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Russie/Turquie : un compromis hâtif ?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan (G), et le président russe, Vladimir Poutine (D), le 15 novembre 2015 à Antalya. ©AFP

Erdogan espère pouvoir mettre fin au transfert d’armes vers l’Union démocrate du Kurdistan syrien et empêcher, par conséquent, la formation d’un État kurde en Syrie, en s’engageant dans un dialogue direct avec Vladimir Poutine », selon un expert politique russe.

Les récentes évolutions dans les relations russo-turques font le sujet d’une note politique, rédigée par l’expert russe Igor Ponkratenko, à propos des objectifs du président turc.

La lettre du président turc, Recep Tayyip Erdogan, et les excuses qu’il a présentées auprès de son homologue russe, Vladimir Poutine pour la destruction d’un bombardier russe sont, sans aucun doute, les événements diplomatiques les plus importants de la semaine pour les médias des pays de l'ex-URSS.

Les hauts responsables russes n’ont pas hésité à parler d’un « grand conflit politique pour le Kremlin » et ont encensé leur président pour avoir su convaincre la Turquie de se soumettre aux conditions de la Russie.

Mais avant toute analyse hâtive, il faut se pencher sur la vraie raison du compromis entre Moscou et Ankara. Pourquoi Erdogan a-t-il écrit une lettre à Poutine ? Pourquoi les deux parties ont-elles décidé de reprendre leurs relations ? Pourquoi la Russie, a-t-elle renoncé si vite à ses positions ?

A peine deux jours après la réception de la lettre d’Erdogan, le Kremlin a fait part d’un entretien téléphonique entre les deux présidents.

Cet entretien n’a pas encore été effectué mais le président russe a déjà ordonné au gouvernement d’examiner la levée des sanctions antiturques.

Un compromis hâtif… mais pourquoi ?

Premièrement, les rencontres secrètes entre Russes et Turcs en matière de conditions de compromis ont duré des mois et le Kazakhstan y a fait la médiation.

Ces négociations secrètes étaient menées lorsque les médias russes scandaient des slogans antiturcs et tentaient de convaincre la société qu’on ne pourrait pas parler de compromis sans que soient acceptées les conditions de Moscou, qui étaient de recevoir des excuses officielles et des dédommagements et de traduire en justice l’auteur de la destruction de l’avion russe.

Deuxièmement, les sanctions imposées aux Turcs par la Russie lui nuisaient, avant tout en raison de la hausse du prix des produits agricoles. D’où le grand intérêt de Moscou de trouver rapidement un compromis avec la Turquie.

Troisièmement, les déclarations bellicistes de Moscou, pendant tout ce temps, n’étaient que de la propagande et le Kremlin n’a rien fait en pratique. D’autre part, Recep Tayyip Erdogan, au lieu de présenter ses excuses, n’a fait que présenter ses condoléances à la famille du pilote tué et il n’a pas finalement accepté de dédommager la Russie. Tout ce qu’il a accepté était de financer la famille de la victime et de traduire en justice les auteurs de ce méfait.

Les trois points ci-dessus montrent comment Moscou et Ankara tentent de régler leurs problèmes via un rapide compromis. La Russie essaie de minimiser les mauvaises conséquences des sanctions qu’elle a imposées aux Turcs car elle n’est pas arrivée à prévenir la hausse des prix des produits agricoles et à fonder un système efficace pour remplacer les marchandises et les services turcs.

D’autre part, Recep Tayyip Erdogan suit des objectifs encore plus importants en voulant normaliser ses relations avec les Russes.

Primo, Erdogan envisage d’obtenir l’impartialité de Moscou envers ses coopérations gazières avec le régime israélien.

Secundo, Erdogan espère pouvoir mettre fin au transfert d’armes vers l’Union démocrate du Kurdistan syrien et empêcher, par conséquent, la formation d’un État kurde en Syrie, en s’engageant dans un dialogue direct avec Vladimir Poutine.

Le président turc entend par ailleurs arrondir les conflits qui sont nés, pendant les dernières années, entre la Turquie et ses voisins et créer un nouveau système de supervision et d’équilibre.

Ça ne sera pas chose étrange pour une Turquie qui fait des pas en avant pour consolider, dans un proche avenir, ses relations avec Téhéran.

La lettre d’Erdogan destinée à Vladimir Poutine est, de facto, une réaction flexible aux changements qui ont eu lieu dans les relations internationales, plutôt qu’une victoire pour Moscou.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV