Les avions ou drones américains ne sont plus en sécurité dans le ciel libyen. L'Armée nationale libyenne a annoncé une zone d'exclusion aérienne où tout avion ou drone agresseur sera visé...la décision a été prise juste au lendemain de l'avertissement lancé par le président égyptien selon lequel il interviendrait militairement si "des forces du GNA, soutenues par la Turquie attaquaient la ville stratégique de Syrte".
Cette zone d'exclusion aérienne s'étend à plus de 200 km, au-dessus de l'Ouest libyen à l'entrée de laquelle, "toutes les cibles aériennes seront attaquées sans aucun avertissement". Cette interdiction s'applique également aux États-Unis.
La décision de l’ANL a été prise, juste au lendemain de l’annonce par le président égyptien de la disponibilité de son armée d’intervenir en aide à l’ANL, et quelques heures seulement avant la visite de la délégation américaine, déplacée en Libye pour discuter de certains plans militaires avec les forces du GNA. Selon des analystes, l'Armée nationale libyenne, l'Egypte, les Émirats arabes unis et un certain nombre d'autres alliés de Haftar, dont probablement la Russie, ont l'intention de lancer bientôt une opération militaire à grande échelle pour libérer la Libye.
C'est sans doute en ce sens que l'Égypte vient d’expédier ses chasseurs F-16 en Libye soutenir les forces de l'ANL. Des images diffusées sur le Twitter montrent des chasseurs égyptiens F-16C / D qui ont quitté la base aérienne de Sidi Barrani dans le nord-ouest de l'Égypte et qui se sont dirigés vers Misrata.
Le président égyptien a prononcé le 20 juin un discours sur la Libye en présence des représentants des tribus libyennes et des commandants de haut rang des forces armées égyptiennes : « Toute intervention directe de l'Égypte en Libye est devenue légitime conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et à l'appel de l'autorité légitime en Libye . Al-Jufra et Syrte sont une ligne rouge ... Le parti, qui ne la respecterait pas, n'atteindrait ni l'ouest ni l'est. »
Il est vrai que l'avenir de la ville stratégique de Syrte, située au milieu entre l'est et l'ouest, déterminera le sort de la guerre qui fait actuellement rage sur le sol libyen, et qui est menée par des parties locales, régionales et internationales, comme l’affirme, dans un récent article, le rédacteur en chef de Rai al-Youm, Abdelbari Atwan.
« La paix ou la guerre, les déclarations du président Sissi ont été soigneusement envoyées au gouvernement d’al-Wefaq et gouvernement turc qui le soutient. Le contrôle turc de la ville de Syrte signifie d'abord contrôler la capitale Tripoli et contrôler la base aérienne de Qardabiya en second lieu, pour avancer ensuite vers l'ouest pour contrôler le croissant pétrolier, et vers le sud pour récupérer la ville d’al-Jufra et contrôler en troisième lieu la côte africaine », affirme Atwan. On sait parfaitement que le gaz offshore libyen est déjà entre les mains de l'axe USA/OTAN par Turquie interposée. Si le croissant pétrolier situé à l'ouest tombe, ce sera aussi le pétrole libyen qui partira dans le camp USA/OTAN. L'Égypte se soulève-t-elle contre l'axe USA/OTAN? Le fait qu'il menace d'abattre les avions US témoigne d'une chose : l'Égypte de Sissi n'est pas toujours sur la même longueur d'onde que le camp atlantiste. D'où "cette priorité à donner à la Libye qui une fois tombée entre les mains de l'OTAN et transformée en une zone où planter des bases militaires occidentales, présenterait un foyer d'instabilité permanente contre l'Égypte. Tout comme le Sinaï où les terroristes daechistes à la solde du Mossad ne cesse d'agir contre l'armée égyptienne. Mais Sissi est-conscient des risques d'enlisements?
« Sans doute. Mais face à une menace aussi grande contre la sécurité nationale égyptienne, Le Caire n'a pas trop de choix. Après tout l'Égypte n'a ni combattu la Syrie, ni a pris part dans la guerre contre le Yémen. Son alliance avec Abou Dhabi et Riyad semblent être dictés par les intérêts économiques. ».
Ces phrases s'adressent principalement au peuple égyptien, car il fournit les arguments et la couverture politique pour mener cette guerre, et il mobilise ce peuple pour contourner le leadership s'il décide de le combattre, et à son tour le supporter pour toute perte humaine qui en résultera inévitablement. La "deuxième" guerre libyenne, si elle est déclenchée, changera les cartes du bassin du Moyen-Orient et les équations de forces qui s'y trouvent, déstabilisera le pays de l'Union du Maghreb et divisera l'alliance de l'OTAN », conclut Atwan.