TV

Les courbettes du roi Salmane devant Donald Trump

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
La base militaire navale de Pensacola en Floride, théâtre d'une fusillade le 6 décembre 2019. ©AFP

Les États-Unis tentent encore une fois d'extorquer de l’argent à l'Arabie saoudite. La fusillade dans la base aéronavale américaine de Pensacola, en Floride, menée par l'officier saoudien Mohammad al-Shammirani qui a fait quatre morts et les excuses immédiates du roi Salmane à Donald Trump ouvrent un nouveau chapitre des humiliations subies par le régime saoudien.

Et les exemples de ces humiliations ne sont pas moindres : après que le prince héritier Ben Salmane a rencontré Donald Trump à la Maison Blanche en mars 2018, ce dernier aurait demandé à son personnel de bien nettoyer les meubles sur lesquels Ben Salmane s’était assis pour « en éradiquer le moindre pou ».

Une autre fois, il a considéré l’Arabie saoudite comme « une vache laitière qui nous fournit, quand on le veut, de l'or et des dollars. Une fois son lait terminé, nous l’égorgerons ».

Rompant avec l'usage diplomatique, le président américain Donald Trump a révélé devant ses partisans, réunis lors d'un meeting organisé à Southaven, dans le Mississippi, le contenu d'une conversation téléphonique qu'il a eue en octobre 2018 avec le roi Salmane. « Nous protégeons l'Arabie saoudite. Vous diriez qu'ils sont riches », a-t-il lancé à ses supporteurs selon Reuters. « Et j'adore le roi, le roi Salmane. Mais je lui ai dit : Roi, nous vous protégeons – et vous ne seriez peut-être pas là plus de deux semaines sans nous –, vous avez à payer pour votre armée. »

Le président américain n'a pas manqué de rappeler en mars 2018 à la télévision la conclusion de près de 380 milliards de dollars de contrats avec le royaume wahhabite, lors d'une visite à Washington du prince héritier saoudien plongeant alors son hôte dans un certain embarras. « Pour vous, ce sont des cacahuètes ! » s'est-il écrié devant MBS en brandissant une pancarte sur laquelle figuraient les photos des divers avions et armes achetés par l'Arabie saoudite aux États-Unis.

En avril dernier, Donald Trump a évoqué son soutien à l'Arabie saoudite lors d'une réunion publique dans le Wisconsin, le justifiant par les milliards dépensés par la monarchie wahhabite : « L'Arabie saoudite, un pays très riche, nous les défendons, nous subventionnons l'Arabie saoudite. Ils n'ont rien à part du cash, n'est-ce pas ? Nous les subventionnons. Et ils achètent beaucoup auprès de nous, 450 milliards de dollars, ils ont acheté. Vous savez, il y a des gens qui voulaient que l'on coupe les vivres à l'Arabie saoudite. Ils en ont acheté pour 450 milliards. Je ne veux pas les perdre! Mais avec l'armée, nous subventionnons l'Arabie saoudite! »

Donald Trump est un habitué des critiques sur les dépenses liées à la défense d'autres pays, qu'il compare au retour financier souvent insuffisant à ses yeux. « Ce n'est pas juste, on les défend et ils sont riches. On peut défendre des pays horriblement mal traités, avec les droits humains et autres, c'est différent. Mais ce sont des pays riches. Il a suffi d'un appel et nous avons ramassé 500 millions de dollars. Ce n'est pas mal. Et nous allons faire ça avec de nombreux autres pays. »

Dernier coup bas en date de Trump

Quatre Américains ont été tués lors d’une fusillade ce vendredi 6 décembre sur la base aéronavale américaine de Pensacola, en Floride. La fusillade a eu lieu dans une des salles de cours de la base de Pensacola, a indiqué David Morgan. Le site est utilisé par l’US Navy pour des programmes d’entraînement destinés aux militaires de pays alliés. Le tireur était un Saoudien, membre de l’armée de l’air de son pays, présent aux États-Unis pour une formation.

Dans un appel à Donald Trump, le roi Salmane a aussitôt dénoncé cette attaque « barbare », a indiqué le président américain sur Twitter. « Le roi Salmane d’Arabie saoudite m’a appelé pour présenter ses sincères condoléances et exprimer sa sympathie aux familles et aux amis des combattants qui ont été tués et blessés lors de l’attaque qui a eu lieu à Pensacola, Floride », a tweeté le locataire de la Maison Blanche.

« Le roi a dit que le peuple saoudien était indigné par l’acte barbare du tireur, et que cette personne ne représentait en aucune façon les sentiments du peuple saoudien, qui aime le peuple américain », a-t-il ajouté.

Le comité des oulémas d’Arabie saoudite a également dénoncé la fusillade « tragique » et « contraire aux préceptes de l’islam ».

Le silence des Al Saoud face aux humiliations

- Crise de légitimité: le royaume saoudien est actuellement plongé dans une crise de légitimité nationale. C’est pourquoi les États-Unis sont à même de lui servir de « parapluie » sécuritaire. Les responsables saoudiens privilégient donc la survie du royaume à une réponse aux humiliations de Trump.

- Le Royaume-Uni d’abord et les États-Unis ensuite servent de parapluie sécuritaire à l’Arabie depuis 1930. Elle doit donc obéir aux politiques américaines. Selon Al-Monitor, la stabilité en Arabie saoudite est devenue de plus en plus fragile à mesure que les décisions de MBS devenaient indécises. L’assassinat de Jamal Khashoggi a aussi affaibli la position de Ben Salmane. Les médias ont rapporté cet été que le prince héritier aurait passé son temps sur son luxueux yacht, au large de Jeddah, sur la mer Rouge, afin de pouvoir s’enfuir via la mer en cas de danger. Ce même sentiment de peur perpétuel a fait de lui un homme soumis aux abaissements du président américain.

- L'Arabie saoudite est sans doute le grand perdant des « révolutions arabes » de ces sept dernières années. En Syrie et en Irak, elle a fait tout son possible pour renverser les gouvernements, mais en vain. Au Yémen, malgré les dépenses faramineuses, elle s’est avouée vaincue face à Ansarallah qui a mené une attaque spectaculaire contre le géant pétrolier Aramco en septembre dernier.

- En réponse aux insultes de Trump, Mohammed ben Salmane n’a trouvé qu’à dire qu’« en amitié, nous devons admettre qu’un ami dise de bonnes et de mauvaises choses ». Il est vraisemblablement incapable de donner de réponse adéquate à Trump. Ceci dit, ce dernier essaie de conclure plus de contrats avec l'Arabie saoudite.

En conclusion, les humiliations des Saoudiens par l’administration Trump sont devenues monnaie courante. Les échecs régionaux, ainsi que le besoin des princes saoudiens au soutien de Trump, ne permettent aucune objection. Or Trump exploite et rabaisse de plus en plus les Al Saoud.

Partager Cet Article
SOURCE: FRENCH PRESS TV