Et si c'était un début pour arracher aux mains des yankees le pétrole irakien? Depuis 2003, date de l'invasion de l'Irak par Bush et de l'emprise US sur le pétrole irakien, les récentes devises pétrolières du pays sont prises en otage dans les banques new-yorkaises, l'Etat irakien interdit d'en disposer sans le feu vert US . C'est ainsi que l'Irak s'est endetté auprès de l'Iran pour un montant de plusieurs milliards de dollars, les USA lui ayant interdit d'honorer sa dette pour l'électricité achetée auprès de l'Iran. Mais la crise du gaz liée à la guerre en Ukraine pourra-t-elle contribuer paradoxalement à réduire le poids US dans le secteur pétrolier irakien?
L’idée de l’exportation pétrolière russo-iranienne vers l’Inde et la Chine, à un prix en dessous du prix mondial, a augmenté les inquiétudes quant à l’avenir de l’exportation du pétrole de l’Irak, que l'Amérique gère en sous-main et évidemment à son propre avantage, et ce depuis 2003.
Les derniers rapports rangeaient l’Irak parmi les plus grands gagnants des évaluations du marché de pétrole ; Mais avec la baisse de demande de pétrole (toute sorte confondue) de la part de la Chine et de l’Inde change la donne. Pourquoi cette baisse?
L’économiste Ahmed Saddam estime qu’il est naturel que la décision de la Russie de diminuer le prix de chaque baril de pétrole exporté à l’Inde et à la Chine et ce pour cause des sanctions US, pousse les demandeurs de pétrole à changer de source : « L’exportation de pétrole de Russie a augmenté de 15.5% tandis que son importation de pétrole depuis l’Irak a diminué de 10.5%. Il y a en plus l’Iran qui a envisagé et appliqué des réductions de plus de 10 dollars pour son pétrole exporté. Et tout cela a pratiquement et officiellement ôté le marché de pétrole chinois à l’Irak. Au fait il s'agit d'un duo irano-russe qui en coordonnant leur rabais imposé leur règle du jeu ».
Et l’économiste de poursuivre : « Ce changement de niveau de demande signifie une perte même s’il n'y a pas de mise à l’écart des autres marchés de pétrole y compris celui de l’Irak, deuxième source de pétrole de l’Inde après l’Arabie saoudite, et cela malgré la baisse des prix du pétrole. Le niveau des importations indiennes de Russie constitue seulement 19% de toute la demande de ce pays, estimée à environ 5 millions de barils de pétrole par jour. En effet l’Inde importe presque 950 000 barils par jour de pétrole de Russie tandis que la Chine importe 860 000 barils par jour de Russie et 700 000 d’Iran. L’Irak n’a donc d’autre choix que de diversifier ses destinations d’exportation pétrolière, l’Europe et les États-Unis étant parmi les meilleurs bien que cela fait des années que l'Occident dispose du pétrole irakien. »
En effet il semble que les sanctions anti russe et anti iranien commencent à montrer leurs limites et que par un retour de manivelle elles pèsent désormais sur le pétrole de ceux des membres de l'OPEP dont le pétrole se vend suivant les impératifs du marché US.
L’analyste économique, Midhat Kadhim al-Qurayshi estime, pour sa part, que le prix de pétrole a augmenté, tout d’abord, en raison des sanctions anti Russie et puis de l’inflation économique en Europe et dans le monde entier.
« Les marchés de pétrole restent instables pour cause des facteurs négatifs et positifs. On ne peut pas donc prévenir ce qui se passerait pour le marché de pétrole sans prendre en compte la guerre en Ukraine et ses répercussions ».
Entre temps, Abdel-Rahman Al-Mshhadani, professeur d’université met en garde contre une nouvelle crise : « Nous ne devons pas être optimiste envers cette hausse actuelle des prix de pétrole car elle n’est pas réelle. Le gouvernement doit donc agir rationnellement. »
« Lorsque la Russie vend le pétrole à la Chine et à l’Inde 35% moins du prix mondial, cela sera certes, au détriment des intérêts des producteurs en Irak et au golfe Persique et conduirait donc ces derniers à se précipiter à diminuer les prix. C'est d'autant plus indispensable que Russes et Iraniens agissent de concert », ajoute Al-Mshhadani rappelant que le degré des dégâts dus à la future crise pétrolière serait différent pour les alliés pétroliers US au sein de l'OPEP : « La dépendance des pays du bassin du golfe Persique à la politique américaine neutralise de facto le cumul de leurs ressources financières et crée des déficits géants. Idem pour l'Irak, où une baisse des prix aura une influence considérable sur ce pays qui manque de fonds et de réserves gouvernementaux sauf des réserves de banque centrale elle aussi gérée par les Américains. »
Et l’analyste de poursuivre : « Le rapprochement russo-iranien conduirait à une chute essentielle des prix car les deux pays, pompent, ensemble, environ 7 millions de barils de brut par jour vers les marchés du sud de l’Asie de l’Est dont et surtout la Chine et l’Inde. »
De son côté, l’analyste pétrolier, Hamza Al-Jawaheri estime que les impacts de la baisse des prix de pétrole par l’Iran et la Russie sur l’économie de l’Irak ne seraient pas constatés de si tôt : « La quantité du pétrole consommé par le monde est fixe, lorsqu’on empêche le pétrole iranien ou russe de parvenir à l’Europe, il sera donc transféré vers l’Inde et la Chine, et l’Europe devra donc trouver une alternative : l’Irak et l’Arabie saoudite sont les meilleurs. Sauf que là encore le dernier mot revient a l’Amérique. »