Les titres de la rédaction :
Les analyses de la rédaction :
1. MINUSMA-MONUSCO ne font pas l’affaire
Il n’y aura plus de mission de paix des Nations-Unies au Mali et en RDC dès 2024.
Après plus de 10 ans de présence, la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) vient d’achever le 11 décembre son départ du Mali.
À partir du 31 décembre, il n’y aura plus un seul membre de la MINUSMA sur le sol malien. Bamako avait en effet demandé le 16 juin 2022, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, le « retrait sans délai » de cette mission onusienne.
Le 11 décembre dernier, lors de la cérémonie solennelle marquant son départ du Mali, le patron de la MINUSMA s’est montré mesuré, refusant de parler d’échec.
« L’action n’a pas été parfaite », a reconnu son chef El Ghassim Wane, « mais je pense que la présence de la mission a aidé à protéger de nombreuses populations là-bas (…) Nous avons joué un rôle important dans la promotion du genre. Nous avons joué un rôle extrêmement important en ce qui concerne le renforcement des capacités locales dans le domaine des droits de l’Homme ».
Dans l’opinion publique malienne, l’on avait du mal à comprendre la persistance de groupes armés dans le nord du pays, malgré la présence des troupes onusiennes notamment. »
Le réalisme impose le constat de l’échec de la MINUSMA dont le mandat ne répond pas au défi sécuritaire », a estimé le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop devant les membres du Conseil de sécurité de l’ONU.
« La MINUSMA semble devenir partie du problème en alimentant les tensions communautaires », et cela engendre un sentiment de méfiance des populations et « une crise de confiance entre les autorités maliennes et la MINUSMA », avait-il expliqué en juin 2022.
Pour le politologue malien Abdoulaye Sangaré, l’échec de la MINUSMA était prévisible.
« Le Conseil de Sécurité n’a pas établi des objectifs mesurables et quantifiables à la MINUSMA. De plus, la mission était mal calibrée, avec un mandat inadéquat. Il me semble que le mandat de maintien de la paix était tout à fait inapproprié. Comment pouvez-vous venir maintenir ce qui n’existe pas ? Il ne revenait pas à la mission onusienne d’établir la paix qui n’existait pas du reste. Il fallait plutôt imposer la paix. »
D’après M. Sangaré, la mission onusienne cherchait ses marques sur le terrain en essayant de s’adapter. » Un mandat d’imposition de la paix était approprié. Un mandat plus robuste s’imposait, insiste-t-il. Dommage, la mission n’était pas dans cette logique ».
Les incompréhensions entre les autorités maliennes et la MINUSMA tirent leurs origines à partir de ce quiproquo ».
On peut comprendre pourquoi, aussitôt la mission partie, les forces armées maliennes se sont emparées du terrain pour reconquérir le terrain.
Il a fallu deux semaines exactement aux forces armées maliennes pour s’emparer de Kidal, ville présentée comme « fief imprenable des rebelles » depuis 2012.
« La reconquête de la ville, fief de la rébellion de 2012, obtenue presque sans combattre contre les groupes armés regroupés au sein représente pour les Autorités au pouvoir à Bamako un succès symbolique qui répond à plusieurs objectifs : alimenter sa campagne d’expansion, affaiblir la rébellion et laver les revers subis », écrit The Conversation.
La MONUSCO se retire
Si au Mali le départ de la MINUSMA est acté, en RDC le processus de retrait de la MONUSCO (la Mission de l’Organisation des Nations unies en République démocratique du Congo) a commencé.
Le président congolais Félix Tshisekedi, avait appelé dans son discours à la 78e Assemblée générale de l’ONU, à New York, le 20 septembre dernier, au retrait accéléré de la MONUSCO de son pays, affirmant avoir demandé à son gouvernement d’entamer des discussions avec l’ONU afin d’accélérer le processus de retrait des Casques bleus qui, a-t-il regretté, n’ont « pas réussi à faire face » aux groupes armés.
Comme au Mali, l’opinion publique ne comprend pas comment en 20 ans de présence, les troupes onusiennes (16 000 personnes) n’ont pas réussi à rétablir l’ordre dans l’est, infesté par un faisceau de groupes rebelles qui sèment la terreur, la mort et la désolation.
« Il y a une frustration d’une partie de la population (…), parce que la situation sécuritaire est encore préoccupante », a reconnu devant la presse Jean-Pierre Lacroix, chef des opérations de paix de l’ONU. « Mais il y a aussi des manipulations, des fake news (…), parce que tout le monde n’a pas intérêt au retour de la paix », a ajouté M. Lacroix.
Pour pallier le départ de la MONUSCO, le gouvernement congolais a fait appel aux troupes de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) : la SAMIRDC, une mission de paix qui semble répondre aux préoccupations d’Abdoulaye Sangaré.
Contrairement à la MINUSMA et à la MONUSCO, le mandat de la nouvelle mission de paix devrait être « robuste ». Il s’agira d’un « mandat offensif » destiné à « imposer la paix » et non au « maintien de la paix ». Le public jugera l’action de la nouvelle mission sur le terrain.
2. Le Niger rejette tout ce qui vient de la CEDEAO
Lors de son dernier sommet du 10 décembre, l'institution sous-régionale a demandé la libération du président déchu Mohamed Bazoum avant toute levée des sanctions imposées au Niger.
Le président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) et chef de l'État du Niger Abdourahamane Tiani a rejeté, dimanche, tout « préalable » de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour la levée des sanctions imposées par l'institution sous-régionale au lendemain du coup d'État du 26 juillet dernier contre le président Mohamed Bazoum.
« En décidant de nous imposer des sanctions injustifiées, cyniques, iniques, criminelles, inhumaines et irresponsables, la CEDEAO et l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) pensaient nous mettre à genou et nous ramener dans le giron du régime déchu et de la France », a déclaré Abdourahamane Tiani dans un message à la Nation prononcé à l'occasion du 63ème anniversaire de la proclamation de la République du Niger célébré le 18 décembre de chaque année.
« Ces organisations régionales ne savaient pas qu'elles avaient en face d'elles un peuple guerrier », a-t-il poursuivi. « Nous n'acceptons aucun chantage, aucune intimidation et aucun préalable », a prévenu Abdourahamane Tiani, notant que « l'heure des tractations et des combines dans les officines est révolue ».
Lors du dernier sommet de ses Chefs d'État et de gouvernement tenu le 10 décembre courant à Abuja au Nigeria, la CEDEAO a maintenu les sanctions contre le Niger. Elle a conditionné leur levée graduelle par la libération « immédiate et sans condition » du président déchu Mohamed Bazoum, ainsi que la publication d'un chronogramme pour une transition de « courte durée » par les autorités militaires nigériennes.
Dans la foulée, la CEDEAO a constitué un groupe des Chefs d'État, dont le Togolais Faure Gnassingbé, en vue d'entamer des négociations avec les nouvelles autorités nigériennes. Jeudi, le ministre togolais des Affaires étrangères Robert Dussey a été reçu à Niamey par le Premier ministre Ali Mahamane Lamine Zene.
« Nous avons travaillé et nous avons convenu d'un timing de la transition », a déclaré le chef de la diplomatie togolaise dans un point de presse tenu à l'issue de son entretien avec le Premier ministre nigérien.
3. RCA : riposte de Bangui contre les USA
Les puissances de l’OTAN continuent leurs politiques de harcèlement militaire et géopolitique des nations africaines qui décident de se libérer des menaces sécuritaires sur leurs territoires avec l’aide de partenaires fiables ne relevant pas de cette alliance occidentale. Ces mouvements de déstabilisation mis en œuvre par les pays occidentaux constituent une violation flagrante des dispositions de la charte des Nations unies de 1945 relativement au respect de la souveraineté et à l’égalité des États dans la vie internationale.
En effet, de sources sécuritaires proches du pouvoir de Bangui, certains médias ont été informés que les États-Unis ont mené unilatéralement des manœuvres militaires sur le territoire centrafricain courant la semaine du 4 au 9 décembre. Ces actions se sont déroulées sans consulter ni recueillir l’accord des autorités du pays, constituant de facto une menace contre la sécurité des citoyens de ce pays.
Fait plus inquiétant, pendant le déroulement de ces opérations clandestines en sol centrafricain, les services de désinformation du gouvernement Etats-Unien ont fait circuler un faux scoop présenté comme des révélations. L’on a ainsi pu lire chez nos confrères :
« La fuite de la correspondance du conseil de Sécurité des Nations Unies a révélé que les États-Unis envisageaient de fournir à la République centrafricaine “des systèmes de radiocommunication et des systèmes de vision nocturne aérienne destinés à être utilisés par le personnel des États-Unis dans le cadre du programme de sauvetage du personnel du département de la défense des États-Unis (PRESS) pour appuyer les opérations militaires des États-Unis en République Centrafricaine”. Ainsi, on peut conclure que les Américains planifient des opérations militaires sur le territoire de la République centrafricaine. »
L’usage de ce leurre communicationnel peut être un indicateur majeur de ce que la première puissance de l’OTAN prépare à Bangui un plus important coup de nature à déstabiliser l’État dans son ensemble et à remettre en question les acquis sécuritaires du pays.
