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Les analyses de la rédaction :
1. 80e anniversaire du massacre de Thiaroye : le Sénégal honore ses héros et réaffirme son devoir de mémoire
Le 1er décembre 2024, le Sénégal a célébré avec une grande solennité le 80e anniversaire du massacre de Thiaroye, un épisode tragique et emblématique de l’histoire coloniale. Cette journée de mémoire a permis de rendre hommage aux tirailleurs sénégalais, exécutés par l’armée française en 1944 alors qu’ils réclamaient simplement leurs droits après avoir combattu pour la France.
À Dakar, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a dévoilé une série de mesures historiques pour préserver la mémoire des tirailleurs sénégalais et réhabiliter cette page sombre de l’histoire commune à 17 pays africains.
« J’initierai plusieurs mesures de réappropriation de cette histoire commune avec 16 pays africains frères », a déclaré le président Faye en présence de plusieurs chefs d’État africains.
Les cinq initiatives phares :
Construction d’un mémorial à Thiaroye : Ce lieu de recueillement, ouvert aux nations d’origine des tirailleurs et au grand public, sera un symbole puissant de mémoire collective.
Création d’un centre de documentation et de recherche : destiné à conserver les archives, témoignages et récits, ce centre permettra d’approfondir la connaissance historique sur les tirailleurs et leurs sacrifices.
Renommage de rues et places : Plusieurs espaces publics porteront désormais les noms des tirailleurs et de l’événement de Thiaroye, inscrivant leur souvenir dans le quotidien des Sénégalais et des Africains.
Intégration de l’histoire de Thiaroye dans les programmes scolaires : Une mesure essentielle pour éduquer les générations futures et leur transmettre la mémoire de ce chapitre important.
Institution d’une journée du tirailleur : Le 1er décembre sera désormais une journée nationale dédiée à la mémoire des tirailleurs sénégalais.
« Cette commémoration ne doit pas être qu’un moment de recueillement », a insisté le président Faye, « elle doit être un serment renouvelé : un serment de justice, de mémoire et de vérité, pour que plus jamais Thiaroye et les événements similaires ne se répètent sous aucune forme, nulle part ailleurs dans le monde. »
Ces initiatives interviennent dans un contexte où la France commence à reconnaître officiellement sa responsabilité. Dans une lettre adressée à son homologue sénégalais, le président Emmanuel Macron a admis que « les événements de Thiaroye en 1944 ont abouti à un massacre ». Cette reconnaissance, bien que tardive, marque une étape importante, mais reste insuffisante face à l’ampleur des injustices subies.
Le massacre de Thiaroye, où des centaines de soldats africains furent exécutés par leurs alliés pour avoir osé revendiquer leur dû, demeure une blessure ouverte. Il symbolise la brutalité du colonialisme et le mépris racial des puissances coloniales.
Les tirailleurs sénégalais étaient des soldats issus de tout le continent : du Sénégal, mais aussi du Mali, de la Guinée, du Dahomey (Bénin), et d’autres territoires africains. Ils avaient combattu en première ligne, mais furent marginalisés lors des célébrations de la victoire. À Thiaroye, ils furent trahis par l’armée qu’ils avaient aidée avec courage.
La décision de transformer le 1er décembre en journée du tirailleur reflète une volonté claire de dépasser le simple hommage pour faire de cet événement un pilier de l’unité africaine. Cette commémoration transcende les frontières et rappelle aux Africains leur histoire commune, marquée par des luttes et des sacrifices partagés.
Le massacre de Thiaroye, reconnu par François Hollande comme un « massacre » et porté à l’écran par Sembène Ousmane, reste un rappel poignant de l’impératif de justice et de vérité historique. Alors que le Sénégal et d’autres nations africaines avancent vers la réhabilitation de ces héros, les descendants des victimes réclament toujours des réponses : qui a donné l’ordre ? Combien de morts y a-t-il eu exactement ? Ont-ils reçu des funérailles dignes ?
Comme le poète sénégalais Birago Diop l’a écrit : « Les morts ne sont pas morts. » Leur mémoire continue de vivre, inspirant aujourd’hui une Afrique résolument tournée vers la justice et la souveraineté.
Ce 80e anniversaire n’est pas seulement un hommage aux martyrs de Thiaroye, mais un appel à la dignité et à l’émancipation de l’Afrique tout entière.
2. Sénégal: mise à la porte des soldats français ; une étape décisive pour la souveraineté nationale
Dans une déclaration historique, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a affirmé, lors d’un entretien accordé à l’AFP jeudi, que la présence de bases militaires étrangères, notamment françaises, était incompatible avec la souveraineté nationale du Sénégal. Ce positionnement, clair et déterminé, marque une nouvelle étape dans l’affirmation de l’indépendance du pays, 64 ans après son accession à la souveraineté.
Depuis le palais présidentiel, le chef de l’État a été sans équivoque : « Le Sénégal est un pays indépendant, c’est un pays souverain, et la souveraineté ne s’accommode pas de la présence de bases militaires dans un pays souverain. » Par ces mots, il réaffirme une vision claire d’un État maître de ses décisions, désireux de tracer son propre chemin sur la scène internationale.
