Les titres de la rédaction :
Les analyses de la rédaction :
1. Colonialisme : la France et sa politique d’autruche
Avant les récents discours du roi Charles III au Kenya et du président allemand Frank-Walter Steinmeier en Tanzanie, d’autres pays européens ont présenté des excuses pour les exactions commises pendant la période coloniale en Afrique.
En 2013, le Royaume-Uni avait exprimé des « regrets sincères » au Kenya sans s’excuser totalement pour la répression des Mau Mau dans les années 1950. La même année, le Premier ministre britannique David Cameron avait qualifié de « profondément honteux » le massacre perpétré en 1919 en Inde.
L’Allemagne a reconnu en 2021 le « génocide » contre les Namas et Hereros en Namibie colonisée de 1884 à 1915. En visite en Tanzanie cette semaine, le président Frank-Walter Steinmeier a demandé « pardon » pour les victimes de la domination coloniale allemande, dont le massacre Maji-Maji au début du XXe siècle.
La Belgique a exprimé en 2020 et 2022 ses « plus profonds regrets » pour les « blessures » infligées au Congo belge, ainsi que des excuses en 2019 pour les enfants métis arrachés à leur mère.
Quant à l’Italie, Silvio Berlusconi a présenté en 2008 ses excuses à la Libye pour la colonisation de 1911 à 1942.
La France a reconnu en 2017 que la colonisation de l’Algérie était « un crime contre l’humanité », avant de s’engager en 2021 à des « actes symboliques » de réconciliation sans « repentance » ni « excuses ».
Alors que d’autres pays ont su réinterroger sur leur passé colonial dans des lieux ouverts au débat, la France fait encore figure d’exception par son incapacité à ériger le musée fédérateur réclamé de longue date.
La création d’un musée consacré aux colonisations en France est une vieille idée qui revient régulièrement dans le débat public. Portée depuis plusieurs années par des historiens comme Nicolas Bancel et Pascal Blanchard, cette proposition trouve un écho renouvelé dans un article du Monde du 30 octobre dernier. Selon les deux chercheurs, un tel musée permettrait de faire avancer la réflexion collective sur cet épisode crucial de l’histoire de France, qui reste encore largement occultée dans l’espace public.
Pourtant, l’histoire coloniale est de plus en plus présente dans les travaux académiques et les débats de société. Mais les positions restent polarisées entre partisans d’une vision nostalgique du passé et tenants d’une lecture décoloniale radicale. « Plus personne ne conteste aujourd’hui l’importance de cette histoire longue de cinq siècles », souligne le quotidien. Mais dans le même temps, la France fait figure de mauvais élève par rapport à ses voisins européens sur la préservation et la transmission de cette mémoire complexe.
Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas... De nombreuses anciennes puissances coloniales se sont dotées ces dernières années de structures muséales et de commissions historiques pour explorer ce pan méconnu de leur identité nationale. En France, malgré le discours d’Emmanuel Macron qualifiant la colonisation de « crime contre l’humanité », peu de choses ont concrètement évolué. Si des rapports ont été produits sur des épisodes particuliers, aucun grand musée d’envergure n’a vu le jour pour mettre en perspective l’ensemble de cette histoire multiséculaire.
Pire, le débat public sur la nécessité ou non d’un tel projet fait défaut, contrairement aux autres pays. « Notre pays est ainsi désormais à la traîne des initiatives des autres ex-métropoles coloniales en ce domaine », relève Le Monde. Pourtant, des millions de Français ont un lien direct avec cette période, qu’ils soient rapatriés, harkis, originaires d’outre-mer ou issus de l’immigration postcoloniale. Autant de mémoires et d’identités longtemps minorées.
Pour les historiens, ériger un musée des colonisations permettrait de « relativiser les mémoires antagonistes » et d’éviter la « polarisation entre nostalgiques et décoloniaux radicaux ». Il s’agirait aussi d’« intégrer à l’histoire les millions de personnes qui s’en sentent exclues ». Plus largement, un tel projet contribuerait à « repenser notre roman national » à l’aune de cette page longtemps occultée. En ouvrant le débat avec l’ensemble des acteurs concernés, il s’inscrirait dans une démarche pédagogique et fédératrice.
Reste à savoir si la France sera enfin prête à relever ce défi mémoriel et historique, à l’heure où s’ouvre la Cité internationale de la langue française. Pour l’instant, malgré les discours, le tabou persiste sur ce pan du passé national. Pourtant, conclut l’article, « si nous sommes capables d’édifier cette cité, nous devons imaginer ce musée. Sinon, la page coloniale ne pourra être tournée. »
2. Niger : le procureur général confirme une tentative d’évasion de Mohamed Bazoum
Au Niger, le procureur général auprès de la Cour d’appel de Niamey, Salissou Chaïbou, a affirmé mardi que le président Mohamed Bazoum, renversé par un coup de force en fin juillet, avait bien tenté de s’évader dans la nuit du 18 au 19 octobre.
« Il s’agit de faits réels et non d’une mise en scène comme certains esprits ont essayé de le faire croire », a affirmé Salissou Chaïbou à propos de la tentative d’évasion de Bazoum. Il relève que « les services de sécurité ont eu vent de la préparation du plan d’exfiltration du président déchu et que la surveillance mise en place a confirmé leurs soupçons ».
« Dans la nuit du 18 au 19 octobre », Bazoum, « sa famille, son équipe de sécurité et ses cuisiniers, transportant divers colis, ont été interpellés » par des « agents de la garde présidentielle, alors qu’ils se dirigeaient vers la sortie du palais », a encore indiqué Chaïbou, précisant qu’ils comptaient aller dans un premier temps dans une maison à Niamey « identifiée comme étant la propriété de Mohamed Ben Hamaye, un ancien membre de la garde rapprochée de Bazoum » et « cerveau présumé de l’opération », avant de regagner en hélicoptère Birnin Kebbi, dans le nord-ouest du Nigeria.
Le procureur général auprès de la Cour d’appel de Niamey a annoncé également la saisie de sommes d’argent en francs CFA et en devises étrangères, ainsi que « divers biens précieux » dont « 2 800 grammes d’or, 333 grammes d’argent », et « de nombreuses puces de téléphone », après la fouille des colis et une perquisition dans la résidence de Bazoum.
Chaïbou a fait état d’« espionnage et de renseignement sur le dispositif de la garde présidentielle à travers des prises de vue (...) les images sont envoyées aux Français par l’ancien président de la République ».
« Vingt-trois personnes civiles et militaires ont été interpellées dans le cadre de cette affaire », note-t-il, indiquant qu’une enquête était en cours.
Le 19 octobre dernier, les militaires au pouvoir au Niger avaient accusé, dans une déclaration lue à la télévision nationale, Mohamed Bazoum de tentative d’évasion avec l’aide d’« une puissance étrangère ».
Le lendemain, soit le 20 octobre, les avocats de Bazoum avaient rejeté, les « accusations montées de toutes pièces » par les militaires, affirmant que le président déchu, « sa femme et son fils sont détenus au secret, sans accès aux avocats ni au monde extérieur ».
Mohamed Bazoum refuse de démissionner depuis le coup d’État du 26 juillet. Le 18 septembre, il avait saisi la justice ouest-africaine pour demander sa libération et le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Niger.
3. Mali : l’armée semble récupérer Kidal
Les Casques bleus de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) basés dans le camp de Kidal, ont plié leurs bagages, mardi 31 octobre 2023. Ce retrait a été confirmé par l’armée malienne à travers un communiqué dont la teneur suit : « Nous avons appris, ce jour 31 octobre 2023, le retrait de la MINUSMA du camp de Kidal. Nous constatons une fois de plus et avec beaucoup de regret que ce retrait n’a point fait l’objet de rétrocession aux FAMA, comme stipulé dans le calendrier d’occupation des emprises MINUSMA par les FAMA ». Donnant plus de détails par rapport à ce retrait qui était tant attendu, l’armée malienne a averti que « cette situation de départ précipité de la MINUSMA met en péril le processus entamé et menace la sécurité et la stabilité de la région de Kidal ».
Pour rappel, le 23 octobre 2023, la Minusma avait acté son retrait du Camp d’Aguelhok. L’armée avait, dans un communiqué, constaté cependant avec beaucoup de regret que ce retrait n’a point fait l’objet de rétrocession aux FAMA, comme stipulé dans le calendrier d’occupation des emprises Minusma par les FAMA. Selon l’armée, cette situation de départ précipité de la MINUSMA met en péril le processus entamé et menace la sécurité et la stabilité dans la localité d’Aguelhok. « C’est ainsi que ce mardi 24 octobre, les terroristes ont profité de ce désordre pour s’introduire dans le camp et détruire plusieurs installations. Ils ont été neutralisés par les vecteurs aériens des FAMA », rapporte l’armée malienne.
