Après avoir été entrevu à Raqqa au nord de la Syrie en mai 2018, Blackwater, "société de sécurité connue pour le massacre des civils en Irak, se fait parler de lui. Les États-Unis qui depuis l'annonce de leur retrait d'Irak, n'ont retiré pas un seul de leurs 2000 soldats déployés en Syrie, semblent compter désormais sur des mercenaires de Blackwater qui selon son fondateur, Erik Prince, sont prêts à "remplacer les troupes US pour protéger les FDS face à la Turquie". Or Ankara négocie en ce moment même un accord avec les Américains censé créer une zone tampon de 35 kilomètres dans le nord de la Syrie. Blackwater a-t-elle réellement pour mission de se battre contre la Turquie?
Le fondateur de Blackwater, Erik Prince, propose donc que les agents de "sa société privée", connu pour leurs crimes commis en Irak, remplacent les forces américaines, une fois que ces dernières se retireraient de Syrie. Il se dit prêt ainsi à protéger les "alliés des États-Unis" et "contrer l’influence iranienne" après le départ des États-Unis de la Syrie.
« Les États-Unis n’ont pas l’obligation stratégique à long terme de rester en Syrie. Mais je pense aussi que ce n’est pas une bonne idée d’abandonner nos alliés », a déclaré Prince à Fox Business. Par le terme "allié", Prince fait référence aux Forces démocratiques syriennes (FDS), une milice à majorité kurde soutenue par Washington mais aussi aux terroristes de Daech que les États-Unis continuent à former à al-Tanf où ils détiennent une base à laquelle ils ne veulent renoncer à aucun prix.
Donald Trump a annoncé le mois dernier que les États-Unis retireraient leurs troupes de Syrie, annonce qui a servi d'alibi à de nombreux membres de son propre gouvernement à exiger une extension de la présence militaire US en Syrie et en Irak. Une implication plus large de mercenaires de Blackwater en Syrie auxquels s'ajoutent les supplétifs kurdes (FDS) et takfiristes (Deach) des États-Unis, permettrait par ailleurs une multiplication des fronts de combat à travers le territoire syrien, alors que l'armée syrienne et ses alliés ont gagné le gros des batailles dans les principales régions syriennes et qu'une poursuite des combats ne vise qu'à retarder la sortie de guerre et le retour à la normale.
Les États-Unis disposent environ de 2.000 militaires en Syrie dont le nombre reste intact depuis l'annonce du retrait US. Prince a estimé que le recours à des sous-traitants permettrait à Trump de tenir sa promesse électorale de mettre fin aux « guerres éternelles », tout en poursuivant le "soutien aux alliés".
Selon les analystes, un scénario bien rodé se met lentement mais sûrement en place : la Turquie qui menace d'attaquer les Kurdes, aide ainsi les États-Unis à justifier le déploiement de davantage de supplétifs en Syrie, quitte à y éterniser sa présence militaire, avec en toile de fond des agissements militaires intensifiés à la fois dans le nord syrien mais aussi sur les frontières avec l'Irak. Ce faisant, Ankara s'éloignerait de la Russie et de l'Iran et se comporterait comme une puissance d'occupation. Cet état finirait tôt ou tard par se traduire en un face-à-face militaire. C'est dans ce contexte que les États-Unis pourraient avoir besoin d'un contingent terrestre de préférence "non américain".
La Russie et les États-Unis s'orient-ils vers un face-à-face terrestres après avoir épuisé les options du conflit aérien? Il est vrai que le déploiement des S-300 en Syrie a largement changé la donne et restreint les options aériennes de Washington et de ses alliés. En optant pour un déploiement de Blackwater, en lieu et place des forces américaines, les États-Unis chercheraient donc à protéger leurs troupes et à leur éviter toute confrontation militaire avec l'armée syrienne et leurs alliés russe et iranien.
Selon Al-Masdar News, les forces de la police militaire russe, qui sont en charge de mener des missions de patrouille en Syrie, seront renforcées par l’envoi d’un nouveau bataillon dans le pays. Les sources russes ont déclaré que le bataillon avait été envoyé en Syrie pour s’acquitter de « tâches spéciales ». La police militaire russe est présente en Syrie depuis décembre 2016. Elle a ensuite été envoyée à Alep pour assurer la sécurité de l’armée russe, des employés des hôpitaux mobiles et du personnel des convois humanitaires. Les sources russes ont également rapporté que durant les trois derniers mois, le nombre des points de contrôle dans la zone démilitarisée d’Idlib et à Manbij avait été multiplié. La Russie dispose d'une force militaire baptisée Wagner qui a été prise pour cible d'une attaque meurtrière US en février 2018.
Le choix de Blackwater pour des combats contre l'armée syrienne et ses alliés russe et iranien s'explique aussi par l'expérience cynique des mercenaires de cette organisation en Irak. Pour s'être longtemps combattu contre les populations irakiennes, les mercenaires de Blackwater sauraient, selon le plan américain, mieux affronter la Résistance irakienne, les Hachd al-Chaabi.