La bataille d’Idlib marquerait un tournant dans la guerre syrienne dans la mesure où ses répercussions pourraient remodeler les plans militaires et politiques au Moyen-Orient.
L’éditorialiste de Rai al-Youm, Abdel Bari Atwan s’est attardé, dans un récent article, sur les dernières évolutions en Syrie sur fond de menaces proférées par les États-Unis et leurs alliés occidentaux pour intervenir, militairement, contre ce pays.
« Alors que l’armée syrienne s’apprête à mener sa grande bataille contre Idlib pour en finir avec les terroristes et libérer définitivement la région, la prétendue coalition antiterrorisme, dirigée par les États-Unis a mobilisé tous ses moyens et efforts en vue de contrer les victoires accumulées, l’une après l’autre, par l'armée syrienne. Pour ce faire, ils ont avancé, de nouveau, l’idée du « changement de régime », qu'ils avaient abandonné, il y a deux ans, faute de succès pour sa réalisation.
À en juger par des signes actuels ci-dessous mentionnés, il pourrait y avoir une confrontation militaire dans les semaines, voire dans les jours à venir :
Primo, les menaces proférées, récemment, par John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale du président américain, lors d’une rencontre à Genève avec son homologue russe Nicolai Patrushev, contre une attaque américaine sur des cibles en profondeur du territoire syrien en cas d'usage d’armes chimiques par le gouvernement syrien dans son opération militaire contre Idlib.
Secundo, la mise en garde lancée par le ministère russe des Affaires étrangères, dans un communiqué officiel, contre toute attaque au missile que pourraient mener les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne contre la Syrie avec pour objectif d'appuyer les groupes terroristes à Idlib et à Hama pour tenir tête à l’armée syrienne.
Tertio, le déploiement du navire américain The Sullivans, équipé de 56 missiles Tomahawk, dans le bassin du golfe Persique et le nombre de bombardiers stratégiques B-1B, capables de transporter des missiles sol-air Jassm , dans la base aérienne al-Udeid au Qatar, destinés à participer à une éventuelle action militaire contre la Syrie.
Quatro, l’annonce officielle des responsables russes avertissant que les États-Unis cherchaient de nouveaux prétextes dont et surtout le recours de l’armée syrienne à des armes chimiques dans les attaques contre Idlib. L’affaire a été évoquée par Igor Kunashenkov, porte-parole du Centre russe pour la réconciliation des parties en conflit en Syrie. Ce dernier a révélé que les terroristes avaient amené huit conteneurs de chlore pour organiser une attaque chimique à Jisr al-Choghour. Ces conteneurs ont ensuite été remis aux terroristes du PIT et transportés vers le village de Haluz, près de Jisr al-Choghour.
Quinto, le déplacement, le dimanche 26 août, du ministre iranien de la Défense le général Amir Hatami à Damas, à la tête d’une haute délégation de commandants de l’armée iranienne, et sa rencontre avec son homologue syrien, Abdallah Ayoub pour débattre des récentes évolutions militaires, dont les menaces américaines.
Sexto, l’appel lancé au « djihad contre le gouvernement séculaire syrien » par le chef de Hayat Tahrir al-Cham, Abu Mohammed al-Jolani, lors de sa visite de la chambre d’opérations de ce groupe à Rif de Lattaquié. L’assassinat d’un grand nombre de partisans de réconciliation et de négociations avec le gouvernement syrien, l’arrestation de 500 personnes pour cause de la réconciliation avec le gouvernement syrien et finalement le changement de cap des États-Unis ».
Septimo, le déclenchement de vastes campagnes d’appels à la mobilisation des milliers d’hommes armés à Idlib et ses banlieues, la mise à la disposition des armes sophistiquées aux groupes terroristes pour les préparer à la guerre contre l’armée syrienne et réoccuper les villes de Hama et d’Alep et ainsi faire retourner la Syrie au point zéro de la crise, autrement dit détruire toutes les victoires militaires obtenues, en ces deux dernières années, par le gouvernement syrien ».
Tout en énumérant ces signes qui pourraient annoncer une possible attaque de la coalition américaine contre la Syrie, Abdel Bari Atwan estime qu’il était fort possible que le président américain Donald Trump, qui fait, actuellement, l’objet de divers scandales financiers et sexuels, et qui risque d'être renversé par ses détracteurs, se lance dans une guerre contre la Syrie pour détourner l’attention de l’opinion publique de ses propres affaires et atténuer les pressions à son encontre. Ainsi, il pourrait, également, s’octroyer le soutien des républicains aux futures élections mi-mandat du Sénat et de la Chambre des représentants, prévues au mois de novembre, estime Atwan.
L’analyste de Rai al-Youm n’oublie pas, d’ailleurs, de rappeler que l’armée syrienne n’avait pas besoin d’utiliser des armes chimiques ni à Idlib ni à aucune autre région.
« Les menaces américaines s’inscrivent dans le scénario d’attaques chimiques, déjà mis en scène à plusieurs fois, pour désamorcer les acquis de l’armée syrienne et les alliés sur les champs de bataille face aux terroristes.
Il est vrai que les États-Unis ne tolèrent pas une victoire de l’axe Syrie/Iran/Russie, le début de la reconstruction du pays et le retour des déplaces, d’où leurs efforts afin d’entraver la bataille finale à Idlib. En fait, l’insécurité dans la région va dans le sens des intérêts des Américains, car ils peuvent ainsi tirer des concessions stratégiques, dont un retrait des forces iraniennes de Syrie et l'amorce de nouvelles négociations sur l’accord nucléaire avec l’Iran.
L’attaque tripartite américano-franco-britannique contre la Syrie attiserait, tout comme le 14 avril dernier, le feu de violences dans la région. Il est même possible que des cibles à Damas, dont le palais présidentiel, soient visées.
Quoi qu’il en soit, la Russie ne restera pas les bras croisés. Les avertissements déjà lancés par la Russie témoignent de la détermination de ce pays à défendre l’armée syrienne à Idlib d’autant plus que Moscou s'inquiète des attaques croissantes, ces derniers temps, des terroristes contre sa base aérienne à Hmeimim à Lattaquié.
En plus, il y a la Chine, qui souhaite se débarrasser de près de 5 000 Ouïghours qui luttent aux côtés des terroristes du Front al-Nosra à Idlib. Un retour de ces terroristes en Chine pourrait provoquer une crise sérieuse pour le gouvernement chinois dans la mesure où ces derniers pourraient lancer des tentatives séparatistes dans le nord-ouest de la Chine.
Or, la bataille à Idlib est considérée comme un point culminant dans la guerre syrienne dans la mesure où ses conséquences et répercussions pourraient conduire à un remodelage des plans politiques et militaires au Moyen-Orient ».