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Ce que risque les USA si le trône saoudien continue à combattre Ansarallah

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Les combattants d'Ansarallah aux portes de Maarib./Tasnim

L’opération saoudienne de « Tempête décisive » a été un fiasco et maintenant la seule façon d’y mettre un terme est la diplomatie, estime l'analyste de la fondation Jamestown, Michael Horton. 

Le site d’analyse « Responsible Statecraft » a publié le 19 avril, une note de Michael Horton portant sur les derniers événements au Yémen et la défaite de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite dans ce pays.

Michael Horton est membre de la fondation Jamestown, un institut de recherche et d’analyse fondé en 1984 dont le siège est à Washington D.C.

« Comment les Houthis ont-ils tout déjoué et vaincu tout le monde ? », tel est le titre de l’article de Michael Horton.

Le mois dernier a marqué le sixième anniversaire de l’intervention militaire au Yémen d’une coalition dirigée par l’Arabie saoudite, baptisée « Tempête décisive ». Pourtant, « le royaume et ses partenaires de la coalition n’ont rien accompli de décisif au Yémen, si ce n’est le renforcement de la situation d’Ansarallah et de ses alliés », estime l’auteur.

L’objectif principal de la campagne, qui devait durer quelques semaines à peine, était de forcer le retrait des Houthis de la capitale yéménite, Sanaa. Pourtant, plutôt que d’affaiblir le mouvement Ansarallah, l’intervention saoudienne au Yémen a renforcé le mouvement et ses alliés politiquement et militairement.

Les Émirats arabes unis, qui étaient les principaux alliés de Riyad dans la guerre au Yémen, ont fini par reconnaître la nécessité de nouvelles approches et de recalibrer leurs politiques au Yémen et dans la région au sens large. Les Émirats arabes unis ont retiré la plupart de leurs forces armées du Yémen en 2019 et ont réduit leur implication directe, même s’ils restent toujours profondément impliqués dans le sud du pays.

L'Arabie saoudite devrait, comme les Émirats arabes unis, adopter une approche plus réaliste pour atteindre au moins une partie de ses objectifs au Yémen.

Selon Michael Horton, si l’Arabie saoudite veut se sortir du bourbier yéménite, elle doit remplacer l’intervention militaire par un engagement diplomatique et économique renouvelé et révisé avec un éventail d’acteurs yéménites.

« En poursuivant son intervention armée actuelle, l’Arabie saoudite risque de garantir que les problèmes auxquels elle est confrontée au Yémen deviennent de plus en plus insolubles », estime l’analyste.

Le principal de ces problèmes est le développement par les Houthis d’une gamme de drones, de roquettes et de missiles. En réponse aux attaques aériennes continues de l’Arabie saoudite contre les zones contrôlées par Ansarallah et l’armée yéménite, ces derniers ont principalement utilisé des drones, des roquettes et des missiles armés produits localement pour frapper des cibles en Arabie saoudite. Les Yéménites se sont également révélés tout aussi aptes à mener des attaques transfrontalières au plus profond du territoire saoudien en utilisant souvent des drones de surveillance pour diriger leurs combattants à contourner les obstacles et à avancer vers des cibles.

Les Yéménites eux-mêmes ont été à l’origine de ces innovations, et ce, d’autant plus que bon nombre des ingénieurs et officiers les plus compétents de l’armée yéménite et de l’armée de l’air y ont contribué grandement. Ces personnes, dont beaucoup avaient été éduquées et formées à l'étranger, étaient habituées à entretenir des systèmes d’armes relativement complexes avec des pièces de rechange et des budgets limités. Un esprit d’improvisation et d’ingéniosité forcée a imprégné les efforts menés par les officiers et sous-officiers chargés de l’entretien des systèmes d’armes du Yémen.

L’intervention saoudienne a renforcé les efforts des Yéménites pour développer des armes capables de frapper des cibles saoudiennes. Dans un exemple frappant de ce que le professeur Eric von Hippel du MIT (Massachusetts Institute of Technology) appelle la « démocratisation de l’innovation», les Yéménites ont bénéficié d’un accès à une assistance technique via Internet, l’impression 3D et des solutions avancées facilement accessibles. Ceci, combiné à une base de connaissances solide, des systèmes d’armes existants a permis aux officiers yéménites de constituer une panoplie d’armes qui amplifient les tactiques asymétriques qu’ils emploient.

Dans le même temps, les personnes qui construisent et utilisent les armes affinent continuellement leurs conceptions en incorporant les commentaires en temps réel des attaques échouées et réussies.

Michael Horton écrit : « Les forces yéménites sont militairement agiles. Comme tous les groupes de guérilla, ils ont dû l’être pour réussir. L’armée saoudienne ne s’est ni adaptée ni évoluée d’une manière qui lui permette de les combattre. »

L’auteur ajoute que pendant ces années, les forces yéménites ont prouvé qu’elles peuvent pénétrer dans le champ d’action de l’armée saoudienne et perturber les mesures que les Saoudiens prennent pour observer, orienter, décider et agir.

« Il est peu probable que cela change, étant donné la capacité des Yéménites à tirer parti du fait qu’ils se battent chez eux », estime Michael Horton qui ajoute que les drones et les fusées peu coûteux et de plus en plus sophistiqués que les Yéménites déploient pour renforcer leurs avantages en tant que puissance militaire légère, rapide et adaptable. Selon l’analyste de la Fondation de Jamestown, six années de guerre ont montré que ni l’Arabie saoudite (avec le soutien américain) ni les Émirats arabes unis et leurs mandataires ne peuvent vaincre militairement les Yéménites. « Au lieu de cela, l’intervention armée ne fait que pousser les Yéménites à exceller dans ce pour quoi ils sont le mieux : se battre », écrit l’auteur.

D’après Michael Horton, l’administration Joe Biden semble comprendre cela et exerce soigneusement des pressions sur le royaume pour essayer différentes approches pour désamorcer la guerre au Yémen. « Les États-Unis devraient aider l’Arabie saoudite à s’aider elle-même », a-t-il estimé.

Horton conclut : « L’incapacité de reconnaître l’échec de la guerre risque de conduire l’Arabie saoudite vers des cycles de violence avec des conséquences toujours plus graves pour le Yémen et la région. »

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV