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La France se trouve dans une situation pré-révolutionnaire (Financial Times)

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le président de la France, Emmanuel Macron. (Photo d’Archives)

Faisant référence à une prédiction de 2014 sur la possibilité d’une révolution en France, un article du quotidien britannique Financial Times, publié samedi 22 juin, a évalué la situation politique de ce pays européen, soulignant que ce scénario pourrait se réaliser dans un proche avenir.

En juin 2014, le magazine d’actualité parisien Le Point a déclaré : « la France se trouve désormais dans une situation pré-révolutionnaire où tout devient possible ». Dix ans plus tard, après la décision surprise d’Emmanuel Macron de convoquer ces élections législatives anticipées, la prédiction du Point est-elle sur le point de se réaliser?

Des extrêmes florissants

Le premier tour des élections aura lieu dans huit jours, et le deuxième tour le 7 juillet. Tout pronostic doit tenir compte de nombreuses incertitudes sur le niveau d’abstention et les blocs politiques qui seront au second tour.

Pour l’instant, la décision d’Emmanuel Macron semble se retourner contre lui. Pour le président et ses alliés, la campagne devait faire émerger un grand bloc de citoyens prêts à défendre les valeurs de la démocratie libérale modérée. Elle semble au contraire renforcer les extrêmes.

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L’argument est résumé par François Brousseau pour pour Radio Canada, citant un éditorial cette semaine dans le journal Le Figaro, qui avait pour titre: « La dissolution hara-kiri [de l’Assemblée nationale] par Emmanuel Macron ».

Brousseau rapporte les doutes du camp de Macron quant au bien-fondé de son pari. Il cite les propos du ministre des Finances Bruno Le Maire : « C’était la décision d’un seul homme. Elle a créé dans le pays de l’inquiétude, de l’incompréhension, parfois de la colère ».

Cet état d’esprit reflète les sondages. Ceux-ci prédisent que le Rassemblement National, le parti d’extrême droite de Marine Le Pen, remportera le plus grand nombre de sièges dans l’Assemblée nationale, qu’une coalition de gauche arrivera non loin derrière en deuxième place et que les alliés centristes du président termineront, loin derrière, en troisième place.

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Conséquences de la guerre en Ukraine

Un tel résultat serait certainement accueilli avec malaise par la plupart des dirigeants de l’UE et de l’OTAN. Viktor Orbán, le Premier ministre hongrois, semble toutefois être une exception. Lors d’une interview, il fait le lien entre la défaite de Macron aux élections européennes et le soutien de la France à l’Ukraine dans sa guerre avec la Russie.

« Dans le pays clé qu’est la France. . . là où se trouvent les personnes qui étaient peut-être les plus déterminés à envoyer des soldats occidentaux pour faire la guerre en Ukraine, le système politique a été renversé. Il faut maintenant y organiser des élections législatives anticipées, là où il y a de fortes chances que le parti favorable à la paix renouvelle la victoire [du 9 juin, lorsque les élections au Parlement européen ont été organisées] ».

Néanmoins, Orbán a raison lorsqu’il affirme qu’une deuxième défaite électorale de Macron en un mois pourrait avoir de graves conséquences sur la position pro-ukrainienne de la France.

En réaction aux propos du Premier ministre hongrois, Holger Schmieding, économiste allemand basé à Londres, a écrit dans le magazine en ligne The Globalist : « Alors que Macron, en tant que commandant en chef, pourrait probablement encore envoyer des armes [déjà allouées] ou peut-être même des soldats en Ukraine, l’Assemblée nationale pourrait lui refuser les fonds pour toute nouvelle initiative majeure ».

« Le signal qu’enverrait la fin de l’argent français pour l’Ukraine pourrait inciter encore plus [le président russe Vladimir] Poutine à croire qu’il peut l’emporter », a-t-il ajouté.

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Impasse constitutionnelle ou chaos

Dans une autre partie de l’article du journal The Financial Times, l’auteur a fait part des trois résultats les plus plausibles de l’élection :

1. Une majorité relative pour le camp de Macron ;

2. Une « cohabitation » avec une majorité du Rassemblement National à l’Assemblée et Macron nommant le lieutenant de Le Pen, Jordan Bardella, au poste de Premier ministre ;

3. Une Assemblée nationale sans majorité, dans laquelle aucun parti ou coalition n’a de majorité absolue et une fragmentation politique croissante.

Tullia Bocco, économiste de la banque UniCredit, basée à Milan, considère le premier résultat comme improbable, le deuxième comme possible et le troisième comme le plus probable. Elle écrit à ce propos : « Cela aggraverait l’impasse actuelle, le président ne pouvant dissoudre l’Assemblée nationale pendant un an, conformément à la Constitution française. À terme, Macron pourrait décider de sortir de l’impasse en convoquant de nouvelles élections présidentielles, dans l’espoir que cela apporterait une stabilité politique ».

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Risques économiques et budgétaires

Les perspectives budgétaires et économiques de la France n’étaient pas prometteuses avant que Macron ne déclenche la dissolution. Mais face à la perspective d’une République gouvernée par l’extrême droite et la gauche, les marchés financiers, les chefs d’entreprise et les partenaires européens de la France, sont plus ébranlés que jamais.

Le point de vue des marchés est résumé par Ludovic Subran, économiste en chef chez Allianz : « La gauche provoquerait une fuite des capitaux et l’extrême droite provoquerait une crise de la dette ainsi qu’un gouvernement technocratique [dans un parlement sans majorité], un peu des deux. La prime de risque française ne devrait pas reculer de sitôt ».

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1936 encore une fois ?

« La mention d’une possible fuite des capitaux m’incite à établir des parallèles entre cette élection et la célèbre campagne de 1936 remportée par le Front populaire, une coalition de gauche. La gauche d’aujourd’hui évoque consciemment l’esprit antifasciste de cette époque, se qualifiant de “Nouveau Front Populaire” », a ajouté Ludovic Subran.

Selon le Financial Times, il existe des similitudes étonnantes, mais aussi des différences cruciales.

Comme aujourd’hui, il y avait une menace intérieure d’extrême droite en France. Les émeutes ultranationalistes de février 1934 furent l’épisode le plus violent dans la capitale française depuis la Commune de Paris de 1871. Mais le RN se distingue des ligues d’extrême droite des années 1930 dans la mesure où il cherche à renverser l’establishment politique non pas dans la rue, mais dans les urnes.

En conclusion nous pouvons donc imaginer que le même scénario puisse se matérialiser dans le cas, plutôt improbable, ou le front de gauche gagnait. Quant à l’extrême droite, même si elle ne remporte pas les élections, ses chances d’accéder au pouvoir plus tard dans la décennie ne disparaîtront pas. En ce sens, la prédiction du Point en 2014 est toujours d’actualité.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV