Les Algériens s’apprêtent à commémorer ce vendredi la sinistre journée du 8 mai 1945. Cette date reste gravée en lettres de sang versé par des dizaines de milliers de manifestants pacifiques tués dans des massacres à travers plusieurs villes du pays. Ces massacres qui restent un tragique épisode ayant marqué la politique génocidaire de la France coloniale, ont constitué, en parallèle, un tournant décisif dans la lutte du peuple algérien pour l’indépendance.
À la veille de la commémoration du 75ème anniversaire des massacres du 8 mai 1945, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a adressé jeudi 7 mai, un message à la nation.
Le chef de l’État algérien a qualifié les massacres du 8 mai 1945 perpétrés par les forces de l'ordre françaises dans le Constantinois, de «crimes » contre l'humanité et les valeurs civilisationnelles, qui fondés sur la purification ethnique, avaient pour objectif de remplacer les populations autochtones par des apports de populations étrangères».
Tebboune a souligné que la colonisation abjecte demeurera une marque d’infamie collée au front de la France « qui a commis, 132 années durant, des crimes imprescriptibles à l’encontre du peuple algérien malgré les multiples tentatives de les effacer car le nombre des victimes a dépassé cinq millions et demi de personnes, tous âges confondus, soit plus de la moitié des habitants de l’Algérie sous l’occupation coloniale.
Les assassinats collectifs perpétrés par l’armée coloniale et ses milices contre le peuple algérien se sont prolongés par des massacres calculés jusqu'en 1947. L’armée française tenait vraiment à étouffer dans l’œuf l'aspiration à l'indépendance qui avait pris forme progressivement dans l’esprit collectif des Algériens.
Pour y parvenir, elle avait mobilisé sa grande artillerie, à l’exemple des fameux avions B 22 utilisés pour bombarder la population algérienne. Ses bateaux de guerre amarrés à Bejaia avaient aussi tiré sur la population de Sétif et celles des autres régions environnantes. Des parachutistes de l’armée française ont été également ramenés en grands renforts en Algérie pour les impliquer dans les massacres du 8 mai 1945 qui ont suscité par ailleurs plusieurs réactions à l’international. La répression des forces coloniales ont fait 45 000 morts parmi les manifestants.
Les Algériens n’ont jamais cessé d’exiger de la France « reconnaissance, excuses et indemnisation » pour ses crimes commis à l’encontre du peuple algérien durant la colonisation (1830-1962), notamment, l’acculturation, les massacres, les pillages, la torture et les essais nucléaires.
La cadence de ces revendications s’accentue, chaque année, avec l’avènement de l’anniversaire de l’enclenchement de la révolution de libération (1954-1962), le 1er novembre de chaque année, au vu du refus officiel de Paris de reconnaître ses crimes et qu’une série de dossiers sont toujours en suspens.
À la veille de la commémoration du 75ème anniversaire des massacres du 8 mai 1945 en Algérie, commis par la France coloniale, Olivier Le Cour Grandmaison, historien spécialiste des questions de citoyenneté sous la Révolution française et des questions en relation avec l'histoire coloniale a regretté, dans une contribution publiée sur son blog, "le silence de la France sur ces massacres", précisant que les "descendants de ces victimes attendent toujours la reconnaissance de ces crimes" par la France.
En ce sens, il a relevé que "ni François Hollande (ex-président de la République française), ni Emmanuel Macron (président sortant) ne se sont engagés dans cette voie", rappelant à cet effet que Macron avait déclaré, au cours d’un voyage en Algérie en tant que candidat à l’élection présidentielle (février 2017), sur une chaîne de télévision privée algérienne que "la colonisation était un crime contre l’humanité".