L’armée malienne avait aussi annoncé, le samedi 7 octobre 2023, avoir repris le contrôle de la ville d’Anefis, située à 110 kilomètres de la ville de Kidal. Depuis dix ans, la ville était sous le contrôle des groupes armés signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu des pourparlers d’Alger. « Les FAMA ont pris tôt ce matin le contrôle total de la ville d’Anéfis. Les évaluations sont en cours », a indiqué l’armée malienne dans un communiqué. « Nous appelons les populations au calme. Tout est mis en œuvre pour assurer la sécurité des personnes et de leurs biens », précise le document.
Dans le cadre de la restitution formelle des camps de la MINUSMA aux autorités maliennes, un convoi de l’armée malienne a quitté Gao, le lundi 2 octobre dernier, en direction de Kidal.
La MINUSMA quitte le Mali après une décennie de présence, au cours de laquelle elle a établi 12 camps dans le nord et le centre du pays, ainsi que son quartier général à Bamako. La première phase de retrait, du 1er au 31 août 2023, concernait la rétrocession au gouvernement du Mali des camps et sites d’Ogossagou, de Ber, de Goundam et de Ménaka. La bonne coordination entre les deux parties, selon les autorités maliennes, a facilité la rétrocession au gouvernement des camps d’Ogossagou, le 3 août 2023, de Ber, le 14 août 2023, de Goundam, le 15 août 2023 et de Ménaka, le 25 août 2023, marquant ainsi l’achèvement de la première phase du retrait de la MINUSMA. La deuxième phase a débuté le 1er septembre et doit s’achever le 31 décembre 2023. Cette étape concerne les camps de Tessalit, Aguelhok, Ansongo, Kidal et Douentza.
Après Anéfis, Tessalit et Aguelhok, l’armée malienne s’apprête à faire son entrée dans Kidal. Cette étape de Kidal est la plus scrutée par les Maliens dans leur écrasante majorité parmi toutes les villes susmentionnées conquises par les FAMA.
L’offensive militaire de l’armée malienne qui est partie de Gao le 2 octobre, a pour mission principale de s’installer dans les emprises laissées par la MINUSMA dans l’ensemble de la région de Kidal. En dépit des difficultés, l’armée malienne continue de s’imposer en occupant progressivement les camps de la force onusienne.
« La phase deux de cette opération sera beaucoup plus difficile. Mais nous allons occuper toutes les emprises de la MINUSMA. L’armée est prête pour cette opération », a déclaré le colonel-major Souleymane Dembélé, le chef de la Dirpa, lors d’une conférence de presse conjointe organisée par le ministère de la Défense et celui des Affaires étrangères et de la Coopération internationale.
Après Anéfis, Tessalit et Aguelhok lundi dernier, l’armée malienne s’apprête à faire son entrée à Kidal, bastion des ex-rebelles touareg réunis aujourd’hui sous la bannière de CSP-PSD en guerre ouverte avec le pouvoir central de Bamako.
Une colonne de l’’armée malienne, partie de Gao le 2 octobre dernier, est déjà stationnée à peu près à 110 km de la porte d’entrée de la ville de Kidal, avant le 15 novembre prochain, date à laquelle la MINUSMA devrait, selon le chronogramme, rétrocéder son camp aux FAMA.
Kidal, une étape stratégique dans la reconquête du Nord que les Maliens dans leur écrasante majorité scrutent au millimètre près. Car, selon eux, depuis 2012, Kidal, qui est une partie du Mali, échappe à tout contrôle de l’État central. Ils affirment que depuis plus de dix ans, Kidal est devenu un État dans l’État du Mali et que l’heure de la récréation est terminée.
« Dans quelques jours, Kidal sera dans le giron malien. Une fois que l’ensemble du territoire est conquis, nous pourrons aller aux élections », a laissé attendre un Malien qui a hâte de voir Kidal sous le contrôle de l’armée malienne.
Si l’entrée à Kidal est toujours scrutée, il y a depuis un moment une certaine accalmie, moins d’attaques, moins de combats entre les deux belligérants sur le terrain.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le départ de la MINUSMA mettra fin, à coup sûr, à l’application de l’Accord d’Alger qui a actuellement du plomb dans l’aile.