Près d'un an après la spectaculaire attaque simultanée de 21 drones et missiles de croisière d'Ansarallah, contre la raffinerie d'Abqaiq, attaque dont les impacts n'ont pas été moins dévastateurs que la guerre pétrolière qu'entretiennent les USA contre Riyad pour sauver leur schiste, le secrétaire général de l'ONU en accuse l'Iran. Dans un rapport, scientifiquement bâclé, son secrétariat dit que les "missiles impliqués" dans l'attaque du 14 septembre 2019 sont "d'origine iranienne" ou porte des "inscriptions persanes"!
« Certains articles saisis ont des caractéristiques de conception similaires à celles également produites par une entité commerciale en Iran, ou portent des marques farsi et certains ont été livrés au Yémen entre février 2016 et avril 2018 ».
Outre que ce serait de loin la première fois qu'un "trafiquant de missiles" ferait inscrire son propre nom sur l'objet de son trafic, le nouveau rapport du secrétaire général des Nations unies est en totale contradiction avec le précédent car ce même M. Guterres avait déclaré, le 10 décembre 2019, dans un rapport destiné au Conseil de sécurité, qu’il n’existait aucune preuve faisant part de l’implication de l’Iran dans les attaques contre Aramco.
Pour ceux et celles des analystes qui assistent ces jours-ci à l’obsession, à la limite du pathétisme de Pompeo, à proroger l'embargo sur la vente d'armes à l'Iran, et ce, au milieux du désaveu retentissant de la Chine et de la Russie et la réticence européenne, le rapport de Guterres qui, tout au long de ces deux derniers mois, a tenté de stopper, par offre de trêves bidons, la marche triomphante d'Ansarallah sur Maarib n'a rien d'inattendu, surtout que le principal intéressé, l'Arabie des Salmane, à plus d'une reprise mordue par "Big Brother", ne semble plus avoir trop d'humour de chercher querelle à l'Iran et affichant un silence bien significatif, préférerait même que les tension en restent là. Au stade où en est MBS, il ne peut à la limite ou signer un accord avec Sanaa, ou soutenir le démembrement du Yémen ou appuyer le gouvernement démissionnaire castrés de Hadi ou former un Etat parallèle et dans tous ces cas de figures, Riyad est perdant. Alors pourquoi greffer une crise avec l'Iran sur ce tas d'échecs?
Puis la coalition sait mieux que quiconque qu'Ansarallah qu'elle a été amené de force à reconnaître est un "fabriquant d'engin" : des missiles et des drones fournis par un arsenal soviétique resté en héritage de l'époque Saleh, Ansarallah les a manié pour établir un rapport de dissuasion qui ne cesse que de gagner en ampleur. Les vidéos d'Al-Masirah c'est toute une école militaire. La Résistance yéménite a dévoilé en juillet 2019 le missile de croisière Qods, capable de viser des objets de taille d'une voiture et ce à une distance bien importante. Aussi, ni Guterres ni personne d'autre au monde ne saurait nier à Ansarallah ses capacités avérées de combat et de fabrique d'armes.
Quand à l'Iran, il a bien prouvé qu'il est, bien au contraire de ses ennemis, la seule partie qui s'assume.
En réaction à ce rapport controversé, Téhéran a souligné qu’il assumait la responsabilité d’une attaque, s’il en était à l’origine et les Etats-Unis savent très bien qu'il est ainsi pour avoir été au moins une fois la cible des missiles iraniens à Aïn al-Asad :
Mais à quoi joue très exactement l'Amérique? Les analystes politiques soulignent que derrière cette nouvelle campagne anti iranienne US visant à bloquer le marché iranien aux armements chinois et russes, à empêcher l'Iran de moderniser sa flotte aérienne et ce par crainte de voir les chasseurs iraniens "chasser" les avions de combat US et Israël dans le ciel de la région, il y a un autre jeu qui se cache.
L’administration Donald Trump a l’intention de détruire le régime de contrôle de la technologie des missiles et de drone – un accord international qui existe depuis 1987. C'est un accord informel de 35 Etats, dont la Russie, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France, et d'autres que Trump veut briser dans le cadre de la promotion des intérêts de sociétés militaires telles que General Atomics Aeronautical Systems et Northrop Grumman. Ainsi, ces sociétés pourront vendre leurs missiles et leurs drones à d’autres pays avec évidemment en fliligrane les clients potentiels, l'Arabie, la Jordanie ou les Emirats arabes unis. Mais là n'est que le bon aspect de la chose contre un mauvais, le "risque que la technologie américaine jusqu'ici parcimonieusement gardé dans le cénacle du Pentagone, tombe en de mauvaises mains".
« Si nous ne pouvons pas rivaliser avec la Chine ou la Russie qui vendent à vrac leurs drones, nous nous tirons une balle dans le pied », dit d'ailleurs la Direction de la sécurité des technologies de défense du Pentagone. Il existe donc le risque que l'Iran une fois l'embargo levée, accède à la technologie US cette fois, non pas par ses capacités d'interception mais par des contrats d’armement.
Mais il y a plus : dans un article daté du 12 juin, The Drive, la revue militaire US, affirme que l'une des principales raisons de cette décision, est que "les drones Global Hawk ne se vendent plus aux Etats-Unis et qu'un marché international s'impose" : "La chaîne de production MQ-9 Reaper va à sa fin, le MQ-1 et MQ-4 Predator sont déjà retirés, le Avenger est apparemment mort-né, du moins en termes de commandes nationales robustes, ... le secteur de drone US est en état de catastrophe... Un marché étranger s'impose". Mais est-ce une bonne idée que de moyen-orientaliser le Reaper US quand on sait que les batteries de Khordad-3 iraniens en a chassé en 2019 et a totalement discrédité la marque? The Drive reconnaît qu'il y a de "sérieux défauts" à cette idée, surtout que le principal vendeur de drone au Moyen Orient n'est pas la Chine mais Israël"!