Ainsi on peut noter l’augmentation du nombre de vols d’avions de l’US air force au-dessus du territoire de la RCA. Souvent, ces vols commencent et se terminent dans le même pays voisin de la RCA, tandis que les avions volent sur le territoire de la RCA. En transit à travers le territoire de la République centrafricaine, de tels vols ne peuvent pas être expliqués. Dans ce cas, l’avion C-146 Wolfhound est utilisé. Ce type est exclusivement géré par le département des opérations spéciales des États-Unis (USSOCOM), utilisé pour « le transfert opérationnel de personnel, l’évacuation des blessés et l’exécution de tâches non standard ».
Ces activités hostiles des États-Unis interviennent à un moment ou la CIA a transféré de nouveaux effectifs dans son ambassade à Bangui fin novembre dernier, sous fond de volonté de dissuasion de la coopération stratégique entre la Centrafrique et la Fédération de Russie. Immixtion dans les affaires diplomatiques du pays qui viole ouvertement et sans vergogne la Charte des Nations Unies qui stipule que :
« L’un des principaux buts des Nations unies, et partant du Conseil de sécurité, consiste à développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect “du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes” (...) la Charte interdit la menace ou l’emploi de la force contre la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance politique du tout État. »
Ces manœuvres menaçantes et illégales achèvent de montrer le caractère arbitraire de la politique étrangère états-unienne, reposant pour l’essentiel sur la violence et l’irrespect du droit international.
Les autorités centrafricaines sont désormais en droit de faire valoir le principe de réciprocité dans le cadre d’une réponse proportionnée, chirurgicale et adéquate aux menaces sécuritaires que leur posent les États-Unis.
En effet, la violation du territoire centrafricain par les forces armées étatsuniennes constitue non seulement une attaque illégale du point de vue du droit international, mais aussi une provocation contre le peuple centrafricain. La réponse du gouvernement de ce pays devrait donc prendre en compte tous ces aspects du problème posé pour y apporter une riposte énergique, efficace et ciblée.
Le premier point de réponse consiste en une attitude de protestation diplomatique. Elle repose sur les articles 1&2 de la Charte des Nations Unies qui préconise l’« égalité souveraine » des États partis. Ceci suppose que les États ne sont soumis à aucune instance supérieure, encore moins à aucun autre qui s’autoproclame « gendarme du monde ».
En septembre 2022, c’est sur la base de ce principe que le Mali a documenté un ensemble d’activités hostiles de la France sur son territoire afin de déposer sa plainte au conseil de sécurité, encore en attente de discussions. Le deuxième est l’interpellation de l’ambassade des États-Unis pour lui demander des explications par rapport à la recrudescence de ces activités hostiles sur le territoire centrafricain. Cette mesure vise à recueillir le discours officiel de ce pays occidental afin d’y apporter soit une confirmation, soit un démenti. Cette démarche sert également à mieux saisir les intentions inavouées dans cette activité dangereuse et à se préparer en conséquence.
La troisième est purement sécuritaire. Il s’agit d’opérer une nouvelle montée en puissance des FACAs dans le partenariat avec la Fédération de Russie ainsi que la sollicitation d’un plus grand partenariat stratégique dans le sens de la sanctuarisation du ciel centrafricain. Dans cette perspective l’État centrafricain se prépare à appliquer un autre principe du droit international qui est la légitime défense reconnue comme un droit naturel.
Selon la Charte des Nations Unies de 1945, le droit à la légitime défense est un droit reconnu à tout sujet de droit international en tant que droit protecteur. Elle implique que toute Nation a le droit de se défendre sur la scène internationale contre toute menace à son intégrité.
En outre, selon la nouvelle constitution de la Centrafrique, l’État assure la sécurité du pays et de ses ressources tant du sous-sol que du ciel. Cette disposition constitutionnelle confère au président de la République les pleins pouvoirs d’agir en faveur de la protection de l’ensemble du territoire de son pays.
Ce nouveau défi sécuritaire interpelle donc le Président Touadéra et son gouvernement dont les succès sur les différents groupes armés terroristes et leur sponsor français ne semblent définitivement pas avoir fermé la page des adversités. Avec l’ouverture de ce qui apparaît désormais comme le front des États-Unis, le Goliath de l’OTAN, le David centrafricain devra encore se montrer miraculeux.