L’ancien ambassadeur d’Israël au Caire menace la Russie : la poursuite des coopérations de Moscou avec Téhéran va lui coûter cher puisque Riyad « n’honorerait jamais ses contrats avec une Russie qui est l’alliée de Téhéran ».
Dans un article publié par le Centre d’études politique de Jérusalem, le diplomate Zvi Mazel, visiblement désespéré de la tournure que prennent les événements en Syrie, accuse les États-Unis de « s’être endormis à nouveau » avant de se poser en porte-parole de Riyad et d’aborder l’état actuel des relations de la Russie avec l’Arabie saoudite :
« À vrai dire, la visite du roi Salmane à Moscou n’a pas été une décision facile à prendre. Mais les Saoudiens n’avaient pas d’autre choix face au flou que continuent de cultiver les États-Unis, non seulement en Syrie mais au Moyen-Orient en général. Lâchée par Washington, l’Arabie saoudite avait senti que le moment était venu pour amorcer le dialogue avec la Russie, une Russie dont le poids ne cesse de croître au Moyen-Orient et qui s’impose désormais comme une partie intégrante de toute solution aux crises qui traversent la région. Par conséquent, la mission la plus importante que s’était donnée le souverain saoudien aura été de convaincre Moscou du danger que représente l’Iran pour les pays du golfe [Persique]. D’après nos sources [et on se demande de quelles sources il s’agit ! NDLR], le roi Salmane a été très clair là-dessus au cours de ses entretiens avec Poutine. »
Après ce long développement, Mazel poursuit :
« Après des années de divergences russo-saoudiennes, Riyad a fini par comprendre qu’il lui faudra être prudent face aux États-Unis et ne pas prendre pour argent comptant leurs promesses, et ce, malgré un contrat d’armement d’une valeur de 110 milliards de dollars signé en mai avec Washington et dans un contexte où la coalition “sunnite” tant promise par les Américains tarde à voir le jour. »
Mais cette coalition peut-elle se concrétiser ? Mazel répond :
« Le Qatar, cible des sanctions imposées par l’Arabie saoudite et soutenues par les Émirats arabes unis, Bahreïn et l’Égypte, ne participera d’ailleurs jamais à une coalition anti-iranienne, surtout qu’il a raffermi ces derniers temps ses relations avec l’Iran. Car il est vrai que le coup anti-Qatar de Riyad ne lui a pas facilité les choses. Les Américains n’iront pas remettre définitivement en cause leurs liens avec les Qataris puisqu’ils veulent préserver avant tout leur plus grande base aérienne au Moyen-Orient, qui se trouve à Doha. L’Égypte non plus ne ralliera pas la coalition anti-iranienne dans la mesure où ce ralliement pourrait aller à l’encontre de ses intérêts et surtout du processus de rapprochement qu’elle a entamé avec la Russie. C’est sur fond de ces constats que le roi saoudien a pensé devoir se rendre en personne en Russie pour obtenir le soutien du Kremlin et il a desserré les cordons de la bourse : au moins 15 accords de coopération ont été signés avec la Russie dans les domaines de la sécurité, de l’armement, de l’aéronautique, des transactions commerciales ainsi que des télécommunications, entre autres. Mais la perspective d’un tel rapprochement n’a pas été du goût de Washington qui a aussitôt réagi : les États-Unis ont décidé soudain d’envoyer leurs THAAD en Arabie saoudite. Le but de la manœuvre consistait à empêcher la vente des S-400 russes à Riyad, car, on s’en doute, cette vente ouvrirait la voie à des coopérations militaires plus larges de Riyad avec Moscou. »
Mazel, visiblement en colère contre les Américains qui empêchent le rapprochement russo-saoudien, revient à la charge et écrit : « L’avenir des contrats signés entre la Russie et l’Arabie saoudite est d’ailleurs entouré d’un halo d’incertitudes, car plutôt que de vouloir les honorer, Riyad voulait pousser la Russie à renoncer à ses liens avec Téhéran, ce qu’il n’a pas réussi et on se demande bien pourquoi. »
Pour avoir longtemps servi en Égypte, Mazel se met ensuite à rêver d’une « coalition anti-iranienne » dirigée par Le Caire, à défaut d’un régime saoudien qui échoue partout où il passe :
« L’Égypte est un grand pays qui jouit d’une bonne presse auprès des peuples arabes. Elle dispose d’une grande armée et cela fait des décennies qu’elle a renoncé à son hostilité à l’égard d’Israël. Bref, elle est le candidat “sunnite” idéal pour faire face à l’Iran ».
Mazel rappelle aux Américains la « solide alliance » qui les lie au Caire et accuse Obama d’avoir poussé al-Sissi dans les bras de la Russie. Pour lui, il est opportun d’investir sur l’Égypte pour en faire un levier contre l’alliance Iran-Russie, d’autant plus que Le Caire entretient d’excellentes relations avec Moscou : « Al-Sissi se bat contre les terroristes au Sinaï presque pour le compte d’Israël. Ce sont des facteurs que les Américains devront prendre en compte, ne serait-ce que pour pousser l’Égypte à la tête de la coalition contre l’Iran. »