« La tension est vive » au Tchad depuis le meurtre d’un soldat tchadien par un infirmier militaire français dans la ville de Faya-Largeau.
« La nouvelle s’est répandue et la population est sortie pour manifester sa colère dans la ville de Faya », où le Tchadien a été tué à bout portant suite à une altercation avec un infirmier militaire français, a indiqué auprès de Sputnik le politologue tchadien Evariste Ngarlem Toldé.
En effet, plusieurs personnes sont descendus dans la rue pour protester contre le meurtre de leur compatriote. « La manifestation était vraiment violente », a déclaré Toldé.
« L’armée tchadienne est intervenue pour disperser les manifestants en tirant d’abord des coups de sommation », a-t-il précisé.
Le politologue tchadien Evariste Ngarlem Toldé a confirmé à RIA-Novosti qu'il y avait eu des manifestations houleuses dans la ville de Faya-Largeau, soulignant que les troupes tchadiennes qui gardaient la base française avaient tiré à balles réelles pour disperser la foule en colère.
Deux personnes ont été tuées et une quinzaine d'autres blessées alors qu'elles tentaient de pénétrer dans la base militaire française, a indiqué mercredi à Sputnik une source locale bien informée.
Immédiatement après l'incident, la majeure partie de la base militaire française a été évacuée par avion vers la capitale tchadienne, N'Djamena.
Actuellement, la base française est bloquée par l'armée tchadienne afin d'empêcher les manifestants de pénétrer à nouveau dans son périmètre, ajoute la source.
Le général Ali Maïd Kebir, gouverneur de la région du Borkou dont Faya-Largeau est le chef-lieu, a défendu auprès de l’AFP l’idée que l’infirmier français se défendait et qu’il s’agissait d’un acte isolé. Selon lui, le militaire tchadien "n’était pas dans un état normal". Celui-ci s'est rendu pour un pansement dans la base militaire de l'armée française et a ensuite blessé un infirmier militaire français avec un scalpel.
"Un sentiment anti-Français"
Le politologue tchadien a évoqué "un sentiment anti-Français qui est en train de se dessiner à Faya-Largeau".
« Des représentants locaux au sein de l’Assemblée nationale ont élevé la voix pour demander déjà le départ de l’armée française car ils ne comprennent pas qu’elle puisse tuer un Tchadien sur le territoire tchadien et que l’armée tchadienne puisse se mettre du côté de l’armée française », a ajouté le politologue tchadien.
La population brandissait des banderoles sur lesquelles on pouvait lire : « France, dégage! » ou « France, nous ne voulons pas de toi ».
Une source diplomatique française a indiqué au site d'information tchadienne, Alwihda que les habitants avaient tenté de prendre d'assaut la base française au moins à deux reprises après que la nouvelle de l'incident se soit répandue, mais n'avaient pas réussi à pénétrer dans l'installation.
Les troupes françaises sont présentes depuis une quarantaine d’années au Tchad et notamment dans le nord à Faya-Largeau. « Or, les habitants de cette région trouvent que ça n’aide pas trop », a observé Evariste Ngarlem Toldé.
« Ils n’ont pas vu une évolution notable de leurs conditions de vie, ni de la situation sociale ou des structures scolaires ou sanitaires. Ils estiment donc que la France ne fait rien et qu’elle est en train de tuer les Tchadiens pour rien », a-t-il expliqué.
D’après le politologue, ce qu’« on craint aujourd’hui, c’est que le sentiment anti-Français puisse se développer au Tchad et comme une traînée de poudre, se propager au reste du pays ».
Une enquête conjointe a été lancée par les militaires tchadiens et français pour enquêter sur l'incident, a-t-il ajouté.