Dans une optique de diversification de l’approvisionnement en gaz naturel, l’Europe cherchait un moyen de réduire sa dépendance au gaz russe. Mais si l’Azerbaïdjan venait à manquer de gaz pour desservir l’Europe, les livraisons de gaz russe reprendraient et l’Iran pourrait devenir un nouveau fournisseur.
La Turquie était jusque-là le seul client du gaz iranien, important environ 30 millions de mètres cubes par jour en vertu d’un accord conclu en 1996. Elle cherche aujourd’hui à revendre le gaz de ses voisins régionaux sur le marché européen, en construisant les infrastructures nécessaires à cet effet, selon le quotidien russe Izvestia.
Cet objectif est hautement stratégique, car depuis des années, la Turquie frappe à la porte de l’Europe dans l’espoir de décrocher un contrat gazier. Mais elle ne risque pas de passer de sitôt du statut de partenaire laissant à désirer à celui de partenaire fiable. Pour devenir le « portail gazier » de l’Europe, il lui faudra d’abord résoudre certaines questions d’ordre sécuritaire, notamment après les explosions qui se sont produites dans les installations de gazoduc à l’est du pays.
Dans le cadre d’un projet géostratégique majeur à plusieurs niveaux, le géant gazier russe Gazprom a annoncé le 7 mai dernier le début des travaux de construction du gazoduc Turkish Stream reliant les territoires russe et turc. Le projet prévoit la construction sous la mer Noire de deux conduites d’une capacité de 15,75 milliards de mètres cubes de gaz par an chacune. Un des deux pipelines acheminera le gaz sur le marché turc et l’autre reliera la Russie à l’Europe via la Turquie. La construction du second pipeline est tributaire de l’intérêt manifesté par l’Europe pour le gaz russe et des garanties que les autorités européennes accorderont en retour au projet. Ce projet ne sera possible qu’après l’obtention de « garanties explicites et officielles » de l’UE confirmant sa future réalisation, avait tenu à souligner à cet égard Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, en octobre 2016, selon plusieurs médias.
Le gaz russe devra ensuite passer par le gazoduc Tasap pour traverser l’Anatolie, avant d’atteindre les pays européens. Une fois le corridor finalisé, l’Europe bénéficiera de 10 milliards de mètres cubes de gaz naturel supplémentaires d’ici 2019.
Coût total de l’opération : 45 milliards d’euros, dont entre 10 et 11 milliards pour le tronçon turc, le Tasap.
Le journal russe estime que le projet n’est pas rentable, car le nouveau gazoduc Nord Stream 2, financé par Gazprom et cinq compagnies européennes à hauteur de 11 milliards de dollars, permettra d’acheminer 55 milliards de mètres cubes de gaz vers l’Europe.
Mais avant de se lancer sur le marché européen, rappelle Izvestia, il faudrait que la Turquie règle ses soucis internes d’ordre sécuritaire et mette un terme au terrorisme, qui est une menace sérieuse pour ses infrastructures.