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"Les USA ont renoncé à leurs 12 conditions pour un dialogue avec l'Iran" (Atwan)

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le secrétaire d'Etat, Mike Pompeo (à droite), l'ex secrétaire à la défense, James Mattis (centre) et le conseiller à la sécurité national, John Bolton (à gauche)./AFP

Il y a deux semaines, les États-Unis menaçaient de frapper l'Iran à coup de leurs bombardiers nucléaires B-52 qu'ils disait avoir déployé à bord de son fameux groupe aéronaval USS Abraham Lincoln. Ce lundi 3 juin, le commandant en chef de la flotte dit ne pas vouloir s'aventurer dans le golfe Persique pour "éviter les tensions inutiles". Quelques heures avant lui, le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a affirmé à deux reprises "vouloir dialoguer sans précondition avec l'Iran", "un dialogue qui pourrait se tenir au plus haut niveau" entre les deux États. Quelle mouche a piqué l'Amérique? Raï al-Youm y revient dans son récent article signé Abdel Bari Atwan.

 

"Mais qu’est-ce qui peut bien expliquer ce radical et soudain changement de cap de Washington qui, jusqu’à hier, menaçait Téhéran d'un déploiement massif de ses navires de guerre géants et ses bombardiers dans le golfe Persique ? Rappelons qu'en formulant son offre, l'intéressé vient de renoncer aux douze conditions qu'imposait l’administration américaine il y a un an comme préalable à tout dialogue avec Téhéran, ce qui constitue une marche arrière assez monumentale.  Mike Pompeo s'est-il rendu compte que l’adversaire est bien plus coriace que l'Amérique puisse l'avoir au premier acte d'intimidation? Il est vrai que depuis un mois, l'Iran n'a montré aucun signe d'essoufflement. Au contraire, il se prépare dans les faits à tous les scénarios possibles dont celui de la guerre économique ou de la confrontation militaire. C'est sans doute cette fermeté qui commence à porter ses fruits et à pousser les États-Unis à mettre de l'eau dans leur vin", précise ce célèbre analyste du monde arabo-musulman. 

Et l'auteur de poursuivre :

" A vrai dire, le Leader iranien est loin d'être le seul à infliger une réponse ferme aux menaces de Washington. Seyyed Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah libanais, a mis en garde lui aussi, lors de son discours à l’occasion de la Journée mondiale de Qods, les Etats-Unis contre les flammes de la guerre qui ne ne se borneraient pas aux frontières de l’Iran mais qui atteindraient Israël et l’Arabie saoudite pour faire réduire en cendre tous les intérêts des États-Unis dans la région."

Et l'analyste ajoute : " C'est donc un impératif qui se pose aux États-Unis et qui les pousse à changer d’attitude non seulement envers l’Iran mais aussi envers tous les États arabes et musulmans que l'Amérique a tendance à traiter comme ses esclaves. Le racisme et la politique marquée par l’arrogance, l’intimidation, la menace et la force auront des résultats inverses. Mais cette marche arrière US face à l'Iran veut dire encore bien plus. Les Iraniens ne suivront pas le modèle de la Corée du Nord qui s’est rendue à la table des négociations, à moins que Washington revienne sur ses sanctions économiques contre Téhéran ainsi que sur son retrait de l’accord sur le nucléaire de 2015. Et puis les négociations, si elles ont lieu, ne pourront non plus porter sur le programme balistique de l’Iran ni sur son droit légitime à l’enrichissement de l’uranium à des fins pacifiques.

Le président iranien Hassan Rohani avait affirmé avec fermeté que toute négociation avec les États-Unis devrait se tenir dans le respect mutuel. Mais le problème de tous les dirigeants de la région, c’est que Trump et sa bande ne sont pas habitués à dialoguer dans le respect. Leur manège place leurs diktats et la reddition inconditionnelle au-dessus de tout.

Tout comme au Venezuela ou encore en Corée du Nord, les États-Unis sont sur le point de perdre face à l'Iran dans une région où mêmes leurs alliés ne les croient plus. Benjamin Netanyahu qui est le principal pionnier de la politique américaine dans la région, n'est pas en mesure de former son cabinet. Le « Deal du siècle » planifié par Jared Kushner, gendre et conseiller de Trump, rend ses derniers souffles tout comme la formation de l’OTAN anti-Iran qui est censé fonctionner comme une baïonnette contre l’Iran en cas de conflit.

Le secrétaire d’État américain plaide pour des pourparlers avec l’Iran, car la durée d’attente est devenue trop longe pour le maître de la Maison Blanche qui s’impatiente d'un coup de téléphone depuis Téhéran. Or, les temps ont changé, les États-Unis ne sont plus en mesure d’imposer à ceux qui jouissent d'une indépendance et de la dignité nationale, un passage à la Maison Blanche pour se faire pardonner.

Pompeo doit se rendre à l'évidence que l’Iran n’agira pas comme un pays normal et ne renoncera pas à son programme balistique. Le dictionnaire de la Maison Blanche définit « normal » comme l’abandon de tous les outils de puissance pour attendre le même sort que la Libye, l’Irak et le Yémen. Vu l’intelligence dont les Iraniens ont fait preuve au cours de 40 années de crise engendrée par les États-Unis, ils sont loin de commettre la même stupidité que certains États arabes", estime l'éditorialiste de Rai al-Youm

Et d'ajouter: « Nous n’avons aucune confiance en Washington et aux déclarations des autorités américaines. Nous sommes certains que le pays se trouve face à un dilemme majeur au Moyen-Orient au nom de l’Iran et de l’axe de la Résistance qui renforce sa stratégie de dissuasion, non pas par les armes importées mais par sa production locale. Plus important encore, la Résistance a le pouvoir de décider de son sort sans être contrainte à céder aux menaces.

En substance, l'annulation des 12 conditions posées par les États-Unis pour la reprise des négociations avec l’Iran témoigne de la gravité de la situation dans laquelle ils se trouvent. Mike Pompeo tente de sauver à tout prix le peu de crédibilité qu'il reste au président Trump en évitant une guerre qui pourrait sonner le glas de l’empire US, à l'instar de la guerre d’Afghanistan qui a mis un terme à l’Union soviétique ou celle de la crise de Suez qui a aboli le colonialisme en général".

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV