Actualité en Afrique :
Analyses de la rédaction :
1. RDC : l’aveu d’impuissance de l’ONU choque !
Beaucoup de Congolais n’en croyaient pas leurs oreilles, en entendant la rhétorique développée par le secrétaire général de l’ONU, dans une interview qu’il accordait, dimanche 18 septembre, à RFI et à France 24. Ils y voyaient le monde en envers. Beaucoup d’autres téléspectateurs non congolais ont exprimé leur perplexité. Quand le numéro 1 de l’ONU, sans langue de bois, met en exergue « l’aveu d’impuissance de l’organisation mondiale devant un vulgaire groupe de rebelles », c’est tout simplement grave.
Au fait qu’est-ce que l’ONU et qu’est-ce que le mouvement de rébellion dénommé M23 ? Leur prêtant une personnalité physique, n’est-ce pas un mammouth face à un crapaud ? Aucune comparaison entre les deux grandeurs. Sauf, bien entendu, s’il faut tenir compte de la dialectique diplomatique pour laquelle la vertu de la négociation prévaut sur la violence de la guerre. En cela uniquement, le M23 pèserait devant l’ONU.
À ramasser les idées-forces, qui forment l’ossature des réponses du patron de l’ONU, on a d’abord l’impression d’écouter un galimatias.
« Dans l’est du Congo-Kinshasa, les populations manifestent contre les Casques bleus de la Monusco, parce qu’elles les accusent de ne pas les protéger contre les rebelles. Il y a eu des manifestations meurtrières au mois de juillet. Est-ce que vous allez envisager un départ anticipé de ces Casques bleus avant la date de 2024, comme initialement prévu, et peut-être même avant la présidentielle de 2023 comme vous le demandent plusieurs autorités ? »
Il y a un programme de réduction progressive de la force en accord avec le gouvernement. Mais parlons franchement. Les populations ont toujours eu le désir de voir les forces onusiennes triompher des mouvements rebelles qui les attaquent. Cependant, on est dans une situation extrêmement difficile. Le fait est que les Nations unies ne sont pas capables de battre le M23. La vérité, c’est que le M23 aujourd’hui est une armée moderne, avec des équipements lourds qui sont plus perfectionnés que ceux de la Monusco. »
En faut-il plus pour comprendre la situation difficile que traverse la RD Congo, prise au piège des intérêts économiques ? La « chronologique des faits » conduit à une réponse sans doute aisée. Sans un recul dans le temps, l’exemple récent de la diplomatie américaine en dit long, à travers le passage à Kinshasa, en août, du secrétaire d’Etat Antony Blinken. S’il a abordé la « question congolaise », par rapport à la présence spécialement des troupes rwandaises en RDC, il ne l’a fait que du bout des lèvres. Aucune condamnation ni mise en garde vis-à-vis du Rwanda, s’étant résolue de mettre gentiment dos à dos Kinshasa et Kigali. Quid, alors, du rapport d’experts de l’ONU ayant pointé la présence des troupes de Kigali en terre congolaise ? En revanche, outre les sujets de routine sur les relations entre deux États, il a plus mis du sien sur ce qui intéresse « la sécurisation des chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels nécessaires à la transition mondiale vers des formes d’énergies plus propres ».
En arrière-plan, on y aperçoit tout de suite la présence du « coltan » dans ses beaux atours princiers, en tant que gage de nouvelles technologies de pointe. C’est sur ce point que la RDC intéresse l’Amérique. Que ce pays se disloque, c’est à son avantage. Ainsi donc, le M23 ainsi que la prise de Bunagana par celui-ci, en territoire congolais, constituent-ils le cadet des soucis de l’Oncle Sam et consort.
L’ONU, qui dispose d’un droit de regard à la fois direct et tacite sur les actes des nations, est-elle dans l’ignorance de tous ces mouvements diplomatiques négatifs à l’encontre de la RDC ? Capable de mobiliser plus d’un milliard de dollars, par an, pour la Monusco, comprenant plus de 20 000 hommes, et ce, pendant une vingtaine d’années, est-elle incapable de se doter d’armes perfectionnées pour battre le M23 ?
Le M23, une rébellion sans feu ni lieu, à la solde du Rwanda, qualifié d’armée moderne par le secrétaire général de l’ONU, est une déviance innommable de cette structure internationale ! Il y a dans ce propos une moquerie subtile, acide, à l’égard des Congolais. Heureusement, dans l’est du pays, on l’a compris. À moitié. Puisqu’il ne s’agit pas de demander uniquement le départ de la Monusco, mais également de fédérer toutes les volontés progressistes du pays pour balayer le régime complotiste, en place à Kinshasa.
2. Burkina-Russie : le cercle s’agrandit ?
Le cercle des pays africains ayant emboîté le pas au Mali et à la Centrafrique s’agrandit, le Burkina Faso décide-t-il vraiment de se tourner vers la Russie ?
Le Président du Burkina Faso, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, et le ministre russe des Affaires étrangères, Serguei Lavrov ont échangé dimanche, au siège des Nations Unies, sur le renforcement d’une coopération « mutuellement bénéfique » aux deux pays, a rapporté la Présidence burkinabè dans un communiqué.
La coopération entre la Russie et le Burkina Faso est vieille de plus de 50 ans et, aujourd’hui, les deux pays entendent la consolider au regard des défis du moment, a souligné la présidence burkinabè.
« Actuellement, il y a eu le souhait de renforcer davantage cette coopération et la porter à un niveau qui sera mutuellement bénéfique aux deux pays », a pour sa part expliqué la ministre burkinabè des Affaires étrangères, de la Coopération et des Burkinabè de l’Extérieur, Olivia Rouamba citée dans le communiqué.
Confronté à une crise sécuritaire marquée par des attaques terroristes depuis 2015, le Burkina Faso s’est engagé à diversifier ses partenaires afin de faire face à ce phénomène.
Fin août, le Premier ministre de la transition burkinabè Albert Ouédraogo avait déclaré que le Burkina Faso se réservait le droit de diversifier ses partenariats, quitte à froisser les partenaires historiques soulignant qu’« il y a des questions à se poser sur le partenariat avec la France ».
Ouédraogo avait expliqué que la diversification des partenariats repose, entre autres, sur les principes de liberté, de sincérité et de l’indépendance territoriale.
Et l’autre aspect sur lequel avait insisté le Premier ministre burkinabè était « l’optimisation » des partenaires, car, pour lui, « compte tenu de la complexité de la menace, nous avons des partenaires qui sont spécialisés dans les questions de formation, d’autres dans le renseignement, et des équipements, donc il s’agit pour nous d’optimiser les atouts de chaque partenaire ».
Pourtant, ce partenariat avec la Russie ou même d’autres pays du bloc de l’Est comme l’Iran ou la Chine a souvent été évoqué par des membres du gouvernement burkinabè et même au sein de la population. Mais cela tarde avant de se mettre définitivement et concrètement en place.
Les attaques terroristes se multiplient au Burkina Faso, au point où le pays risque de devenir une base arrière pour les groupes terroristes associés à la France et aux États-Unis. Les Burkinabè continuent d’attendre de voir des actes concrets de la part du gouvernement burkinabè. Est-ce que le Burkina va concrètement se tourner vers la Russie ?
3. La mort du G5 Sahel sans le Mali… et l’Algérie...
Plus de quatre mois après avoir claqué la porte du G5 Sahel, les autres pays réclament le retour de Bamako au sein de l’organisation, car sans le Mali, le G5 Sahel est voué à l’échec !
Mercredi dernier, les chefs d’état-major des pays membres du G5 Sahel se sont réunis à Niamey, au Niger. Objectif : articuler la force d’intervention, mais sans le Mali. Depuis mai dernier, les autorités maliennes ont pris la décision de se retirer de tous les organes et instances du G5 Sahel. Et notamment de la force conjointe. Bamako reprochait alors la non-tenue d’un sommet qui devait permettre au Mali de prendre la présidence de l’instance régionale. Ce qui a montré également que l’instance n’a plus sa souveraineté tout comme la CEDEAO.
Le général Salifou Mody, du Niger, a affirmé qu’il y avait « urgence de se concerter et se réarticuler » après le départ de Bamako, et de « continuer les efforts communs de lutte contre les menaces transfrontalières de notre espace commun ». Les chefs d’état-major ont étudié toutes les options pour avancer sans le Mali.
Mais le G5 Sahel a-t-il encore une raison d’être avec exclusivement le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et le Tchad dans ses rangs ?
Pas vraiment, à en croire les discours des responsables nigériens et tchadiens, qui ne cessent d’envoyer des signaux au Mali pour tenter de le faire revenir au sein de l’organisation. Mais la « violation d’une décision prise par l’Institution, mais aussi celle des textes de base du G5 Sahel », à savoir offrir la présidence du G5 Sahel au Mali ne passe pas du côté de Bamako qui voit, dans cette décision, une façon de montrer au monde entier que l’instance a perdu toute sa souveraineté.
Au terme de la réunion de Niamey, les ministres de la Défense ont solennellement demandé aux dirigeants maliens de revoir leur position. « C’est vrai, le retrait du Mali est un handicap pour toutes les articulations de la force conjointe du G5 sahel, mais nous continuons la lutte, et nous sommes soudés », a déclaré le ministre tchadien de la Défense qui assure n’avoir « jamais lâché le Mali » et demandé « à nos frères maliens de regagner le G5 Sahel parce que l’ennemi est commun et le G5 Sahel est créé même par rapport au terrorisme dans le Sahel et précisément au Mali ».
Mais le Mali a choisi de suivre la voie du souverainisme. Pourquoi alors rester dans une instance qui ne sert pas à lutter contre le terrorisme et surtout, qui est gérée et menée par la France pour justement pas que les armées sahéliennes s’unissent et éradiquent les groupes terroristes. Les mêmes que la France arme et finance. Ce n’est donc pas au Mali de réintégrer cette instance, mais bien au Tchad et au Niger de sortir de l’instance et de s’allier au Mali, à la Guinée et à la Mauritanie.
Pour un expert en sécurité, le G5 Sahel doit également obtenir de l’Algérie l’accord d’y être intégré. « Même avec le Mali, le G5 Sahel ne peut valablement faire face au terrorisme sans l’Algérie qui est un autre poids assez important qu’il faut intégrer aujourd’hui dans la dynamique de lutte contre le terrorisme au Sahel et qui va impliquer absolument le départ de la France totalement du Sahel », affirme-t-il.
C’est sans doute là le nœud du problème : Alger ne veut et ne voudra jamais de forces étrangères, notamment françaises, à ses frontières et sur le continent africain. Dès 2017, au moment de discuter du financement du G5 Sahel, la presse algérienne avait rappelé qu’Alger « ne veut pas d’une autre structure qui évacue le traitement politique en profondeur de la question selon une approche afro-africaine et qui sera plutôt “un moyen” pour rendre durable la présence de troupes étrangères à ses frontières dans la mesure où le G5 Sahel ne peut pas fonctionner sans l’appui technique et stratégique français, voire allemand ».
Certains pays d’Afrique doivent encore prendre conscience qu’il faut suivre la voie de leur population et du souverainisme. Le peuple a bien compris, encore faudrait-il que les dirigeants suivent la voie du peuple.