Par Aref Karimi
Le ministre irakien des Affaires étrangères Fouad Hussein devrait se rendre à Téhéran mercredi 12 septembre, une semaine avant l'expiration de l'ultimatum lancé par l'Iran aux autorités irakiennes pour désarmer et relocaliser les groupes terroristes de la région du Kurdistan.
Lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue autrichien Alexander Schallenberg à Bagdad mardi, le chef de la diplomatie irakienne a souligné que Bagdad était attaché au pacte de sécurité avec Téhéran.
« Nous avons pris les mesures nécessaires pour nettoyer des zones situées le long de la frontière entre l'Irak et l'Iran de la présence des groupes armés », a déclaré Hussein. « Et à cette fin, je me rendrai demain à Téhéran pour m'entretenir sur ce sujet avec les autorités iraniennes. »
Depuis que l’Iran et l’Irak sont parvenus le mois dernier à un accord visant à désarmer et à expulser les groupes terroristes kurdes de la région semi-autonome du Kurdistan, dans le nord de l’Irak, les deux parties ont tenu une série de pourparlers à différents niveaux pour accélérer le processus et apaiser les inquiétudes légitimes de l’Iran.
Lors d’un entretien téléphonique samedi, avec le Premier ministre irakien, Mohammed Shia Al-Soudani, le président iranien Ebrahim Raïssi a réaffirmé que tout acte de provocation de la part de groupes terroristes et séparatistes déployés dans la région du Kurdistan irakien porterait atteinte à la sécurité régionale et qu’il ne serait pas toléré.
Lundi, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanaani, a souligné que l'ultimatum fixé aux autorités irakiennes pour désarmer et déplacer les groupes terroristes d'ici le 19 septembre ne serait pas prolongé.
Lundi également, d'éminents dirigeants kurdes ont tenu une série de réunions avec des responsables iraniens, à Téhéran et à Erbil, et ont réaffirmé leur engagement à assurer la sécurité à la frontière commune.
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, lors de sa rencontre avec Bafel Talabani, chef de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), à Téhéran, a souligné que la présence de terroristes dans la région du Kurdistan irakien viole la Constitution irakienne et qu’elle menacerait les liens avec l'Iran.
Selon un communiqué publié par le bureau de Talabani, il a déclaré qu’il souhaite parvenir à la stabilité et à la coexistence dans la région, pour lesquelles « nous soutenons un dialogue et une compréhension responsables et pensons que c'est le seul moyen de surmonter les problèmes et atteindre les objectifs nationaux ».
À Erbil, le président de la région du Kurdistan irakien, Nechirvan Barzani, s'est entretenu avec l'ambassadeur d'Iran à Bagdad Mohammad Kazem Ale-Sadeq et a déclaré que son gouvernement était attaché à l'accord de sécurité.
Quelle est la date limite pour désarmer les groupes terroristes ?
Il ne reste qu'une semaine avant le 19 septembre, date à laquelle l'Irak s'est engagé à désarmer et à relocaliser les groupes terroristes anti-iraniens dans la région du Kurdistan, conformément à un accord de sécurité conclu le mois dernier.
Fin août, Kanaani a déclaré que l’Iran et l’Irak avaient conclu un accord en vertu duquel le gouvernement irakien s’était engagé à désarmer les groupes terroristes et séparatistes kurdes.
Il a souligné que la date limite du 19 septembre ne serait en aucun cas prolongée et que l'Iran envisagerait d'autres options pour assurer sa sécurité si l'accord n'était pas mis en œuvre à temps.
Kanaani a également affirmé que les responsables irakiens avaient informé les autorités du gouvernement régional du Kurdistan des termes de l'accord, et que les agences des Nations unies étaient également au courant de la position de l'Iran.
La région du Kurdistan irakien, qui partage une frontière avec l’Iran, est devenue un repaire pour les groupes terroristes qui lancent souvent des attaques sur le territoire iranien et permettent également aux forces étrangères de cibler la République islamique.
Le ministre iranien du Renseignement, Esmaïl Khatib, a indiqué dimanche à l’antenne d’une chaîne de télévision iranienne que la région autonome était devenue un bastion de terroristes et de séparatistes cherchant à porter préjudice à l'Iran.
Les forces iraniennes ont lancé à plusieurs reprises des frappes aériennes contre des positions terroristes dans la région et ont averti à plusieurs reprises les autorités de Bagdad et d'Erbil d'agir contre les groupes soutenus par les États-Unis et Israël.
Quels sont ces groupes terroristes ?
Les groupes terroristes opérant dans le nord de l'Irak contre l'Iran comprennent le Parti Komala, le Parti démocratique du Kurdistan iranien (PDKI), le Parti de la liberté du Kurdistan (PAK), le Parti pour la vie libre du Kurdistan (PJAK) et Khabat.
Ils coopèrent souvent en réseau et sont connectés à d’autres groupes similaires. Le PJAK est affilié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui opère en Turquie, et Khabat entretient des liens étroits avec l'Organisation terroriste Moudjahidine-e-Khalq (OMK), dont le siège est en Albanie.
