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Analyse du discours du président Raïssi à l’Assemblée générale de l’ONU

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)

par Xavier Villar

Le discours puissant du président iranien, Ebrahim Raïssi, à la tribune de la 78e session de l’Assemblée générale des Nations unies a fait la une des journaux du monde entier.

L’essentiel du discours du président Raïssi était caractérisé par l’idée selon laquelle l’hégémonie américaine, était un projet raté.

« Le monde est en train de passer à un nouvel ordre international et le projet d'américanisation du monde a échoué », a-t-il assuré.

Ces propos du président Raïssi concernant l’échec du projet politique occidental doivent être analysés dans une perspective discursive qui prend en compte le fait que l’Occident fonctionne comme un discours composé de multiples signifiants.

L’échec du projet occidental, de ce point de vue discursif, implique que l’Occident a cessé d’être politiquement pertinent pour déterminer quels signifiants sont acceptables et lesquels ne le sont pas.

En d’autres termes, ni le discours global ni ses composantes fondamentales ne sont plus respectés ou considérés comme essentiels par le monde au sens large.

Cependant, cet échec discursif ne doit pas être confondu avec l’effondrement absolu de l’Occident ou avec son incapacité matérielle à continuer de nuire aux entités qu’ils considèrent comme des menaces.

Comme l’a souligné le président iranien, il s’agit d’une délégitimation discursive de l’Occident, qui rend impossible l’acceptation des signifiants occidentaux comme universels.

L’intervention du président Raïssi devant la séance plénière de l’Assemblée générale de l’ONU a une autre interprétation, qui passe souvent inaperçue dans la plupart des analyses.

D’un point de vue islamique, la critique du projet politique occidental s’accompagne d’un modèle alternatif représenté dans ce cas par la République islamique elle-même.

Cela implique que, dans la mesure où il existe différents jeux de langage à travers lesquels la poursuite d’un système politique juste et participatif peut s’articuler, cela témoigne de l’hétérogénéité irréductible du monde.

C’est également ce que ceux qui parlent exclusivement en termes occidentaux trouvent particulièrement déroutant.

Contrairement aux analyses qui considèrent l'islam comme un projet totalitaire et/ou fondamentaliste, comme le fait Bassam Tibi, l'islam, précisément parce qu'il a ouvert la porte politique à l'hétérogénéité, peut être vu comme un discours qui ne cherche pas à remplacer l'homogénéisation occidentale par une « l'homogénéisation ».

Le discours du président iranien doit être interprété dans le contexte de cette ouverture politique à l’hétérogénéité et du remplacement des relations hiérarchiques et verticales par des relations horizontales et non hiérarchiques.

Cette perspective islamique s'est reflétée dans les propos du président Raïssi lorsqu'il a parlé du message coranique de lutte contre l'oppression et la division, cette dernière étant comprise d'un point de vue ontologique.

Comme l'a affirmé le président Raïssi : « Le Coran parle de l'unité de l'humanité et du fait que tous les habitants de la Terre sont comme des frères et sœurs, issus des mêmes parents. »

On peut donc affirmer que pour le président iranien et la République islamique, le Coran est un texte sacré et politique qui continue d’inspirer les musulmans dans leur lutte contre l’oppression.

Le président Raïssi a spécifiquement critiqué la vague d’islamophobie en Occident, qu’il conçoit comme un système mondial de gouvernance et définit comme une forme de racisme dirigé contre les expressions publiques de l’identité musulmane ou toute expression publique perçue comme telle.

Le président iranien a cité la récente profanation du Saint Coran et l'interdiction du port du hijab dans les écoles françaises comme les exemples d'« attitudes anti-musulmanes ».

Un autre sujet abordé par le président iranien dans son discours puissant était l’analyse de la situation politique dans le pays à la suite des émeutes soutenues par l’Occident l’année dernière.

Le président Raïssi a souligné que l’année dernière représentait « un triomphe pour l’Iran » et une défaite pour ceux qui voulaient alimenter les émeutes et le désordre dans le pays.

Il a souligné que « depuis la victoire de la Révolution islamique, les ennemis de la nation iranienne ont imposé diverses formes de conflit, de sanctions et de pressions maximales sur notre peuple. Cela fait 45 ans que ces politiques se sont révélées être un échec ».

En allusion aux affaires diplomatiques importantes, le président iranien a également évoqué la question de l’accord nucléaire et a réitéré que ce sont les États-Unis qui se sont retirés unilatéralement de l’accord nucléaire, ce qui, selon lui, démontre leur manque d’engagement diplomatique.

Concernant la question des armes nucléaires, le président Raïssi a souligné qu'« elles n'ont pas leur place dans la doctrine défensive de la République islamique d'Iran », comme lui et d'autres hauts responsables politiques et militaires iraniens l'ont souligné à plusieurs reprises.

Il a en outre réitéré que le pays « ne renoncera pas aux avantages de l'énergie nucléaire à des fins civiles », soulignant ainsi l'autonomie politique de la République islamique.

Par conséquent, on peut dire que le discours du président Raïssi devant l'Assemblée générale des Nations unies, d'un point de vue politique, a poursuivi la tradition islamique consistant à présenter une alternative à l'eurocentrisme dans toutes ses manifestations diverses et complexes, pour construire un avenir meilleur et plus habitable.

En outre, conformément à la tradition islamique initiée par la Révolution islamique, le discours était articulé dans un vocabulaire conceptuel éloigné de la grammaire politique occidentale.

Xavier Villar est titulaire d'un doctorat en études islamiques et chercheur qui partage son temps entre l'Espagne et l'Iran.

(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)

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SOURCE: FRENCH PRESS TV