L’ambassadeur turc en Iran vient d’être convoqué au ministère des Affaires étrangères, pour des propos tenus par le ministère turc, comme quoi les « terroristes kurdes » se trouveraient en territoire iranien. Évidemment le coup de bluff n'est pas anodin. Il y a quelques heures l'ambassadeur iranien à Bagdad a vivement dénoncé l’agression turque contre le nord de l'Irak et partant, sa convoitise visant Sinjar, ce qui a poussé Ankara à convoquer l’ambassadeur iranien en Turquie. Que fait la Turquie en Irak?
L’Agence de presse turque Anadolou a annoncé que l’ambassadeur iranien avait été convoqué, dimanche 28 février, en raison des propos qu’il avait tenus concernant les attaques de l’armée turque dans le nord de l’Irak.
« La Turquie s’attend à ce que l’Iran la soutienne dans la lutte contre le terrorisme au lieu de s’y opposer », a prétendu le ministère turc des Affaires étrangères.
Dans la foulée, l’ambassadeur de la République islamique d’Iran en poste à Bagdad, Iradj Masdjedi, a déclaré lors d’un entretien avec la télévision kurde Rudaw que les évolutions à Sinjar n’avaient rien à voir avec la Turquie. « C’est une question qui ne concerne que les Irakiens et ce sont eux qui devront la régler », a-t-il ajouté.
Lire aussi: Irak : que cherche la Turquie ? (Débat)
Iradj Masdjedi a déclaré que la République islamique d’Iran s’opposait à toute agression ou toute menace de la part de la Turquie ou d’autres pays contre l’Irak.
Il a rappelé que « ce sont les Irakiens qui devraient assurer la sécurité dans leur pays et il faut également que les forces kurdes garantissent la sécurité de la région du Kurdistan ».
« Les forces turques devront se retirer vers les frontières de la Turquie et permettre que la sécurité de l’Irak soit rétablie par les Irakiens eux-mêmes », a souligné le diplomate iranien.
Il a indiqué que la République islamique d’Iran s’opposait catégoriquement à toute attaque visant des représentations diplomatiques à l’intérieur de l’Irak.
Mais que cherche la Turquie au Kurdistan irakien ?
Au moins 39 membres du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) ont perdu la vie dans une seule région montagneuse du Kurdistan irakien alors que l’aviation turque y avait envoyé en mission une quarantaine d’avions de chasse, ce qui révèle la ferme volonté de la Turquie de prendre le contrôle de la région stratégique de Gara.
Le 12 février, l’armée de terre turque profitant d’une couverture aérienne a lancé une vaste opération militaire dans le nord de l’Irak sous prétexte de combattre les éléments du PKK, opération qui a infligé d’importantes pertes aux éléments du PKK.
Lire aussi: Toutes les guerres qu’Erdogan a imposées à l’armée turque
Ladite opération a visé une délicate zone montagneuse dite Gara qui fait partie d’une région étant sous le contrôle de Barzani, et ce, alors que les principaux repaires du PKK se trouvent tous dans les monts Qandil et les régions contrôlées par la famille Talabani.
L’un des objectifs stratégiques de la Turquie est de rompre la ligne de communication fréquentée par les éléments du PKK, qui relie le mont Qandil à la frontière turco-syrienne.
Il existe deux importants facteurs qui ne permettent pas aux éléments du PKK de franchir la frontière turque pour perpétrer des attaques dans les villes : les appareils de supervision aérienne et les systèmes de surveillance frontalière. Pendant les dernières années, la Turquie a mis à la disposition de l’armée et du ministère de l’Intérieur une centaine de drones armés et non armés qui rendent presque impossible pour le PKK de faire le moindre agissement.
En plus des drones, le service de renseignement turc se sert des images satellites, des caméras écologiques munies des capteurs de haute sensibilité, des ballons équipés de caméra, des caméras de vision nocturne et finalement de la population locale de villages frontaliers.
Beaucoup sont des analystes étant d’avis que le prochain pas à franchir par la Turquie serait d’attaquer Sinjar.
À présent, Sinjar est sous le contrôle conjoint de Bagdad et du Kurdistan irakien, mais la Turquie suppose que des dizaines de miliciens yézidis, affiliés au PKK, opèrent dans cette région.
De leur côté, les dirigeants du Kurdistan irakien réaffirment que la présence illégale des éléments du PKK dans le nord de l’Irak est un prétexte saisi par la Turquie pour justifier ses offensives qui risquent de mettre en péril la vie des habitants des villages.