial, le général de brigade Hajizadeh, il sera installé d’ici trois mois au port de Chabahar. À quoi joue l’Iran ?
Vu les rapides évolutions militaires, A2/AD iranien tend à s’étendre dans le golfe Persique et aller au-delà jusqu’en océan Indien. Et l’alliance avec la Chine y est pour quelque chose. Depuis que le Caucase est embrasé par un coup de tête du Sultan atlantiste Erdogan et que les terroristes sont sur le point de s’y infiltrer, le besoin d’une riposte se fait sentir. Vendredi 9 octobre, le MAE iranien, Zarif est attendu à Pékin et on croit savoir qu’il est question de débattre de tout ceci. En attendant, le Corps des gardiens de la Révolution islamique d’Iran (CGRI) a dévoilé le dimanche 27 septembre un nouveau missile balistique naval d’une portée potentielle de plus de 700 kilomètres (430 miles) ; lequel missile est appelé à jouer son rôle de dissuasion toujours à Chabahar. Le missile, baptisé « Zolfaqar Bassir », est la variante antinavire du missile balistique sol-sol Zolfaqar.
Sa portée est plus du double de celle des autres missiles antinavires iraniens, y compris le fameux « Hormoz-2 », qui est d’une portée de 300 kilomètres, que l’Iran a testé avec succès en mars 2017. Or le bond est notable : entre Hormoz-1 et Zolfaqar Bassir, la portée est passée de 300 km à 700 km. Le missile Zolfaqar Bassir a été utilisé pour la première fois sans être nommé lors des exercices du grand Prophète-14 par le CGRI en août de l’année en cours et le porte-parole de ces exercices l’a décrit comme une « arme surprise ».
Rappelons que le développement de missiles balistiques antinavires (ASBM) n’est pas très courant dans le monde, aucun pays ne possédant à l’heure actuelle, cette arme à l’exception de l’Iran, qui les a développées en trois exemples, et de la Chine, qui a développé le missile DF-21D comme missile balistique antinavire. Et les deux parties se comprennent merveilleusement. En effet la mer d Chine et le golfe Persique sont le théâtre des agissements déstabilisateurs US auxquels il faudrait mettre un terme.
Cela étant, l’Iran projette de tirer d’autre avantage de l’augmentation de la portée de ses missiles balistiques antinavires : cette capacité permettra à l’Iran de renforcer son pouvoir dissuasif en mer pour repousser les navires américains vers le nord de l’océan Indien et de la mer d’Oman. Les Américains ont toujours exploité la présence de leur porte-avions dans les eaux du golfe Persique comme un levier de pression militaire et dans certains cas même comme une arme psychologique. En 2010, après le dévoilement du missile balistique Khalij-e Fars les Américains ont progressivement réduit leur présence dans la région du golfe Persique en raison du grave danger que ce missile représente pour leur flotte. Jusqu’en septembre de cette année, lorsque l’USS Nimitz est entrée dans le golfe Persique, les États-Unis n’avaient déployé aucun porte-avions dans le golfe Persique, sur une période de plus de 10 mois.
Avec le missile Khalij-Fars (300 kilomètres), les bâtiments de guerre américains ont été forcés de s’éloigner vers le nord de la mer d’Oman. La portée de 700 km de Zolfaqar Bassir les poussera à s’éloigner davantage vers le nord de l’océan Indien. C’est important quand on sait que l’Iran travaille à créer une base navale permanente dans l’océan Indien et que ses liens avec la Chine y sont pour quelque chose. Le CGRI a dévoilé le jeudi 7 février 2019 un nouveau missile balistique surnommé Dezful ayant une portée de 1 000 km avec une ogive équipée d’un détecteur optique pour cibler le sous-marin.
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Bref A2/AD iranien compte désormais une intéressante gamme de missiles balistiques antinavires qui s’ajoute aux missiles de croisière iraniens. Deux derniers membres de cette famille, missiles « Haj Qassem » et « Abou Mahdi » ont une portée respective de 1 400 kilomètres et de 1 000 kilomètres. L’Iran compte aussi des engins à combustible liquide à longue portée, capables de viser des navires ennemis dans des eaux éloignées jusqu’à une portée de 2 000 kilomètres. 2000 kilomètres de portée, c’est assez pour faire comprendre aux Américains qu’il est temps de partir... et à leurs acolytes, de penser à deux fois avant de s’engager sur les pas du maître dans une quelconque aventure...