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Les dessous de l'ultimatum lancé par Mattis à Riyad

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Des forces d'Ansarallah à l'est de la province de Marib, au Yémen, le 4 janvier 2018. ©EPA

Il y a quelques jours le secrétaire US à la défense lançait un ultimatum de 30 jours au régime de Riyad pour qu'il cesse sa guerre contre le Yémen. L'appel a été précédé de celui de la France qui, elle aussi, bien qu'impliquée directement dans les combats, a qualifié la guerre d'inutile. La Grande Bretagne n'a pas tardé non plus à joindre sa voix à cette campagne qui a éclaté au plus fort de l'affaire Khashoggi par MBS et sa bande.

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Il est vrai que face aux images terrifiantes des enfants squelettiques qui agonisent, aux corps déchiquetés des civils qui gisent dans des hôpitaux privés de médicaments, le trio USA/France/GB qui opère depuis six mois à l'effet de s'emparer de la côte ouest du Yémen, n'a pas d'autre choix que de plaider pour la fin de la guerre. Mais les analystes ont bien su lire entre les lignes: à quoi rime l'ultimatum américain lancé au régime de Riyad et à son allié émirati alors que le monde entier sait que l'offensive contre Hudaydah implique 17 pays et qu'elle est pilotée depuis le sud de l’Érythrée par le CentCom US ?

Le site web libanais Al-Ahed revient sur le compromis proposé par Mattis et tente d'en éclairer le vrai mobile. Sur la base du plan présenté par Matiss, Ansarallah et l’armée yéménite devraient d'abord déposer leurs armes. Dans un second temps, il revient aux forces yéménites de se dissocier de leur arsenal balistique et de leurs drones et de les remettre à une tierce partie. Mais le plan de capitulation US n'en reste pas là : Ansarallah devra quitter les villes pour aller se retrancher dans les montagnes. Bref, il devra offrir sur un plateau d'or le port stratégique de Hudaydah voire la totalité de la côte ouest aux États-Unis, à Israël et à leurs alliés qui, rappelons-le, en ont grandement besoin pour chercher des noises aux Chinois et aux Russes en mer Rouge. 

Sur le terrain, cette pseudo offre de paix s'est traduite, à peine formulée, par une escalade de la campagne aérienne sauvage contre les civils yéménites: entre 80 à 100 sorties chaque jour contre Hudaydad, Sadaa et autres villes yéménites du nord. Des centaines d'avions pilotés par les Occidentaux larguent des bombes sur école, marché, maison, hôpital, sur fond de débarquement de milliers de mercenaires sur la côte ouest, l'objectif étant de s'emparer après des dizaines de tentatives ratés de l'aéroport stratégique de Hudaydah. Mais l'envers du décor du plan américain est autrement dangereux. 

Le texte évoque l'octroie d'une forme d'autonomie à Ansarallah, ce qui est loin de découler des bonnes intentions de Washington. En effet, James Mattis cherche ainsi à accélérer le processus du démembrement du Yémen lequel a bien commencé au Sud, depuis qu'Aden est sous contrôle de la force d'occupation. L'autonomie que les USA veulent offrir aux "rebelles houthis" est une tentative de ghettoïsation, de façon à ce que les Yéménites perdent tout accès aux eaux libres et partant, toute possibilité d'importation des produits de première nécessité via des routes maritimes qui se croisent au large de Hudaydah.

Le plan, bien subtile selon Mattis, est apte à laver les mains souillés de sang de la coalition et cadre d'ailleurs à merveille avec l'état dans lequel se trouve les villes yéménites du sud. Au sud, Riyad s'est presque emparé de la totalité des réserves pétrolières yéménites que recèlent les régions frontalières et convoitent déjà d'autres gisements dans les provinces de Mahra et de Hadramaut.

Alors que James Mattis mettait en avant son "plan de paix", les chasseurs saoudiens et émiratis menaient une série d'attaques massives contre diverses cibles civiles sur la côte ouest. Parallèlement, des navires de guerre et l’artillerie lourde saoudienne frappaient le port pour baliser le terrain à l'offensive terrestre de 20 000 mercenaires armés pro-Riyad. 

Le porte-parole d’Ansarallah, Mohamed Abdul Salam, estime que l'invitation des États-Unis à un cessez-le-feu au Yémen reste ni plus ni moins un véritable chantage à l'adresse des populations yéménites et un nouveau palier franchi dans le sens d'une escalade. Pour le reste, le président Donald Trump a révélé en deux mots ce mardi 6 novembre le vrai objectif du plan Mattis: "Et bien les Saoudiens ne savent pas comment utiliser nos bombes au Yémen !"

Riyad ne dispose que d'un mois pour en finir avec la côte ouest. Mais la question est de savoir comment finir en 30 jours une opération qui traîne depuis près de 4 ans ? 

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV