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Trump est incapable de changer la donne en Syrie

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le tir d’un missile Tomahawk par le destroyer USS Stethem lors d’un exercice naval en 2016. ©AFP

Dans une analyse publiée par le journal Rai al-Youm, Abdel Bari Atwan s’est penché sur les dernières évolutions de la Syrie et les récentes menaces d’attaque proférées par Washington contre le gouvernement du président Bachar al-Assad.

Au début de son article, l’éditorialiste de Rai al-Youm écrit : « Le ton des autorités américaines qui multiplient des menaces contre Damas durcit de jour en jour. Le président des États-Unis Donald Trump a insulté personnellement son homologue syrien et son ambassadrice à l’ONU, Nikki Haley, a adressé les mêmes insultes à la Russie pour son soutien à Damas. Une attaque chimique présumée dans la Ghouta orientale que Washington et ses alliés attribuent à l’armée syrienne est le prétexte de ces menaces et insultes de la part des autorités de l’administration américaine. »

Abdel Bari Atwan, éditorialiste du journal Rai al-Youm. (Photo d’archives)

Pourtant, Abdel Bari Atwan estime que ce langage grossier des autorités de l’administration Trump n’est point un signe de puissance ou de confiance en soi, mais témoigne d’une chute et d’une faiblesse face aux adversaires.

L’auteur ajoute qu’il faut souligner néanmoins que ce n’est pas le cas de l’ensemble de l’élite politique et militaire des États-Unis. En effet, il existe aux États-Unis des gens qui portent un regard différent sur les évolutions actuelles en Syrie et n’ont pas le même avis que l’administration Trump au sujet des accusations portées contre le gouvernement syrien en ce qui concerne l’usage présumé de substances chimiques à Douma, dans la région de la Ghouta orientale. Parmi ces gens, il faut citer le colonel à la retraite de l’armée américaine Pat Lang, ancien officier du renseignement, qui a servi pendant plusieurs années au Moyen-Orient.

Dans une lettre adressée au secrétaire américain à la Défense, Pat Lang lui a demandé de prendre en compte d’autres éventualités dans l’affaire des substances chimiques à Douma. Pat Lang souligne que l’agent innervant aurait été utilisé éventuellement par les membres des groupes armés encerclés à Douma pour attribuer ensuite à l’armée syrienne un recours à l’arme chimique, ce qui permettrait aux médias occidentaux de s’en servir pour accuser Damas. Tout cela vise à préparer le terrain à une intervention militaire américaine et occidentale en Syrie.

Dans sa lettre, Pat Lang rappelle que les groupes armés ont subi une défaite militaire dans la Ghouta orientale. Un grand nombre de leurs éléments ont été transférés, en compagnie de leurs familles, à Jerablus dans le nord de la Syrie, à la frontière turque. Dans une telle situation, pour quelle raison l’armée syrienne aurait-elle dû utiliser des armes chimiques ? Pat Lang a conclu qu’avant toute action militaire, les États-Unis et ses partenaires devraient envoyer une équipe sur le terrain pour mener une enquête sur cette affaire.

Pourtant Abdel Bari Atwan croit que le secrétaire américain à la Défense n’écoutera pas ce conseil, et cela pour une raison simple : en représailles à l’échec des plans syriens de la Maison-Blanche, la décision a été déjà prise à Washington de mener une action militaire en Syrie contre des cibles syriennes, voire des cibles russes et iraniennes.

Donald Trump dit que le président russe Vladimir Poutine est responsable de l’usage des substances chimiques à Douma. L’ambassadrice des États-Unis auprès de l’ONU, Nikki Haley, a prévenu que son pays mènerait une frappe militaire avec ou sans résolution du Conseil de sécurité.

L’éditorialiste de Rai al-Youm souligne que très probablement Washington n’écoutera pas non plus le gouvernement de Damas, qui s’est dit prêt à coopérer avec les enquêteurs de l’Organisation pour interdiction des armes chimiques (OIAC) dans la Ghouta orientale.

Trump, qui avait déclaré il y a une semaine vouloir retirer ses forces militaires de Syrie, a décidé d’annuler son voyage à Lima, capitale du Pérou, où il voulait participer au Sommet des Amériques vendredi et samedi. En même temps, le président américain a envoyé un porte-avions équipés de missiles de croisière Tomahawk vers la Méditerranée orientale.

Selon Abdel Bari Atwan, tout porte à croire qu’après le raid des F-15 israéliens contre la base aérienne, il faut s’attendre à une nouvelle agression contre la Syrie par les forces militaires américaines, britanniques et françaises.

L’auteur rappelle pourtant qu’une imminente agression militaire des États-Unis contre la Syrie ne pourra pas changer la donne sur le terrain : l’armée syrienne a réussi à libérer la plus grande partie de son territoire et elle poursuivra son opération pour libérer totalement Douma, dernier bastion des groupes armés dans la Ghouta orientale, pour mettre fin aux tirs d’obus de mortier et de roquettes sur la capitale. En outre, « avec ou sans frappe militaire américaine et occidentale dans les prochaines heures, personne ne pourra plus parler du sort d’Assad ou de son retrait du pouvoir », écrit Abdel Bari Atwan.

L’éditorialiste de Rai al-Youm estime qu’il n’y a qu’une seule chose qui pourrait changer la réalité en Syrie : une grande intervention militaire américaine comparable à celle qui a eu lieu en Irak en 2003. Pourtant, un tel scénario serait très improbable, car sa réalisation aurait des conséquences très négatives pour les États-Unis, sans oublier le risque d’un affrontement direct avec la Russie, dont les forces sont présentes en Syrie dans plusieurs bases militaires.

Abdel Bari Atwan croit que le président Donald Trump s’est déjà mis dans une situation difficile, car il a menacé tout le monde de ses attaques de représailles. Il est très difficile pour lui de retirer ses menaces, parce que cela serait un aveu de faiblesse. L’auteur prévoit que les frappes tripartites avec la contribution des Britanniques et des Français seraient plutôt un « geste théâtral ». Dans ce sens, les généraux de Trump pourraient choisir des cibles purement syriennes pour éviter soigneusement la moindre friction avec les Russes ou les autres alliés de Damas. Et ce d’autant plus que récemment, le chef d’état-major des forces armées russes, le général Valéri Guérassimov, a annoncé sans ambages qu’en cas de menace contre les forces militaires russes en Syrie, Moscou ne se limiterait pas à intercepter les missiles ennemis, mais attaquerait les bases et/ou les navires d’où ces missiles seraient tirés.

« Pour le moment, le président Vladimir Poutine garde le silence face aux menaces américaines, et je crois que c’est le silence d’une personne puissante et sûre d’elle face au vacarme d’adversaires faibles », écrit Atwan. « Insultée en Afghanistan, méprisée en Irak et trompée en Libye, la Russie n’acceptera jamais la défaite en Syrie », ajoute l’auteur.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV