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Sanctions contre l’Iran : les Européens en désaccord

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Sanctions contre l’Iran : les Européens en désaccord

Par Ghorban-Ali Khodabandeh

La France et l'Allemagne veulent des sanctions contre l’Iran pour avoir prétendument aidé ses alliés régionaux, mais un haut diplomate européen affirme que cela pourrait saper d'autres efforts.

En effet, l'Union européenne s'oppose à une initiative franco-allemande visant à imposer des sanctions à l'Iran pour sa fourniture présumée de missiles et d'autres matériels militaires à ses alliés régionaux mais aussi à la Russie, de hauts responsables de l'UE affirmant que de nouvelles sanctions pourraient nuire à la diplomatie avec Téhéran.

Ces dissensions sont révélées au grand jour alors que les dirigeants occidentaux non seulement ont adopté une politique de deux poids deux mesures à l’égard des évolutions à Gaza et en Ukraine, mais encore, ils se sont rendus complices des crimes de guerre d’Israël, en lui fournissant des armes et des aides financières.

Sanctions anti-iraniennes : une tentative franco-allemande qui fait la polémique

La France, l'Allemagne, les Pays-Bas et cinq autres pays de l'UE ont écrit le mois dernier au chef de la politique étrangère de l'UE, Josep Borrell, affirmant que l'Union européenne devrait adopter un régime de sanctions contre l’Iran, qui leur permettrait de cibler « les acteurs iraniens qui arment, financent, conseillent et instruisent » les soi-disant groupes soutenus par l’Iran, ainsi que les groupes eux-mêmes.

La réponse de Borrell, qui, selon les responsables de l’UE, était soutenue par Washington : ne le faites pas maintenant.

Un responsable de l’administration Biden a déclaré qu’ils avaient informé l’UE qu’ils soutenaient une pression croissante sur Téhéran au moyen de sanctions sur les transferts de missiles et d’équipements militaires par l’Iran aux groupes régionaux ainsi qu’à la Russie.

Le différend, qui a été de nouveau soulevé lors d'une récente réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE, survient quelques jours après que l'Europe et les États-Unis se sont engagés à imposer rapidement et conjointement de nouvelles sanctions significatives à Téhéran si ce dernier livre des missiles balistiques à la Russie. Les responsables occidentaux ont déclaré qu'ils n'avaient aucune preuve que Téhéran avait encore livré les missiles, mais qu'ils s'attendaient à ce qu'il le fasse.

Les responsables américains ont toutefois ajouté que les sanctions pourraient inclure des mesures visant à empêcher la compagnie aérienne nationale iranienne, Iran Air, de desservir l’Europe.

Cependant, des responsables européens à Bruxelles ont déclaré aux États membres que prendre des mesures contre l'Iran en raison de son soutien présumé à ses alliés du Moyen-Orient pourrait aggraver les tensions dans la région et saper la diplomatie nucléaire.

Le renforcement de la coopération militaire irano-russe, le cauchemar de l’Occident

Les pays du G7 ont mis en garde dernièrement l'Iran contre toute livraison de missiles balistiques à la Russie, qui entraînerait de « nouvelles sanctions importantes » contre Téhéran, selon un communiqué commun.

« Si l'Iran commençait à livrer des missiles balistiques ou des technologies associées à la Russie, nous serions prêts à répondre de manière rapide et coordonnée, y compris avec de nouvelles sanctions importantes », avertissent les Etats-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Italie et le Japon.

Les Etats-Unis ne peuvent pas confirmer pour l'heure que des livraisons de missiles balistiques ont déjà eu lieu, mais un haut responsable de la Maison Blanche a estimé qu'il y avait « un risque réel que cela se produise ».

Washington s'inquiète depuis plusieurs semaines d'une intensification de la coopération militaire entre la Russie et l'Iran.

Cela alors que « chaque jour les lignes de front ukrainiennes deviennent plus vulnérables » et alors que la reprise d'une aide militaire américaine de grande ampleur est pour l'instant bloquée par le Congrès, a averti le responsable américain.

Selon de nombreux observateurs, pour les États-Unis et leurs alliés, c’est un cauchemar car un axe anti-occidental croissant peut aider les adversaires à échapper aux sanctions, à gagner des guerres et à recruter d’autres acteurs.

Les factions de la résistance dans la région ne reçoivent pas d’ordres de Téhéran

L’Iran a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne disposait pas de force par procuration dans la région et que les groupes de résistance de la région agissent contre les occupants américains ou le régime israélien sur la base des intérêts de leur pays.

« L'Iran n'a aucune force par procuration dans la région, et c'est le régime américain qui utilise le régime sioniste comme force par procuration pour réaliser ses objectifs et garantir ses intérêts illégitimes», a déclaré le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanaani.

Des responsables européens à Bruxelles ont déclaré aux pays de l'UE que les sanctions contre l'Iran parce qu'il soutient des groupes de résistance dans la région pourraient intensifier les tensions dans la région et affaiblir la diplomatie nucléaire.

Dans une lettre adressée la semaine dernière aux huit États membres de l’UE, Borrell a prévenu que leur proposition de cibler les activités régionales de l’Iran «confondrait les deux théâtres » de la Russie et du Moyen-Orient, « ce qui pourrait avoir des conséquences potentiellement inattendues ».

Le haut responsable européen a poursuivi: « Une évaluation minutieuse de l’impact potentiel de nouvelles mesures est essentielle pour éviter que l’UE ne soit considérée comme un agent d’escalade ou ne mette en péril d’autres objectifs politiques, tels que la limitation du programme nucléaire iranien. »

Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre, les responsables occidentaux se sont engagés auprès de l’Iran pour empêcher une conflagration régionale. L'Iran a indiqué que les tensions dans la région, notamment dans la mer Rouge et dans le nord de la Palestine occupée, diminueraient dès que les crimes de guerre du régime sioniste contre le peuple palestinien prendraient fin.

Génocide des Palestiniens à Gaza et silence assourdissant de l’Europe

L’Union européenne tient une position unique de complicité avec les crimes de guerre d’Israël et ses violations des droits humains. Outre le silence et l’apathie devant la « la guerre génocidaire » menée contre les Palestiniens, Israël et ses institutions sont les bienvenus dans la plupart des pays européens, accueillis avec chaleur et générosité dans tous les domaines, économique, culturel, académique, sportif…

Alors que des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour dénoncer le génocide en cours à Gaza, le silence des États européens est assourdissant. Ces derniers ont pourtant l’obligation de prévenir, par tous les moyens possibles en leur possession, la survenance d’un tel crime.

L’ampleur de l’obligation d’agir dépendra toutefois de la capacité d’influence des États sur la situation. Les États membres de l’UE apparaissent bien en position d’influencer Israël, notamment en prenant des sanctions et en interdisant le transfert ou le transit d’armes sur leurs territoires.

On cherchera en vain une telle réaction appropriée de leur part. Au contraire, plusieurs dirigeants européens ont ouvertement soutenu Israël et continuent à le soutenir malgré l’explosion de la violence à Gaza et dans le reste des territoires palestiniens occupés.

Ainsi, les gouvernements occidentaux pratiquent la politique des doubles standards dans la gestion des conflits internationaux, une attitude qui se manifeste dans le conflit israélo-palestinien et qui représente une menace pour les droits humains.

Autrement dit, il s’agit de la politique constante des pays européens : les « deux poids-deux mesures », les « doubles standards », « l’hypocrisie » de l’Ouest qui reproche au Sud ce qu’il ferait quotidiennement et qui voudrait, dans le cadre de cette politique, imposer des sanctions contre l’Iran.

Ghorban-Ali Khodabandeh est un journaliste et analyste politique iranien basé à Téhéran.

(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV.)

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SOURCE: FRENCH PRESS TV