Par Ivan Kesic
Lors d'une cérémonie organisée samedi à Bandar Abbas, ville portuaire du sud de l'Iran, le nouveau navire de guerre Abu Mahdi al-Muhandis a été dévoilé, la troisième classe d'une série de navires de guerre nationaux à double coque.
Un catamaran de nouvelle classe, ainsi qu'une centaine d'engins d'attaque rapide de classe Tareq et Ashura, ont été livrés au Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) en présence de hauts responsables militaires.
L'impressionnante cérémonie organisée dans la capitale de la province de Hormozgan s'est déroulée en présence du général de division Hossein Salami, commandant du CGRI, du contre-amiral Alireza Tangsiri, commandant de la marine du CGRI et, d'autres hauts responsables militaires.
Le général Salami, dans ses déclarations prononcées au cours de la cérémonie, a dit que le pays ne voyait aucune limite aux efforts visant à étendre sa puissance navale dans un contexte de tensions maritimes croissantes dans la région causées par la guerre israélienne contre Gaza.
« Aujourd'hui est un jour grand et historique pour la fière nation iranienne, le jour où la marine du CGRI, en tant que pionnière de la puissance défensive de la République islamique d'Iran, a fait des progrès dans sa puissance offensive et défensive », a-t-il affirmé.
Le général en chef du CGRI a déclaré que la République islamique étendrait sa puissance de défense dans la mesure où elle le jugerait nécessaire pour protéger ses intérêts nationaux, et a également averti que l'ennemi pourrait être blessé s'il restait près du territoire iranien.
« L'ennemi doit rester à l'écart de la région. L'ennemi se retirera à mesure que nous deviendrons plus forts et heureusement, notre ennemi comprend la logique du pouvoir, même s'il ne parvient pas à comprendre le pouvoir de la logique », a-t-il dit avec une pointe d’ironie.
Le contre-amiral Tangsiri, dans son discours, a indiqué quant à lui quelques caractéristiques du navire Abu Mahdi al-Muhandis, le décrivant comme un engin de guerre conçu et fabriqué au niveau national et doté de technologies sophistiquées d'évasion radar.
Il a précisé que le navire de guerre a une autonomie navale de 14 jours et peut naviguer dans un rayon de 2 000 milles marins (3 700 kilomètres) sans être détecté par les radars et les systèmes de reconnaissance ennemis. Il s'appuie sur quatre systèmes de propulsion locaux et peut rester à flot dans des conditions de force 6 et effectuer des missions navales dans des conditions de force 5 grâce à sa conception de coque avancée.
Le commandant Tangsiri a expliqué aussi que trois sociétés nationales basées sur le savoir étaient impliquées dans le développement de navires pour la marine du CGRI et qu'il a fallu 15 mois pour que le navire de guerre Abu Mahdi al-Muhandis soit prêt.
Il a également informé que la marine du CGRI allait produire trois navires de guerre de la même classe en moins d'un an.
Le navire de guerre Abu Mahdi al-Muhandis doit son nom à l’ancien chef adjoint des Unités de mobilisation populaire irakiennes qui a été assassiné avec le haut commandant antiterroriste iranien, le lieutenant-général Qassem Soleimani, lors d’une frappe de drone américain à l’extérieur de l’aéroport international de Bagdad en janvier 2020.
Caractéristiques techniques
La classe de navires de guerre Abu Mahdi al-Muhandis est la troisième d'une série de classes de catamarans navals iraniens après la mise en service de Shahid Nazeri en 2016 et de Shahid Soleimani en 2022.
Il est difficile de classer l'une des trois classes sous les types traditionnels de navires de guerre car, en raison de leurs caractéristiques et de leurs objectifs uniques, ils combinent les rôles d'engins d'attaque rapide, de corvettes lance-missiles, de frégates, de destroyers et de porte-drones.
Par exemple, la classe Qassem Soleimani a un tonnage relativement plus petit, comparable à celui des corvettes, mais a une portée plus longue (5 000 milles) que les destroyers modernes et une puissance de feu et des capacités de défense aérienne comparables à celles des frégates.
Les trois modèles de catamarans sont typiquement iraniens au sens naval du terme, c'est pourquoi les experts américains les classent dans une catégorie spéciale de navires à double coque à allongement élevé.
Cette conception permet de briser l'eau de mer pendant la navigation plus facilement qu'un catamaran classique, avec aussi une plus grande stabilité transversale dans des conditions de mer agitées.
De plus, une plus grande largeur de la coque permet aux hors-bords auxiliaires de se déplacer sous le navire et offre plus d'espace pour faire fonctionner les drones ; ce qui est d'une grande importance dans les guerres modernes.
Bien qu’il dispose d’une capacité de construction navale pour des navires de guerre de grand tonnage, Téhéran n’a aucun projet pour ce type de navires et privilégie les navires plus petits pour la projection de sa puissance mondiale.
La combinaison de nouveaux missiles de croisière, de missiles hypersoniques, de missiles antinavires quasi balistiques, de drones navals et de drones en essaim a rendu les grands navires de guerre d'aujourd'hui plus vulnérables que jamais.
Le conflit entre la Russie et l’Ukraine a particulièrement montré à quel point les grands navires sont vulnérables aux armes antinavires modernes, avec d’importantes pertes en tonnage, en valeur, en équipements et en personnel.
Le navire de guerre Abu Mahdi al-Muhandis a des dimensions plus petites que les deux classes précédentes, il mesure environ 40 mètres de long, environ 12 m de large et a une capacité de déplacement de 250 à 300 tonnes.
Il ne dispose pas d'héliport pour les hélicoptères de lutte anti-sous-marine comme les deux classes précédentes, ni de silos de lanceurs verticaux comme la classe Soleimani.
Au lieu d'hélicoptères, la plate-forme arrière supérieure est réservée aux drones et la plate-forme inférieure transporte six missiles antinavires Qader et Qadir d'une portée de 300 km, soit la même puissance de feu que la classe Soleimani.
La plate-forme arrière supérieure transporte également huit missiles sol-air guidés d'une portée de 15 à 20 km et deux canons de 20 mm pour la défense ponctuelle. Deux autres sont situés à l'avant et, un canon de 30 mm.
La vitesse du navire de guerre Abu Mahdi al-Muhandis de 37 nœuds est supérieure à celle des deux classes précédentes (respectivement 28 et 32 nœuds) et ses dimensions plus petites lui permettent d'être très maniable.