Le Niger vient de poser un acte significatif dans la réorganisation de son secteur minier. En effet, le gouvernement a annulé le permis d’exploitation de la mine d’uranium d’Imouraren, détenue par la société française Orano.
Le Niger a retiré le permis d'exploitation de l'importante mine d'uranium d'Imouraren (nord) à l'entreprise française Orano, malgré le lancement récent de travaux sur le site.
« Orano prend acte de la décision des autorités du Niger de retirer à sa filiale Imouraren SA son permis d'exploiter le gisement, et ce malgré la reprise des activités sur le site conformément aux attentes qu'elles avaient exprimées », a fait savoir le groupe français.
Le groupe dit « s’inquiéter de l'impact négatif qu'aura cette décision de retrait du permis d'exploitation du gisement sur le développement économique, social et sociétal de la région ». Il ne s’interdit pas de contester la décision du retrait du permis d’exploitation devant la justice nationale ou internationale.
En marge de la publication de ses résultats annuels en février, son DG Nicolas Maes avait pris soin de relativiser l'importance de la production nigérienne d'uranium à l'échelle mondiale : 1 800 tonnes sur 70 000 tonnes. L'année dernière, seules 1 200 tonnes ont été expédiées depuis le Niger. Le pays pèse 15% de la production du groupe, un poids « significatif mais qui n'est pas de nature à mettre le système en péril », avait-il alors expliqué.
La production d’électricité en France repose à près de 70% sur son parc nucléaire. L’accès à l’uranium reste donc une pierre angulaire de la politique énergétique française.
Ce geste marque une étape cruciale dans les relations franco-nigériennes, déjà tendues suite à un coup d’État militaire qui a vu le Niger s’éloigner progressivement des influences extérieures. La France, présente depuis des décennies dans l’exploitation de l’uranium nigérien, se retrouve ainsi contrainte de revoir ses stratégies dans la région.
Les nouvelles autorités militaires au Niger ont clairement manifesté leur volonté de reprendre en main les ressources naturelles, critiquant les accords précédemment conclus avec des entreprises étrangères, notamment françaises. La révocation du permis d’exploitation d’Orano s’inscrit dans cette démarche de souveraineté nationale, visant à rééquilibrer les bénéfices tirés des richesses naturelles.
Orano avait pourtant relancé récemment des activités sur le site d’Imouraren, en réponse à une sollicitation des autorités pour exploiter ce gisement considéré comme l’un des plus grands au monde avec des réserves estimées à 200 000 tonnes. Malgré la hausse favorable des cours de l’uranium, qui rendait l’exploitation de nouveau viable économiquement, le ministère nigérien des mines a exigé des progrès concrets dans les travaux d’exploitation sous peine de retirer le permis.
Orano, précédemment appelée Areva, opère depuis longtemps au Niger, notamment à travers la mine de Somaïr. Le groupe avait prévu de mobiliser plusieurs centaines de personnes pour relancer Imouraren. Cependant, malgré l’ouverture des infrastructures le 4 juin 2024 pour accueillir les équipes et avancer les travaux, la décision du 20 juin du gouvernement nigérien de retirer le permis a été un coup dur.
Ce retrait de permis ne se limite pas à un simple différend entre une entreprise et un État. Il reflète une dynamique plus large dans les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines, où le désir d’indépendance économique devient de plus en plus prégnant. Le Niger, second fournisseur d’uranium pour l’Europe après le Kazakhstan, joue une carte stratégique importante en cherchant à contrôler davantage ses ressources.
L’issue de cette confrontation pourrait redéfinir non seulement les relations franco-nigériennes mais aussi la manière dont les ressources naturelles sont gérées en Afrique. Ainsi, le Niger pourrait bénéficier d’une plus grande autonomie et de retombées économiques améliorées. Cet événement pourrait également encourager d’autres nations africaines à suivre le même chemin, redessinant ainsi le paysage géopolitique et économique de la région.