La Syrie est le théâtre d’affrontements d’envergure pratiquement mondiale, du fait de l’internationale terroriste présente sur le territoire, mais aussi en raison de la participation d’États hostiles à la République syrienne. Les récents événements ont notamment mis en lumière le rôle d’Israël.
Si aujourd’hui, ce n’est un secret pour personne que des pays comme les États-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar ou encore plusieurs États européens ont largement et ouvertement contribué au chaos en Syrie, le cas d’Israël était à part. D’un côté, le régime de Tel-Aviv se déclarait « neutre » dans le conflit syrien, mais ses actions ont plusieurs fois démontré le contraire. En effet, l’aviation israélienne a mené plusieurs frappes en Syrie au cours de ces dernières années. La dernière en date a été la goutte qui a fait déborder le vase.
Le 17 mars, alors que l’armée syrienne poursuit l’offensive contre Daech à l’est de Palmyre, l’aviation israélienne frappe une nouvelle fois les troupes syriennes. La DCA syrienne riposte et affirme avoir abattu un avion et en avoir touché un autre. Israël nie dans un premier temps les faits. Mais la réaction d’Avigdor Lieberman, le ministre israélien des Affaires militaires, qui a suivi deux jours plus tard, semble confirmer la version syrienne. En effet, il annonce que si la DCA syrienne riposte de nouveau contre l’aviation israélienne, le régime israélien « détruira » les systèmes de défense antiaérienne de la Syrie.
De l’aveu des médias, y compris mainstream, il s’agit du plus sérieux incident entre Damas et Tel-Aviv depuis le début de la crise syrienne. Incident suffisamment sérieux en tout cas pour que le ministère russe des Affaires étrangères convoque ce lundi 20 mars l’ambassadeur israélien en poste à Moscou, afin de lui transmettre l’opposition de la Russie face aux actions israéliennes en Syrie.
Plus gênant presque que le bombardement lui-même, ce sont les justifications israéliennes qui ne tiennent tout simplement pas. Tel-Aviv a en effet indiqué que les frappes visaient à empêcher un transfert d’armes au Hezbollah libanais, alors que l’attaque a ouvertement visé les forces syriennes aux alentours de Palmyre, là où l’armée gouvernementale fait face à Daech. Bien difficile désormais de parler de l’absence de complicité entre Israël et les groupes terroristes, d’autant plus que selon divers témoignages, de nombreux terroristes, notamment ceux opérant dans le sud du territoire syrien, se font soigner dans les hôpitaux israéliens.
Au-delà du conflit syrien, dans lequel les forces syriennes soutenues par les alliés prennent de plus en plus le dessus sur les groupes terroristes, Israël a vraisemblablement très peur du rééquilibrage des forces dans la région. La guerre perdue en 2006 face au Hezbollah libanais, qui combat aujourd’hui aux côtés de l’armée syrienne les terroristes takfiristes, a été l’un des premiers signes remettant en cause « l’invincibilité » régionale d’Israël.
De plus, la montée en puissance de l’Iran a ravivé les craintes de Tel-Aviv. Enfin, le positionnement de la Russie en faveur de son allié syrien dans la lutte antiterroriste a complètement reconfiguré les perspectives proche et moyen-orientales.
Ayssar Midani, analyste franco-syrienne des questions internationales, et Roger Edde, président-fondateur du parti Assalam, débattent sur le sujet.