Dans un récent article, Foreign Policy évoque la perspective de ce qu'il qualifie de "Guerre des grandes puissances" et écrit : " au mois de mai, les États-Unis ont pris pour cible les forces syriennes pour la première fois depuis le début de la guerre en 2011. En réalité, c'est la Russie que Washington a dans son collimateur. Moscou a d'ailleurs très bien compris le message et a menacé d'abattre, en représailles, les chasseurs américains. Une question se pose d'emblée : les États-Unis et la Russie se trouvent-ils au seul d'une confrontation et si oui, comment peut-on l'empêcher?"
L'article reprend les propos de l'analyste des questions politiques, Emile Simpson qui affirme : " la situation politique au Moyen-Orient est fluctuante. Il est vrai qu'après "Printemps arabe", les principales forces en présence se divisent ainsi : un premier groupe englobe les monarchies du golfe Persique que sont l'Arabie saoudite, les Émirats, Bahreïn ou encore les pays laïcs de l'Afrique du nord comme l'Égypte, l'Algérie, la Tunisie, ou l'est de la Libye. Viendront ensuite la Turquie, le Qatar, soit des États proches des Frères musulmans qui sont inclus dans la région occidentale de la Libye. Un troisième groupe comprend l'Iran et ses alliés comme l'Irak, la Syrie d'Assad ou encore le Hezbollah. Israël, lui, n'entre dans aucune de ces catégories mais il se sent bien proche du premier groupe."
Simpson renvoie ensuite aux facteurs qui expliquent le face-à-face de plus en plus probable entre les Américains et les Russes en Syrie : l'intervention militaire en Libye qui a exhorté Washington à reconduire le même scénario en Syrie, l'accord nucléaire signé avec l'Iran que Trump a accepté malgré lui et qu'il malmène depuis son investiture et l'émergence de Daech et des groupes radicaux qui ont réussi à s'emparer de l'Irak, et des régions sunnites en Syrie et dans le sud du Yémen : " l'accord nucléaire a empêché l'acquisition par l'Iran de la bombe atomique n'empêche que sa signature a fait de la Russie la vrai gagnante. Moscou a boosté ses liens avec l'Iran et a tiré un maximum de profit de la levée des sanctions anti-iranienne et ce fut cet état de choses qui l'a renforcé sa position sur la scène syrienne. Or Trump s'adapte mal à un accord nucléaire qu'Obama a fait signer avec l'Iran."
Selon Simpson, " le plus grand mal auquel Trump devrait face en Syrie c'est le vide politique, ce qui n'est ni le cas de l'Iran ni le cas de la Russie qui soutiennent fermement le président Assad. Washington ne sait toujours pas à qui confier le contrôle des régions qu'il reprend syriennes ou irakiennes dont il s'empare. en d'autres termes, les États-Unis jouissent d'une stratégie militaire qui n'a pas son pendant politique. C'est un vide qui pèse de tout son poids et s'élargit à mesure que Daech perd du terrain. Il va sans dire qu'en Syrie, le moindre déclic suffit à déclencher la guerre russo-américaine. Un F16 américain ou un TU russe abattu pourront servir de prétexte au déclenchement des hostilités. Par ailleurs, l'acharnement américain sur les forces chiites proches de l'Iran étend la possibilité d'un face-à-face militaire Iran-Etats-Unis d'autant plus que pas un jour ne passe sans que l'accord nucléaire soit visé d'une manière ou d'une autre par Washington. L'Iran pourrait s'en venger en Irak, en poussant ses puissants alliés à exiger un retrait US de la scène politique et militaire irakienne".
Selon Simpson les Américains n'ont d'autre choix que de s'en prendre d'abord à l'alliance Iran/Russie en Syrie puis à définir un ordre du jour commun pour se battre à la fois contre l'Iran et Daech : "le facteur kurde est intéressant. C'est un facteur présent à la fois en Syrie et en Irak et qui pourrait servir d'allié aux États-Unis face à l'Iran voire face à la Russie et à Daech. Mais là aussi, les limites en parassent aussitôt. Que faire avec la Turquie kurdophobe? "