L’interception du pétrolier transportant du pétrole iranien au large du Gibraltar et, par la suite, la saisie d’un pétrolier britannique par l’Iran dans le golfe Persique ont eu lieu au pire moment possible pour Londres, eu égard à la situation politique au Royaume-Uni et aux relations que le pays entretient actuellement avec les États-Unis.
Le Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) a fait part vendredi soir de l’arraisonnement d’un pétrolier britannique dans le détroit d’Hormuz.
Le pétrolier Stena Impero, qui traversait le détroit d’Hormuz, a été arraisonné par la flotte de la zone 1 du CGRI parce qu’il violait les lois internationales de navigation. Le rapport ajoute que l’arraisonnement de ce pétrolier s’est fait à la demande de l’Organisation des ports et de la navigation de la province de Hormozgan (sud du pays).
Suite à la saisie du pétrolier britannique, les médias ont jugé l’action de l’Iran comme une mesure de représailles à l’interception par Londres de Grace 1 au large du Gibraltar.
Tard dans la soirée de vendredi, le gouvernement britannique a conseillé aux navires britanniques de « rester loin du » détroit d’Hormuz « pendant une période intérimaire ».
Le ministre britannique des Affaires étrangères, Jeremy Hunt, a également averti qu’il y aurait « de graves conséquences » si la situation n’était pas résolue. Cependant, il a dit que son pays essaierait de libérer le pétrolier par « la voie diplomatique ».
Dans une première réaction, le président américain, Donald Trump a évité de se mêler dans cette affaire en disant que « les États-Unis discuteront avec le Royaume-Uni de la saisie par l’Iran d’un pétrolier battant pavillon britannique ».
La question est de savoir pourquoi le Royaume-Uni et les États-Unis n’ont rien fait en dépit de leurs avertissements pendant les dernières semaines contre l’Iran en réponse aux actions de Téhéran. Le manque de réaction de Londres s’explique par cinq raisons :
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1) Londres vit la pire situation politique depuis la 2e guerre mondiale
La saisie du pétrolier Stena Impero s’est produite à un moment où le Royaume-Uni traverse une crise politique préélectorale et une lutte entre les deux candidats au poste du Premier ministre du pays avant la date butoir pour la sortie de Londres de l’Union européenne.
Dans quatre jours, l’actuel ou l’ancien ministre britannique des Affaires étrangères, respectivement Jeremy Hunt et Boris Johnson, deviendra le Premier ministre du pays.
La réaction à la saisie du pétrolier qu’adoptera chacun des deux candidats pourrait changer la donne. L’adoption d’une approche agressive, qui aboutirait sans doute à un échec et qui ne manquerait pas d’entraîner une réaction de l’Iran, mettrait ces deux rivaux dans une posture politique délicate.
À l’inverse, s’ils venaient à ne rien faire, chacun des deux candidats pourrait être accusé d’inaction. C’est pourquoi Jeremy Hunt a réagi en prônant une approche diplomatique pour ne pas perdre la face devant son rival.
2) Londres n’a pas de légitimité pour riposter
En outre, Londres a intercepté le pétrolier transportant le pétrole iranien au pire moment possible. Il n’a aucune légitimité pour se plaindre de la saisie de son pétrolier par l’Iran, car la marine royale a auparavant saisi le Grace 1 qui transportait du pétrole iranien. L’opinion publique mondiale considère le Royaume-Uni comme étant à l’origine de la crise actuelle et n’a pas reproché à l’Iran l’arraisonnement du pétrolier Stena Impero.
3) L’incapacité militaire
La décision de l’Iran d’arraisonner le pétrolier britannique a démontré que le Royaume-Uni n’a pas la capacité militaire suffisante pour assurer la sécurité de ses pétroliers.
4) L’indifférence de Trump
Traditionnellement, le Royaume-Uni se positionne aux côtés de son allié stratégique de l’autre côté de l’Atlantique. Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, il est difficile pour Londres d’emboîter le pas à Washington sur certains dossiers. Le président américain a à plusieurs reprises déclaré que les États-Unis n’avaient aucun intérêt à jouer un rôle dans le rétablissement de la sécurité de navigation dans le golfe Persique étant donné que le pays n’est guère dépendant des ressources énergétiques de la région.
Le président Trump a dit en réaction à la saisie par l’Iran du pétrolier britannique que les États-Unis n’avaient pas beaucoup de tankers dans la région.
5) La divergence américano-britannique
En dépit de l’alliance stratégique entre Londres et Washington, plusieurs dossiers, dont l’accord sur le nucléaire iranien, demeurent une pomme de discorde entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Suite au retrait de l’administration de Trump du Plan global d’action conjoint (PGAC), le Royaume-Uni, aux côtés de la France et de l’Allemagne, a essayé, au moins par la parole, de sauver cet accord multilatéral alors que Washington insistait pour maintenir son approche unilatéraliste.
Par ailleurs, les deux pays traversent une autre crise après les propos de l’ambassadeur britannique aux États-Unis, Kim Darroch, sur Donald Trump. Selon le Daily Mail, il a décrit le président américain, Donald Trump, comme « inepte », « instable » et « incompétent ». L’affaire a contraint l’ambassadeur britannique à démissionner, ce qui a été interprété par les médias comme une humiliation pour Londres.