Tous ces groupes terroristes sont des résidus de la guerre froide, aux idéologies dépassées importées de l’ex-Union soviétique. Ils ont été créés comme des marionnettes de Moscou dans le but de déstabiliser et d’étendre l’influence soviétique en Asie de l’Ouest.
Les idéologies autoproclamées de tous ces groupes terroristes ne sont qu'à des fins publicitaires puisqu'ils agissent en réalité comme des mercenaires de guérilla et coopèrent avec quiconque leur offre un abri, des armes et de l'argent.
Bien qu’ils se présentent tous comme des combattants pour les droits de la minorité kurde, ils étaient très satisfaits du fait que le régime baathiste anti-iranien de Saddam Hussein ait commis pendant des décennies des crimes terribles contre les Iraniens et les Kurdes irakiens.
Ils ont ensuite changé de camp et, malgré leurs prétendus principes socialistes, ont coopéré avec les régimes occidentaux qui les ont massivement financés et ont parfois hébergé leurs dirigeants.
Ils ne jouissent donc pas d’une réputation même auprès de la population kurde et des deux plus grands Partis du Kurdistan irakien, à savoir le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK).
Ils ne comptent tous que quelques centaines de membres et leur mode opératoire se réduit à la guérilla dans les montagnes et aux attaques contre les gardes-frontières iraniens.
Comment les groupes terroristes kurdes ont-ils alimenté les émeutes en Iran ?
Ces dernières années, ils ont également participé à une guerre hybride contre la République islamique avec leurs sponsors étrangers, notamment l’année dernière lorsqu’ils ont eu recours à des attaques terroristes dans le but d’attiser les flammes d’émeutes meurtrières orchestrées par l’Occident.
En octobre de l’année dernière, le ministre iranien de l’Intérieur Ahmad Vahidi a confirmé que des groupes terroristes soutenus par l’Occident et les sionistes dans le nord de l’Irak menaient les émeutes en Iran pour fomenter la sédition et déclencher la sécession.
Dans son discours prononcé lundi devant les représentants des provinces du sud-est, le Leader de la RII l’honorable Ayatollah Seyyed Ali Khamenei a précisé que l'année dernière, l'Iran avait été frappé par un cocktail d'actions subversives.
Selon l’honorable Ayatollah Khamenei, le régime américain a interprété les zones présentant des différences ethniques et religieuses comme les points faibles de l'Iran et s'est concentré sur l'incitation au désordre dans le sud-est du pays et au Kurdistan iranien.
En septembre de l'année dernière, au milieu des émeutes en Iran, le Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) a mené une attaque d'artillerie contre les quartiers généraux de ces groupes terroristes au Kurdistan irakien. Il a alors annoncé que l’attaque avait été menée après « l’arrivée d’équipes terroristes et de la découverte d’une importante cache d’armes » dans le nord-est de l’Iran, destinés à « fomenter des troubles ».
Qui sont les fauteurs de troubles étrangers ?
De la même manière que Saddam Hussein les a vus lors de son agression contre l’Iran dans les années 1980, certains régimes occidentaux considèrent également ces groupes terroristes kurdes comme des atouts ou des pions contre l’Iran.
Parmi eux se trouvent les États-Unis, dont le soutien est indiscutable et confirmé par les plus hauts responsables américains, parmi lesquels le député Dennis Kucinich et le conseiller en renseignement militaire Brent Scowcroft.
Depuis la présidence de George W. Bush, Washington considère ces groupes comme des outils d’agression contre l’Iran, à l’image de la situation en Syrie où, en coopération avec des militants kurdes, ils maintiennent le nord-est du pays occupé.
La position des groupes terroristes anti-iraniens dans le nord de l’Irak est très comparable à celle des anciens camps d’Achraf et de Liberty, qui ont survécu pendant 13 ans avec le soutien militaire américain malgré le maintien par Bagdad de l’OMK sur sa liste officielle des groupes terroristes.
La relocalisation ultérieure des terroristes de l’OMK en Albanie par des avions américains et l’utilisation de leurs membres dans une guerre hybride anti-iranienne à long terme révèle les véritables intentions de Washington à l’égard de telles organisations.
Les déclarations des hommes politiques d’Irak et de la région du Kurdistan confirment également que l’accueil de terroristes anti-iraniens n’est pas leur volonté, mais qu’ils y sont contraints par les États-Unis.
La même contrainte existe dans le cas même de la présence des bases militaires américaines en Irak, malgré des années d’appels du Parlement irakien pour que les troupes étrangères quittent ce pays.
L’ancien président américain Donald Trump a menacé de saisir des milliards d’Irakiens si les troupes américaines étaient expulsées, et l’administration de Joe Biden a suivi la même politique intransigeante.
Parmi les autres fauteurs de troubles figure le régime israélien, dont il existe des cas bien documentés de formation et de fourniture d’armes et d’équipements à des terroristes anti-iraniens.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a ouvertement appelé à la désintégration de l'Irak et de l'Iran.
Par ailleurs, une politique hostile est également menée par la France, qui offre refuge aux dirigeants et membres des groupes terroristes qui attaquent régulièrement l’ambassade iranienne à Paris et dont les lobbyistes comme Bernard Kouchner et Bernard-Henri Lévy prônent ouvertement le séparatisme kurde.
Aref Karimi est un écrivain et chercheur basé à Téhéran.