La décision de mettre fin à la présence militaire française n’est pas un rejet des relations bilatérales, mais une refonte nécessaire. Bassirou Diomaye Faye plaide pour un partenariat renouvelé et équitable avec la France, aligné sur les relations que le Sénégal entretient avec d’autres puissances comme la Chine, la Turquie ou l’Arabie saoudite. Ces pays, malgré l’absence de bases militaires sur le sol sénégalais, demeurent des partenaires de premier plan.
Le président a cité l’exemple de la Chine, aujourd’hui principal partenaire économique du Sénégal. « La Chine est aujourd’hui notre premier partenaire commercial en termes d’investissements et d’échanges. Pourtant, elle n’a aucune présence militaire au Sénégal. Cela prouve que coopération et absence de bases militaires peuvent aller de pair », a-t-il expliqué.
Ce modèle de partenariat, fondé sur des relations commerciales et des investissements stratégiques, illustre une approche moderne et pragmatique de la coopération internationale, dans laquelle le Sénégal conserve le contrôle total de son territoire et de ses décisions stratégiques.
Le président Faye a également annoncé une refonte imminente de la doctrine de coopération militaire du Sénégal. Cette mise à jour visera à moderniser les relations avec les partenaires internationaux tout en interdisant l’installation de bases étrangères. « Cette actualisation impose évidemment qu’il n’y ait plus de bases militaires de quelque pays que ce soit au Sénégal, mais elle impose aussi d’autres évolutions dans la coopération militaire », a précisé le chef de l’État.
Ce réajustement symbolise la volonté du Sénégal de prendre en main son destin militaire et stratégique, tout en restant ouvert à des collaborations respectueuses de sa souveraineté.
La déclaration de Bassirou Diomaye Faye marque une rupture majeure dans les relations franco-sénégalaises. Elle illustre la maturité politique du Sénégal, prêt à se positionner comme un acteur indépendant et respecté sur la scène internationale.
En choisissant de prioriser des partenariats équilibrés et sans ingérence, le président Faye envoie un message fort : le Sénégal d’aujourd’hui n’est pas seulement une nation indépendante sur le papier, mais un pays souverain dans ses décisions, prêt à défendre ses intérêts avec dignité et fierté.
3. Tchad: une rupture historique avec la France ; le coup de grâce contre l’Élysée
Ce 1er décembre 2024, le président de la République du Tchad, Mahamat Idriss Déby, a marqué un tournant décisif dans l’histoire diplomatique et sécuritaire du Tchad en annonçant la fin de l’accord de défense avec la France. Depuis le Palais Toumaï, il a présenté cette décision comme un « acte souverain, mûrement réfléchi et entièrement assumé », reflétant les aspirations profondes du peuple tchadien à une indépendance accrue et à une révision de ses partenariats stratégiques.
Signé dans un contexte géopolitique différent, cet accord de coopération militaire, révisé en 2019, visait à répondre à des défis sécuritaires communs. Toutefois, au fil des années, il s’est avéré inadapté aux réalités actuelles du Tchad. Selon le président Déby, cet accord ne répondait plus aux besoins du pays ni à ses attentes légitimes en matière de souveraineté et d’efficacité sur le terrain.
« Nos Forces de Défense et de Sécurité ont prouvé à maintes reprises leur capacité à défendre le territoire national face à des menaces complexes, notamment le terrorisme », a-t-il souligné, insistant sur la nécessité d’une armée tchadienne plus autonome et pleinement responsable de sa mission régalienne.
Loin d’être une rupture totale, cette décision marque une réorientation stratégique des relations bilatérales. Mahamat Idriss Déby a insisté sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un rejet de la coopération internationale ni d’une hostilité envers la France, mais plutôt d’un repositionnement destiné à bâtir des relations réciproques et équilibrées.
Le ministre tchadien des Affaires étrangères, Abderaman Koulamallah, a également confirmé cette approche, déclarant : « Nous souhaitons explorer de nouvelles formes de partenariat plus adaptées aux aspirations et besoins du Tchad. »
Cette décision s’inscrit dans un mouvement plus large sur le continent africain, où plusieurs nations réévaluent leurs coopérations militaires avec leurs partenaires historiques. Toutefois, le Tchad se démarque en insistant sur une approche constructive et non conflictuelle, tout en affirmant sa capacité à défendre ses propres intérêts.
Avec cette rupture, le Tchad envoie un message fort à la communauté internationale : celui d’un État souverain, déterminé à prendre en main son destin. Cette décision reflète une volonté de repenser les priorités stratégiques, en mettant l’accent sur la sécurité nationale et le développement de partenariats alignés sur les besoins du peuple tchadien.
Le président Déby a conclu son discours en appelant à un engagement collectif pour bâtir une paix durable, tout en réaffirmant l’ouverture du Tchad à des relations constructives basées sur le respect mutuel. Une déclaration qui résonne comme une affirmation de l’indépendance du pays et de son rôle de leader régional dans la lutte contre le terrorisme et la consolidation de la paix en Afrique.