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Crainte US d'une "de facto"isation du pétrole?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Photo à titre d'illustration de l'agence IRNA montre l'arrivée d'un pétrolier iranien dans les eaux vénézuéliennes.

Les tensions entre Riyad et Washington ne semblent pas trop s’apaiser, bien que le président américain Joe Biden ait promis d’effectuer dans un proche avenir une visite en Arabie saoudite.

L’amère expérience de l’administration Trump qui voyait dans le royaume saoudien une « vache à traire », remplacée par une administration Biden qui semble voir le Moyen-Orient comme un « passage » où les pays, plus précisément l’Arabie saoudite, doivent en payer des « péages » pour se sentir en sécurité, aurait appris pas mal de choses au prince héritier Mohammed ben Salmane.

Même les intercessions de Mohammed ben Zayed Al Nahyane, émir d’Abou Dabi et président des Émirats arabes unis, n’ont pas apporté de gros changements dans la politique saoudienne des États-Unis. Ces jours-ci, les informations montrant l’indécision de Joe Biden quant à sa visite promise en Arabie saoudite faisaient le tour des réseaux sociaux, pour que l’Arabie saoudite de Ben Salmane, embourbée plus que jamais dans la crise yéménite, subisse le comble de l’humiliation venant du maître américain.

Avec l’éclatement de la guerre à l’est de l’Europe qui a provoqué une crise de carburant dans l’ouest du continent, Ben Salmane a trouvé le moment opportun pour prendre sa revanche. MBS avait conclu qu’en retirant leurs systèmes de DCA du territoire de l’Arabie saoudite, les Américains ont rendu son pays vulnérable face aux missiles du mouvement de résistance yéménite, Ansarallah. Les tout premiers jours de la guerre, le jeune ambassadeur d’Arabie saoudite a été appelé à la Maison-Blanche afin de lui transmettre une demande du président des  États-Unis : ouvrir grand le robinet de pétrole vers les marchés occidentaux afin d’empêcher une flambée des prix. La réponse était comme suit : il vaudrait mieux que le président Joe Biden se déplace en personne à Riyad pour discuter de cette question en face à face avec le prince héritier Mohammed ben Salmane. Tout de suite après, Riyad a annoncé n’avoir pas l’intention d’augmenter la production. Le lendemain, Ben Salmane a appelé le président russe Vladimir Poutine, pour promettre que l’Arabie saoudite suivrait les décisions de l’OPEP+ [qui réunit 13 États membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, OPEP, et 10 pays producteurs externes à l’organisation, dirigés, de leur côté, par la Russie]. Ce contact téléphonique qualifié d’étrange par certains a provoqué l’ire des États-Unis, à tel point que l’ambassadeur américain à Riyad Michael Ratney est allé inopinément à la rencontre de Ben Salmane. On est porté à croire que cette rencontre confidentielle qui a duré plus de cinq heures a plutôt mal fini, la partie américaine ayant menacé le prince saoudien de retombées pas très agréables…

Plus s’intensifie la guerre à Kherson et Donbass, plus augmente la confusion des Américains. Les Européens quant à eux savent qu’avec la poursuite du conflit en Ukraine, la donne changera de plus en plus à leur détriment à l’approche de l’hiver. Les Allemands ont d’ores et déjà commencé des consultations avec Moscou pour y acheter du gaz en rouble, tandis que le président Biden des États-Unis a promis aux Européens de leur faire parvenir du GNL ; on ignore à quel prix astronomique. Toujours est-il que la revue Foreign Affairs ne trouve pas bonne l’idée d’une visite de Biden à Riyad pour parler d’une augmentation de la production pétrolière. « Il est peu probable que MBS fasse une faveur à M. Biden ; le prince saoudien préférerait attendre que le parti républicain, adversaire des démocrates et ami traditionnel de l’Arabie saoudite, reprenne le cap du Congrès américain l’année prochaine, écrit Foreign Affairs.

Sur ce fond, d’aucuns disent que la meilleure option pour les États-Unis consisterait à lever le boycott pétrolier imposé à l’Iran et au Venezuela pour permettre qu’un équilibre, pourtant provisoire, s’installe sur le marché mondial ; comme les Occidentaux auraient dû revenir de facto sur leurs positions envers l’Iran. Là-dessus, il y a un point qui mérite réflexion : la RII, vu qu’elle contrôle l’artère de transit énergétique dans la région, n’a vraiment pas besoin de coordination avec aucune partie quelconque pour vendre son pétrole.

Selon les derniers rapports publiés par le Département du Trésor des États-Unis, la part du dollar dans les réserves de change mondiales ont réduit de 36%. Les États-Unis se voient obligés de s’adapter aux banques européennes pour gérer la crise de contraction économique et la persistance du statu quo signifierait un véritable suicide pour Joe Biden. Déjà aux prises avec la crise du prix de l’essence, les États-Unis auront désormais du mal à subvenir aux besoins des citoyens envers d’autres articles de première nécessité y compris le lait en poudre.  

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En effet, si c’est établi que le président Joe Biden se donne la peine de prendre part à un « rendez-vous au détroit d’Hormuz » pour arranger les préachats de pétrole, les Américains savent bien qu’ils doivent en payer les coûts. Depuis mai 2018, date du retrait américain de l’accord nucléaire de Vienne, Trump et Biden ont successivement adopté toutes sortes de sanctions contre la RII. Des hommes d’affaires iraniens se sont vus arrêtés, des comptes bancaires d’Iraniens ont été bloqués, et pour combler tout cela, du pétrole iranien a été volé en pleine mer. C’est d’ailleurs avec un scénario bidon que les Américains semblent vouloir tirer profit de l’accord nucléaire (Plan global d’action conjoint, PGAC ou JCPOA selon le sigle anglais) dont ils se sont retirés en 2018. Un accès américain au pétrole du Moyen-Orient ne signifierait nullement une application d’un article quelconque du JCPOA ; c’est juste permettre aux Américains de profiter de cet accord.

La visite ridicule du patron de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Rafael Mariano Grossi, en Palestine occupée suivie par la rédaction d’un avant-projet de résolution anti-iranien au Conseil des gouverneurs vient à l’appui de cette réalité. Dans de telles circonstances, le président des États-Unis n’a que deux options devant lui : accepter les plans funestes du Mossad, se contenter des promesses empoisonnées de Riyad et laisser les républicains remporter les futures élections du Congrès ; ou abandonner l’attitude vicieuse du passé, revenir au JCPOA et garantir la possibilité pour les Iraniens de pouvoir en profiter. Évidemment, la seconde option sera plus intelligente.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV